Qu’est ce qui peut bien pousser un officier sans aucune envergure, sans charisme et sans aucune personnalité à s’aventurer sur le terrain politique. Un terrain qui demande pourtant beaucoup plus que d’être simplement un général et bardé d’un « hypothétique » sésame de Saint – Cyr ? Notre enquête nous a permis de lever un coin de voile sur les véritables raisons de cette aventure téméraire.
Au lendemain de la transmission de sa lettre de démission de l’armée malienne, le Général Sinko Coulibaly s’est précipité sous les projecteurs des medias comme une méga star, bien armé contre la gouvernance du président Ibrahim Boubacar Kéita. Les mots sont bien choisis, les médias triés sur le volé. Dans sa première salve, il choisi de travailler à la hache démolissant tout sur son passage. « La gouvernance d’IBK est un échec. Il faut un autre président pour le Mali en 2018 » Si dans le fonds, les choses sont claires à ce niveau, dans la forme, le « Généralissime » Sinko, oublie qu’il utilise les biens publics de l’Armée pour faire sa propagande. En effet les interviews sont réalisées dans les bureaux de l’Ecole de maintien de Maintien de la Paix.
Cette précipitation s’explique en réalité par le manque de lucidité de l’officier qui pourtant faisait preuve d’un sang froid connu. Pourquoi le Général Sinko a-t-il si vite paniqué ? La réponse est simple comme bonjour.
Le vérificateur Général lui demandait de justifier 836 millions FCFA
L’affaire semblait passer inaperçu pour tout le monde sauf le Général Moussa Sinko Coulibaly qui se croyait à l’abri de toute poursuite.
On se rappelle que le Général Moussa avait été ministre de l’administration territoriale et avait organisé les élections de 2013.
Très récemment, dans la son tout dernier rapport, le Bureau du Vérificateur Général avait épinglé sa gestion et transmis le rapport au président de la République Ibrahim Boubacar Kéita.
Les limiers du BVGAL ont enquêté sur un fonds qui a été réparti entre les structures chargées des élections relevant toutes du Général Moussa Sinko Coulibaly. Ainsi, la Dfm du ministère chargé de l’Administration territoriale a reçu 32,21 milliards Fcfa, la Ceni : 6,49 milliards Fcfa, la Dge : 3,72 milliards Fcfa, Régie du Gouvernorat de Sikasso : 686,51 millions Fcfa.
C’est bien dans la gestion de ces fonds que des irrégularités ont été relevées à tous ces niveaux, pour une bagatelle de 836 millions Fcfa.
Au niveau de la Dfm, le directeur aurait ordonné l’exécution des contrats revêtus de faux cachets de paiement de droits d’enregistrement et de redevance de régulation. Le montant compromis s’élève à 55 millions FCFA selon le rapport du Vérificateur général. Ce n’est pas tout. Loin s’en faut. Il est reproché à la Division de la comptabilité matières, de n’avoir pas pu prouver l’existence de biens acquis sous la forme de matériels informatiques. Autrement dit, la mission a conclu à un marché fictif pour trente-cinq millions de FCFA.
Ensuite, il y a été révélé que les produits de la vente des dossiers d’Appel d’Offres (DAO) s’élevant à 11 millions FCFA n’ont pas été reversés au Trésor public par le ministère. Un autre crime courant a été découvert au sein du même département où les enquêteurs découvrent que pour d’autres marchés relatifs à la fourniture de produits alimentaires et de consommables informatiques, le Dfm a procédé à des fractionnements pour un montant de 439 millions FCFA.
Au niveau des régions, le régisseur du gouverneur de Ségou n’aura pas justifié 42 millions FCFA, qui constitue l’écart du fonds destiné aux frais de distribution des cartes Nina. Celui du gouvernorat de Sikasso n’a pas justifié trente millions de FCFA, soit l’écart du montant total destiné à la sécurisation des élections.
Le gouverneur de Sikasso et ses préfets n’ont pas justifié des fonds destinés à la prise en charge des commissions administratives mises en place dans le cadre de la révision des listes électorales. Un montant de quatorze millions FCFA dont cinq cent mille FCFA pour le gouverneur n’a pas été justifié sur un total de 67 millions FCFA repartis entre le gouverneur et les préfets de la région.
