Face à la gestion « clanique et sombre » en cours depuis plusieurs années dans les procédures d’importation des marchandises au Mali, les syndicalistes de la direction générale du commerce, de la consommation, et de la concurrence (DGCC) ont, enfin, brisé le silence. C’était au cours d’une conférence de presse tenue, mercredi 18 août. Occasion pour eux de faire des révélations.
« La conférence vise à prendre à témoin l’opinion nationale et internationale et d’attirer l’attention des plus hautes autorités sur les tripatouillages qui existent dans la gestion du programme de vérification des importations (PVI) », souligne Nouhoum Sidibé, secrétaire général du comité syndical de la DGCC. Le PVI est un programme qui a été mis en place par le gouvernement du Mali pour sécuriser les importations des marchandises dans le pays. Il a pour objectif de garantir l’approvisionnement du pays en produits de qualité ; de protéger le droit des consommateurs en préservant le rapport de qualité/prix ; d’assurer la sécurité nationale en matière d’importation ; d’assainir le marché contre les pratiques anticonstitutionnelles et les fraudes commerciales dans le domaine d’importation ; d’éviter la fuite des capitaux ; de préserver les recettes douanières et fiscales…Pour donc mener à bien ce programme, explique Nouhoum, l’Etat malien a instauré un système de prélèvement sur les intentions d’importation au niveau de la DGCC. Ce montant est fait à partir d’un taux élevant à 0,75% du prix d’achat des marchandises. « Ce fonds sert à payer les sociétés mandatées pour des prestations comme l’entretien de routes ; l’appui des structures impliquées dans la gestion du commerce extérieur », expose le secrétaire. Le gouvernement a toujours donné mandat au patronat pour gérer ce fonds, alors que ça ne relève de son domaine, ajoute M. Sidibé. Chose qui a d’ailleurs été dénoncée, selon le secrétaire général, par le syndicat. D’après lui, le Mali est le seul pays au monde où cette pratique reste en cours. C’est-à-dire : confier la gestion d’un fonds public aux syndicats (patronat), en lieu et place de l’Etat, au détriment des structures techniques publiques comme la DGCC. Le conférencier déplore le fait que le gouvernement ait, à travers le patronat, toujours engagé des sociétés étrangères pour faire l’inspection avant l’embarquement des marchandises au Mali.
C’est-à-dire : faire l’inspection avant chaque opération d’achat de marchandises à l’extérieur du pays pour vérifier la qualité, le prix et autres. Ce rôle qui revient normalement à des structures comme la DGCC est, depuis Près de 30 ans aujourd’hui, confié à des structures étrangères. Le pire, c’est qu’il s’agit des entreprises qui ne vérifient pas les marchandises conformément aux normes prévues en la matière, dénoncent les conférenciers. Pour M. Sidibé, le PVI a toujours été géré par des entreprises étrangères comme : SGS, COTECNA. Depuis 2007 à nos, il est géré par le Bureau Veritas, une entreprise française au Mali. Dans les contrats qu’elles signent avec l’Etat, ces structures sont chargées de faire le transfert de compétence aux structures étatiques. « Mais cela n’a jamais eu lieu », regrette Nouhoum. Puisque ce sont des contrats de milliards, ces entreprises sont, en complicité avec des cadres du ministère de l’Economie et des Finances, en train de faire tout pour perpétuer le système, d’après le syndicaliste. En 2018, le Mali a changé de système en signant un accord qui interdit les inspections avant l’embarquement des marchandises. « Au lieu de consulter les structures étatiques afin de voir ce qu’il fallait faire, quelques cadres du ministère des Finances se sont, en complicité avec le patronat, consultés pour donner trois(3) contrats juteux à Bureau Veritas », dénonce Nouhoum. Le premier contrat s’élève à 22 milliards et porte sur le scanning des marchandises. Le 2eme est estimé à plus de 23 milliards et consiste à créer et exploiter le centre d’expertise technique (CET). Le 3ème contrat porte sur l’inspection des produits pétroliers et se chiffre à plus de 12 milliards. Le total fait plus de 60 milliards que l’Etat paie sur 5 ans au Bureau Veritas pour des services qui peuvent être accomplis même par la douane malienne, regrette Nouhoum. Il réclame à ce que la gestion du PVI revient aux structures étatiques, énonçant que ces contrats sont donnés sans raisons valable au Bureau Veritace par quelques cadres des Finances, en complicité avec le patronat. Et de promettre de dénoncer les noms des coupables dans les jours à venir.
Mamadou Diarra
Source: LE PAYS