Longtemps divisés sur l’attitude à tenir vis-à-vis de la Russie, les pays de l’UE ont-ils, enfin, fait preuve d’unité lors de ce sommet à Versailles ?
Au-delà d’une réponse unanime des Vingt-Sept pour dénoncer l’invasion d’un pays libre par la Russie, il y a une claire unanimité pour tirer les leçons de cette crise. D’abord dans l’accueil des réfugiés : c’est un devoir moral. Mais aussi pour relever les trois défis maintenant évidents pour tous les Européens : la sécurité, l’énergie et l’alimentation. Cette guerre a changé la donne : l’Allemagne vient d’augmenter considérablement son budget de défense, le Danemark se rapproche de la défense européenne. Au-delà, il est nécessaire de diversifier nos approvisionnements en gaz et en pétrole et produire plus, chez nous, d’énergie nucléaire et renouvelable.
La réponse de l’UE à l’Ukraine, qui a transmis une demande officielle d’adhésion, est-elle à la hauteur ?
Dans la situation dramatique où se trouve le peuple ukrainien, il a besoin de solidarité active et pas de fausses promesses d’adhésion rapide que nous ne pourrions pas tenir. C’est une question de respect aussi. Les Vingt-Sept ont réaffirmé la vocation européenne de l’Ukraine. Nous avons, avec Kiev, un accord d’association depuis 2013 : appliquons-le, renforçons-le avant d’aller plus loin.
Le projet de défense européenne prend-il forme ou bien reste-t-il, comme le prétend Éric Zemmour, une chimère ?
Éric Zemmour, qui a fait allégeance à M. Poutine depuis longtemps, n’est pas le mieux placé pour parler de l’indépendance de l’Europe. La politique de défense est le principal sujet sur lequel il y a une souveraineté nationale qui doit être préservée. Donc, nous devons avoir des souverainetés solidaires et cela prend du temps. Une part de l’effort doit être mise dans un pot commun, c’est ce que propose Valérie Pécresse. On connaît les priorités : un avion gros-porteur, dont nous avons bien besoin pour évacuer nos soldats du Mali, le spatial, le cyber, les drones. Cette mutualisation justifie une préférence européenne. C’est une des leçons de ce choc géopolitique : la fin de la naïveté des Européens dans leurs échanges commerciaux. Il faut protéger davantage nos industriels et nos agriculteurs contre les importations déloyales.