Le marché de fabrication de mortiers et pilons de Bamako traverse de moments difficiles. Les clients se font rares. Ces ustensiles traditionnels sont progressivement abandonnés au profit d’objets modernes et des moulins.
Certains de nos ustensiles traditionnels, utilisés dans la cuisine, ont tendance à disparaitre au profit d’objets modernes. Il s’agit notamment du mortier et du pilon. Ces objets, qu’on retrouve dans les foyers au Mali et ailleurs, ont pourtant des significations pour le bien-être. Ils sont malheureusement ignorés par la jeune génération. Ce qui explique cette période de vaches maigres que traversent les fabricants desdits ustensiles.
Le mortier et le pilon sont des ustensiles ancrés dans la cuisine africaine, précisément malienne. Depuis quelque temps, ils sont détrônés. On s’en rend compte, ici, au marché de fabrique de mortiers et pilons de Bamako, la capitale malienne. Youssouf Koumaré est un fabricant. Il pratique ce métier depuis plusieurs décennies. Du haut de ses 60 ans, il constate avec amertume le délaissement des ustensiles traditionnels qui n’attirent plus les nouvelles ménagères.
« Joindre les deux bouts »
« Je vis de ce métier. Le marché n’est plus aussi fructueux. Les femmes n’aiment plus piler. Je vends deux sortes de mortiers : le petit pour les condiments et le grand pour le mil », confie-t-il. « J’ai hérité ce métier de mon père. Mais je n’arrive plus à en vivre. Le prix des mortiers varie de 5 000 francs CFA à 25 000 francs CFA. On peut faire une semaine sans vendre un seul mortier. Auparavant, on vendait 4 et plus par semaine. Avec la conjoncture, je fais autre chose à côté pour joindre les deux bouts », poursuit Mamadou Koumaré, un autre fabricant.
Beaucoup de femmes se sont tournées vers les moulins pour des raisons diverses. Selon certaines ménagères, c’est pour gagner plus de temps. Tan dis que d’autres préfèrent les moulins parce qu’ils dispensent d’efforts physiques.
« Unifier la famille »
Aminata Sangaré est une ménagère vivant à Bamako. Elle dit n’utiliser que le mortier et le pilon. « Je préfère le to à base de mil pilé que celui fait par le moulin. À mon avis, le goût diffère », estime-t-elle. Niaman Fofana, elle, se marie bientôt. Elle est venue choisir un mortier et un pilon pour son trousseau de mariage. Malgré son jeune âge, elle reste attachée à ces ustensiles traditionnels. « Je ne peux pas faire la cuisine sans utiliser le mortier et le pilon. C’est la raison pour laquelle je suis venue en acheter pour mon mariage.»
« Quand on met le mortier et le pilon dans les trousseaux de mariage, c’est pour dire à la nouvelle mariée d’être fidèle à son mari et de respecter le foyer conjugal. Le mortier sert à unifier la famille. C’est un facteur de paix et de cohésion sociale. On constate maintenant que le mortier et le pilon n’existent plus dans beaucoup de nos familles », explique Guimba Kanouté, un traditionnaliste. Il ajoute que le résidu de poudre que contient le mortier peut soigner beaucoup de maladies touchant les enfants. Aussi, déconseille-t-il les mortiers trop usés, tout en insistant sur le retour à ces valeurs pour le bien-être de la société en général, et des foyers en particulier.
Source : Benbere