À l’occasion de la fête de Tabaski, une équipe de reporters du quotidien Le Pays s’est promenée sur des marchés de bétail afin de recueillir les différentes réactions des commerçants, ainsi que des acheteurs sur le niveau de prix du mouton sur le marché.
Les plaintes se multiplient à l’approche de la fête de Tabaski comme chaque année. Les commerçants de bétail, aussi bien que leurs clients, se plaignent et se rejettent souvent les responsabilités sur la cherté des moutons. Ainsi, certains marchands de moutons du marché de bétail disent que la cherté de cette année est due à la crise actuelle du pays sachant que la majeure partie des moutons qu’ils reçoivent proviennent des pays Dogon balloté par une crise interethnique depuis quelques temps. C’est ce que soutient Mohamed Diallo, vendeur de bétail au marché de Kalabancoro-Tiebani: « L’augmentation des prix du bétail est due aux lieux de provenance. Notre bétail nous vient de Koro, Bankasse, Niono, etc. ; et pour les avoir, nous payons en plus, pour chaque mouton, au minimum 4 000Fcfa et 5000 Fcfa. En plus de cela, ils doivent être nourris et leur alimentation ne se limite pas uniquement aux herbes. Il y a également le mil que nous leur achetons et de la graine de coton.»
De son côté, Abdramane Coulibaly, vendeur au marché de Faladié, soutiendra que cette crise a eu beaucoup d’impacts sur l’approvisionnent du marché en moutons. Cela est visible par l’absence de certains Maures qui, chaque année à la même période, amènent beaucoup de moutons.
Aldiouma Traoré, vendeur au même marché, dira que la cherté des moutons reste tributaire du fait qu’ils reçoivent difficilement les bêtes. À ses dires, certains acquéreurs périssent sur le chemin. Plusieurs obstacles planent autour de l’acquisition des moutons, dit-il, notamment les risques sécuritaires, mais aussi il faut avoir des intermédiaires bien informés sur le marché. Ceux-ci, martèle-t-il, ont leur part à payer. Il faut être assez courageux pour mener cette activité, précise-t-il. À le croire, bien qu’il soit vendeur, il ne prendrait jamais de tels risques contre tout l’or du monde.
Quant à Singay Traoré, président des vendeurs du marché de Faladié, le problème se situe plus au niveau de la population qui n’attend que la dernière minute pour acheter les moutons. Cela est même visible par l’absence des clients sur place. Cette venue tardive des clients est liée à plusieurs facteurs, explique-t-il. Selon lui, ce retard contrairement à ce que pense la population, risque de leur causer plus de contraintes en achetant plus cher les moutons au cas où il y’ aurait crise d’approvisionnement du marché. À ses dires, chaque jour, le prix des animaux augmente à cause de leur prise en charge et de leur alimentation.
Ces mêmes remarques sont faites par Alou N’diaye. Selon lui, cette année, les béliers sont non seulement rares sur le marché, mais aussi il y a moins d’acheteurs. Les clients sont moins excités à l’achat des bêtes à cause du prix percutant.
Outre ces difficultés que traversent les vendeurs de moutons dans les marchés de bétails, il y a un autre problème auquel les commerçants de bétail de Kalabancoro-Tiebani restent confrontés : celui d’un lieu d’implantation pour leur activité de commerce. Sur ce point, interrogé par nos soins, Monsieur Diallo explique : « Ce marché de bétail appartient à un cultivateur. C’est le champ d’autrui. » Ce qui sous-entend que les vendeurs n’ont pas un marché propre à eux où ils peuvent mener leur activité de commerce librement. « Lorsque nous sommes allés voir le maire, explique Mohamed Diallo, pour lui expliquer notre problème, il les a pris en compte en nous donnant un terrain très loin de la ville, mais aussi trop restreint. Nous lui avons fait savoir que ce terrain est très petit pour pouvoir contenir nos animaux et jusqu’à l’heure où je vous parle, nous n’avons rien reçu d’autre. »
Aux dires des commerçants, ces différentes difficultés qu’ils traversent ont aussi une grande part dans l’augmentation des prix des moutons.
Du côté des clients, c’est très cher disent-ils, comparativement aux années passées. Approché dans le marché de Kalabancoro-Tiebani, Mamoutou Traoré, imam de la deuxième mosquée de Tiebani, accompagné par son griot, Hamadi Berthé, dit que les prix des moutons sont très élevés : « Nous sommes venus acheter un mouton, mais celui que nous voulions acheter, on nous dit qu’il coûte 150 000 Fcfa et le vendeur refuse toute négociation. Cela montre réellement que cette année les bêtes coûtent cher par rapport à l’année dernière ».
Dans le village de Sanando, cercle de Barouéli, région de Ségou, nous avons contacté un correspondant sur place, Ousmane Coulibaly, qui nous a confié que l’année dernière il avait acheté son mouton de Tabaski à 55 000 Fcfa, mais cette année, pour des moutons de la même catégorie, on lui demande 75 000 Fcfa. Un client, après l’achat de deux moutons dans le marché de Faladié, à 250 000 Fcfa, dira sous l’anonymat que les moutons qu’il a achetés sont chers comparativement à l’année dernière.
Un autre client du même marché de bétail de Faladié dit que, chaque année, il achète chez le même vendeur dont il est un client fidèle, mais cette année, il dit avoir payé un peu cher son mouton. Au lieu de 100 ou 110 000 francs, il l’a cette année à 125000 FCFA.
Ces échos à moins d’une semaine de la fête ne sont pas un bon présage. Est-il encore nécessaire d’appeler ce pays d’agro-sylvo-pastoral ?
La Rédaction
Source: Le Pays