Le reggae, musique popularisée dans le monde entier par son icône Bob Marley, a été inscrit jeudi sur la liste du patrimoine culturel immatériel par l’Unesco qui a souligné son message « d’amour et d’humanité ».
« C’est un jour historique. Nous sommes très, très heureux, je suis émue », a réagi pour l’AFP la ministre de la Culture jamaïcaine, Olivia Grange, présente à Port-Louis, capitale de l’Ile Maurice où se réunit un comité spécialisé de l’Unesco.
L’organisme de l’Onu a souligné « la contribution » de cette musique jamaïcaine à la prise de conscience internationale « sur les questions d’injustice, de résistance, d’amour et d’humanité, et sa dimension à la fois « cérébrale, socio-politique, sensuelle et spirituelle ».
« Si, à ses débuts, le reggae était la voix des communautés marginalisées, il est désormais joué et adopté par une importante partie de la population, tous groupes ethniques et religieux confondus », a ajouté l’Unesco.
La décision de l’Unesco « aide à placer la Jamaïque sur une carte. Où que vous alliez, quand vous dites que vous êtes de Jamaïque, on vous dit +Bob Marley+ », s’est encore réjouie la ministre: « nous allons fêter » la décision, a-t-elle dit.
Le reggae rejoint ainsi une liste de quelque 400 traditions culturelles (chants, danses, spécialités gastronomiques ou célébrations) allant de la pizza napolitaine au zaouli, musique et danse des communautés gouro de Côte d’Ivoire.
Le comité ad hoc de l’Unesco, qui se réunit jusqu’à samedi pour examiner 40 demandes d’inscription, a également intégré jeudi le chidaoba, une lutte traditionnelle géorgienne pratiquée depuis des siècles, et avait inclus la veille les savoir-faire liés au parfum de Grasse en France.
Le reggae, dont la candidature était portée par la Jamaïque, a émergé à la fin des années 1960. Style musical issu du ska et du rocksteady, il a aussi intégré des influences du jazz et du blues.
La musique est vite devenue populaire aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, importée par les nombreux immigrés jamaïcains après la Seconde Guerre mondiale. Elle s’est souvent revendiquée comme la musique des opprimés, abordant des questions sociales et politiques, la prison et les inégalités.
« Le reggae est un distillat des différents genres jamaïcains, remontant jusqu’aux temps de l’esclavage », estime le musicologue jamaïcain Garth White, dans une vidéo mise en ligne par l’Unesco.
Le reggae est indissociable du rastafarisme, mouvement spirituel qui sacralise l’empereur éthiopien Haïlé Sélassié et promeut l’usage de la ganja, ou marijuana.
En 1968 la chanson « Do the Reggay » de Toots and the Maytals a été la première a utiliser le nom de reggae, qui a connu un grand succès mondial grâce à des classiques de Bob Marley (1945-1981) et son groupe the Wailers comme « No Woman, No Cry » et « Stir It Up. »
C’est une « excellente nouvelle » parce que le reggae « n’a jamais eu la reconnaissance qu’il mérite et a toujours été un peu à la marge », a déclaré à l’AFP Jerôme Levasseur, directeur du Bagnols Reggae Festival, un festival de reggae qui se tient à Bagnols-sur-Cèze, dans le sud de la France.
Pour M. Levasseur, « la musique doit sa notoriété à la personnalité de Bob Marley et, bien sûr, à sa simplicité » technique. Parmi ses principales figures vivantes se trouvent les Jamaïcains Jimmy Cliff ou Toots Hibbert, ou l’Ivoirien Alpha Blondy.
A la différence de celle du patrimoine mondial, cette liste n’est pas établie selon des critères « d’excellence ou d’exclusivité », selon l’Unesco. Elle ne cherche pas à réunir le patrimoine « le plus beau » mais à représenter la diversité du patrimoine culturel immatériel, à mettre en lumière des savoir-faire portés par des communautés.
Journal du mali