Depuis les coups d’État, les partis et leurs leaders sont confrontés à l’inflexibilité des militaires. Entre mobilisation discrète et critiques frontales, ont-ils encore leur mot à dire ?
À ses proches, Assimi Goïta, le président de la transition au Mali, ne l’a jamais caché. Il connaît peu, voire pas du tout son Premier ministre, Choguel Kokalla Maïga. Il lui aurait préféré le profil d’un homme de dossier, capable de le représenter en toutes circonstances, comme Abdoulaye Diop, son ministre des Affaires étrangères.
Mais au soir du 24 mai 2021, quand la junte convoque en catimini les cadres du Mouvement du 5 Juin- Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), à Kati, pour leur proposer la primature, le choix est hautement stratégique. La transition vient de basculer et les militaires le savent : c’est auprès du peuple qu’ils trouveront leur salut.
Pari gagnant
Dès la première phase de la transition, conduite par le président Bah N’Daw et son Premier ministre Moctar Ouane, les esprits s’échauffent parmi les cadres du M5-RFP. Ils estiment que la transition leur a été volée, à eux qui, pourtant, ont battu le pavé jusqu’à ouvrir la voie du renversement d’Ibrahim Boubacar Keita (IBK) par les militaires.
À Bamako, le volubile M5-RFP avait même demandé la dissolution du Conseil national de transition (CNT). Onze mois après qu’elle s’est emparée de Koulouba, le pari est gagnant pour la junte. En choisissant un Premier ministre au sein du Mouvement, l’armée espère faire taire la rue et profiter d’un regain de légitimité populaire face à la méfiance de la communauté internationale.
L’arrivée de Choguel Maïga à la primature a permis de faire basculer l’Union pour la république (URD) de Soumaïla Cissé – l’un des partis les plus populaires au Mali – dans les rangs de la junte. Avec deux ministres au gouvernement, dont l’un au stratégique ministère de la Refondation, les caciques de l’URD, qui ont longtemps combattu le régime d’IBK, affichent sans sourciller leur soutien aux militaires. Et iront assister aux dernières assises nationales de décembre 2021, boudées par le reste des partis politiques.
Désenchantement à Bamako
Source : Jeune Afrique