Première cause de décès maternel dans le monde et plus particulièrement au Mali, l’hémorragie post-partum représente 10 à 15% des complications obstétricales au Centre hospitalier universitaire (CHU) Gabriel Touré. Une femme fait une hémorragie post-partum lorsqu’après l’accouchement elle saigne abondamment (soit par la quantité supérieure à ½ litre de sang, soit par le retentissement de saignement sur l’état de la femme même si la quantité de sang perdue ne vaut pas un ½).
Cette hémorragie peut venir de la zone ou le placenta est inséré ou être consécutive à la déchirure des voies génitales. C’est pour cela que le Dr Amadou Bocoum, gynécologue obstétricien à l’hôpital Gabriel Touré incrimine la zone d’insertion du placenta et les déchirures traumatiques pendant l’accouchement comme deux origines de l’hémorragie post-partum chez la femme. Autrement dit l’hémorragie peut être liée à un problème de rétention du placenta. Ce qui signifie qu’après l’accouchement, le placenta est resté à l’intérieur.
Elle peut être aussi due au fait que la femme a un trouble de coagulation. Dans certains cas, il peut également s’agir d’une déchirure ou du fait que l’utérus ne se rétracte pas et reste mou. Sinon le gynécologue dit qu’après l’accouchement, l’utérus doit normalement se rétracter et devenir très petit.
Le diagnostic peut être fait par la femme elle-même ou par l’agent de santé. La femme peut savoir qu’elle fait une hémorragie post-partum en constatant que la serviette hygiénique qu’elle porte est mouillée ou en voyant que le sang est en train de couler à côté. Souvent c’est par des signes : sueur froide, le cœur qui bat très vite, une respiration forte ou une agitation. «Ce sont des signes qui montrent que la patiente est en train de perdre du sang et que l’organisme est en train de se battre pour assurer l’irrigation du reste de l’organisme», explique le spécialiste tout en indiquant que la prévention est primordiale.
Le toubib révèle que l’hémorragie post-partum doit être prévenue depuis la grossesse. Selon lui, il faut nécessairement rechercher les facteurs de risques d’hémorragie. Il s’agit de la grande multiparité, une femme qui a déjà des problèmes de coagulation, une femme qui a déjà fait une hémorragie post-partum. Mais aussi une femme atteinte d’hypertension artérielle, une femme qui a eu des grossesses multiples.
C’est pourquoi, il est important d’informer ces femmes sur les signes d’alertes ou de danger. L’accouchement doit être fait par un personnel qualifié et il faudra aussi éviter d’appuyer sur l’utérus pour faire sortir l’enfant.
Pendant l’accouchement, il faut respecter le mécanisme normal d’accouchement. Il ne faut donc pas chercher à accélérer obligatoirement le travail. Sur ce point, le gynécologue a précisé qu’il y a des heures précises de travail. Pour les femmes qui sont à leur première maternité, le travail doit durer 8 à 10 heures. Tandis qu’il faut 4 à 6 heures de temps pour celles qui ont déjà enfanté.
Après l’accouchement, la femme doit être mise en observation pendant 72 heures avant de rentrer à la maison. Parce que l’hémorragie post-partum est fréquente dans les premières 24 heures voire moins. Mais elle peut survenir aussi dans les 48 heures, 72 heures qui suivent la délivrance. Il déplore le fait que nos centres ne puissent recevoir toutes ces femmes.
C’est ce qui, dit-il, fait qu’on a un taux élevé d’hémorragie. C’est une surveillance intense de 6 heures qui consiste donc à vérifier la tension artérielle, le rythme cardiaque et voir le sang qui sort. Mais aussi contrôler si l’utérus est rétracté (si le globe de sécurité est bien formé). La surveillance se fait toutes les 15 minutes, pendant les deux premières heures, puis toutes les 30 minutes pendant une heure et ensuite chaque heure pendant 3 heures.
Pour cela, il faut aussi du personnel qui manque dans nos centres de santé. Pour arrêter une hémorragie post-partum, il faut tout d’abord corriger la perte sanguine, traiter la cause et lutter contre les complications. Celles-ci peuvent être une insuffisance rénale, un arrêt cardiaque et à long terme l’hémorragie peut entraîner le syndrome de Sheehan (le fait que la femme n’aura plus de montée de l’utérus. Elle ne verra plus ses règles parce que l’organe qui commande tout ça sera détruit).
Le traitement est médical ou chirurgical. Le premier consistera à mettre la femme dans une position de sécurité, c’est-à-dire qu’elle soit allongée pour éviter les vertiges, l’apporter de l’oxygène, avoir une bonne voie veineuse pour faire passer les produits sanguins, faire rapidement un bilan pour retrouver la sévérité de l’anémie, les troubles de la coagulation.
Utiliser des médicaments comme les utérotoniques (des agents pharmacologiques utilisés pour induire une contraction ou une plus grande tonicité de l’utérus qui permettent de bien fermer le bloc de sécurité). Des sondes de backry qui permettent de boucher les vaisseaux et arrêter les saignements. Autre élément qu’il faut avoir également c’est le sang pour la transfusion. C’est à ce niveau que se pose le retard dans la prise en recharge. Nous n’avons pas un stock important de sang.
Le praticien donne aussi des explications sur la prise en charge chirurgicale. Celle-ci consiste à faire des points de sutures à la partie génitale où, il y a des déchirures pour arrêter les saignements. Si malgré cela, les saignements continuent, il faudra dans ce cas ouvrir le ventre et attacher les vaisseaux qui apportent le sang à l’utérus. Si cette technique ne suffit pas, on enlève complètement l’utérus (hystérectomie). Ici l’objectif ultime est de sauver la vie de la femme.
C’est pourquoi, le gynécologue invite les femmes à faire des consultations prénatales dès le début de la grossesse. Ceci permet de dépister les facteurs de risques, de planifier l’accouchement, de choisir un endroit qualifié pour l’accouchement. Il faut que la population intègre le réflexe du don de sang. Il faut que le personnel de santé sache référer à temps vers une structure compétente.
Dr Bocoum invite les autorités sanitaires à relever le plateau technique des Centres de santé de référence (Csref) et hôpitaux.
Fatoumata NAPHO