Le fil ne passe pas en ce moment entre Bamako et Paris. Et ce, depuis le discours du Premier ministre Choguel, que certains qualifient d’ ‘’historique’’ et d’autres de’’ populiste’’. Il a été prononcé le 25 septembre dernier à la Tribune de la 7ème assemblée générale des Nations Unies. Dans ce discours, Choguel ‘’ accuse la France d’abandonner le Mali en plein ‘’. Chose qui a davantage creusé le fossé qui existait entre Macron et Assimi depuis le second putsch orchestré contre Ba N’Daw.
Surtout que le discours a été prononcé juste à la vielle de la mort du 52ème soldat français au Mali. D’où la réponse très virulente de Macron qui traite de ‘’honteux les propos des autorités illégitimes issues de deux coups d’Etat’’. Si le gouvernement Choguel a pondu un communiqué pour répondre sévèrement au ministre des Affaires étrangères du Niger qui avait exigé le respect du délai de la Transition, il n’a cependant pas répondu à Macron qui avait annoncé la diminution du nombre de ses soldats au Mali. Mais hier, mardi, le ministre des Affaires étrangères, Abdoulaye Diaop, a convoqué l’ambassadeur de la France au Mali pour s’en offusquer des propos tenus par le président Français Macron. Malgré ces malentendus émaillés par des propos durs, la France n’est pas disposé à quitter définitivement le Mali dans les 50 prochaines années. Cela est une évidence. Ce n’est pas un débat !
En effet, pour la France, le Mali est un maillon important de la chaîne au Sahel, mais pas la chaîne elle-même. Les Français et leurs alliés ont une vision stratégique de 25 à 50 ans sur les pays du Sahel. Ils sont déjà convaincus que ces pays regorgent d’immenses ressources naturelles et minières indispensables pour la compétitivité de leurs industries et de leurs entreprises privées. Même avec la tête ensanglantée, ils ne lâcheront pas prise.
Le Mali sous le régime socialiste des années 1961, où le Président Modibo Kéita a chassé les militaires français comme des malpropres, est très diffèrent du Mali de 2021, embourbé dans un complot international avec des enjeux géostratégiques. En 1961, notre pays réunissait les moyens et les conditions de sa souveraineté, à savoir un dirigeant qui avait la vision et la volonté politique pour incarner les aspirations de son peuple. À cette époque, on avait un peuple politiquement organisé et uni au sein d’un parti politique en l’occurrence l’US-RDA (parti unique de fait). Malheureusement, aujourd’hui, les Maliens sont divisés entre plus de 250 partis politiques et plus de 10.000 associations ou autres syndicats dans un système de « mangercratie », où seule la recherche de l’argent prime sur l’honneur et le devoir.
Le Mali n’a pas besoin d’un bras de fer avec l’ex-puissance coloniale. La solution du problème actuel passe par le fait que les autorités de la transition aient d’abord l’intelligence, la volonté politique et l’habileté nécessaires pour parvenir à un accord gagnant-gagnant avec les autorités françaises qui préserve l’honneur, la dignité et les intérêts supérieurs de notre peuple. Notre pays n’a pas les moyens et il n’a d’ailleurs pas intérêt à rompre avec la France dans la conjoncture actuelle d’un Etat tombé plus bas que terre. Comment faire alors pour que notre coopération soit faite en fonction des exigences de notre développement ? Voilà la véritable question à laquelle nous devons réfléchir, certes, mais il faut que la France, alliée du Mali, se réjouisse de voir ce pays se doter d’un vecteur aérien digne de ce nom, lequel renforcera indubitablement ses capacités militaires. Si tel n’est pas le cas, et il en est malheureusement ainsi, c’est qu’il y a un problème. A mon humble avis, le Mali ne doit plus être le dindon d’une farce sordide. Et il est vraiment impératif que les gouvernants aient dans l’obligation morale de prendre le chemin qui permettra au pays de recouvrer sa souveraineté nationale.
Aliou Touré
Source: Le Démocrate Mali