La gestion est encore plus mauvaise à la Délégation Générale aux élections (Dge).
Ici, le chef de la Cellule de gestion financière et du personnel est particulièrement habile en faux. Mais il n’a pas échappé à la loupe des limiers du BVGAL. Il aurait simplement conclu des contrats simplifiés fictifs pour régler des livraisons faites sans base légale. Ce n’est pas tout. En vue de doter la Dge en matériels et consommables informatiques, le chef de la même cellule a lancé un marché dont une société d’impression a été déclarée attributaire provisoire. Bien que ce marché n’ait pas été approuvé, il a néanmoins procédé à des réceptions partielles de matériels et consommables fournis par l’attributaire provisoire pour un montant de 77 millions de Fcfa.
Il a par la suite signé avec la même société neuf contrats simplifiés fictifs pour un montant équivalent afin de procéder au règlement des livraisons irrégulièrement effectuées dans le cadre du marché non approuvé. Ce n’est pas tout. Le Délégué général aux élections n’a pas appliqué de pénalités de retard exigibles sur quatre véhicules, des matériels et consommables informatiques, ainsi que le logiciel de gestion. Le montant de ce manque à gagner, lié à la non-application de pénalités se chiffre à 18 millions de FCFA. Quant au régisseur de la même boite, il a payé des heures supplémentaires à certains agents, en violation de la réglementation en la matière. Pour ces paiements supplémentaires, dont aucune preuve de réalisation n’a été établie, le régisseur a dépensé 17 millions de FCFA.
Ce rapport lourd comme un sac de gravier pesait lourd sur les frêles épaules du Général Moussa Sinko Coulibaly qui avait commencé à multiplier les manœuvres plus cyniques les unes que les autres, histoire d’échapper à la taule.
Tous les moyens sont bons pour échapper à la prison
En plus de ces motifs, le Général Moussa Sinko Coulibaly qui avait infiltré les éléments de la Sécurité militaire aurait eu accès à des informations compromettantes le concernant.
Selon nos investigations, plusieurs informations dont certaines tr-s crédibles faisaient état de l’appartenance du Général Moussa Sinko Coulibaly à un groupe d’officiers et de sous officiers qui planifieraient un renversement du régime.
Cette bande qui avait été identifiée il ya quelques mois aurait choisi d’infiltrer les manifestations populaires pour commettre une bavure pouvant provoquer des émeutes aboutissant à une insurrection qui conduirait à la chute du régime.
Selon certaines indiscrétions, il aurait même été question d’assassiner Ras Bath lors d’une manifestation. Un projet qui aurait été mis au compte du régime d’IBK.
La récente déclaration d’un opérateur économique (au centre d’une controverse) sont venues trahir les secrets d’un groupe tapis dans l’ombre. « Il faut jeter Ras Bath en prison pour qu’on puisse en finir avec ce régime » disait l’homme d’affaire en question chez l’un de nos confrères. C’était lors du dernier jugement en appel du polémiste Ras Bath.
Informé de ce projet sinistre pour notre démocratie, le président aurait évité de tomber dans le piège de ses détracteurs en instruisant de laisser le jeune Bathily de continuer à « hurler » autant qu’il veut sa colère.
En prenant cette sage décision, IBK a ainsi déjoué discrètement le savant plan ourdi par la « meute de putschistes mal repentis ».
Selon toujours nos sources, plusieurs officiers et sous officiers impliqués dans ce projet machiavélique, sont encore tapis dans l’ombre.
Malheureusement pour eux, le Général Sinko Coulibaly qu’ils avaient choisi pour prendre le pouvoir, vient de basculer dans la marre politique où les adversités ne laissent aucune chance aux grands secrets.
Qui et qui sont impliqués dans ce coup raté ? On parle de deux Généraux retenus dans les mailles de la justice, d’un officier en détention et de plusieurs sous officiers visés par une enquête sur la gestion des fonds destinés aux troupes déployées sur le terrain. IBK aurait t il commis l’erreur de déclarer « Tous ceux qui détourneront les fonds destinés aux soldats, cracheront jusqu’au dernier centimes » ? Probablement.
Affaire à suivre
Abdoulaye Niangaly
La Dépêche