Désormais ni l’inscription au budget 2025, ni la révision annuelle fortement médiatisée, bien que traditionnelle, de la liste électorale, ni la rencontre entre l’Autorité Indépendante de Gestion des élections AIGE, avec les acteurs politiques, encore moins la nomination du Général de division Abdoulaye Maiga comme premier ministre, qui a en même temps conservé le portefeuille de l’administration territoriale et de la décentralisation, ne sont des garanties pour l’organisation des élections de sitôt au Mali.
Pour rappel si la nomination d’un général comme premier ministre bien que controversée n’avait pas provoqué une levée de boucliers de la part des acteurs politiques c’est dans l’espoir de voir rapidement le Mali retrouver sa normalité constitutionnelle avec la tenue de l’élection présidentielle. Surtout que le Général Abdoulaye Maiga a conservé le poste de ministre de l’administration territoriale et de la décentralisation ce qui avait suscité un réel espoir quant à l’organisation de l’élection présidentielle censée mettre fin à la longue et difficile transition que traverse le Mali depuis plus de quatre ans. Sans nul doute la montagne est sur point d’accoucher d’une maigre souris après la tenue du tout premier conseil des ministres du nouveau gouvernement sous la présidence du Président de la transition le Général Assimi Goita, quand ce dernier en égrenant le chapelet des priorités dans la feuille de route relègue les élections à la dernière place. En français simple tant que les sept priorités ne seront pas satisfaites pas question d’aller aux élections. Le hic est que les sept premières priorités relèvent des missions d’un gouvernement légitime avec un mandat clairement donné par le peuple, donc une transition ne devrait avoir que trois missions essentielles : mener des réformes permettant de corriger tous les dysfonctionnements qui ont été à la base des différentes crises, réunir les conditions matérielles, sécuritaires, humaines avec l’implication de tous les acteurs sociopolitiques avec un large consensus autour des règles du jeu et enfin l’organisation d’élections transparentes, inclusives, crédibles dont les résultats ne souffriront d’aucune contestation possible. Toute autre mission relèverait d’un agenda politique et ambitieux inavoué. Tout porte à croire qu’il y a anguille sous roche.
En effet, la nomination controversée d’un autre Général à la tête du gouvernement en dit long sur les prétentions des militaires au pouvoir, car elle exclut de facto la composante civilo-politique de la gestion de la transition pour n’être qu’une transition militaire avec le général le plus gradé de l’armée malienne, en l’occurrence Assimi Goita, à la tête de l’Etat, un autre général à la tête du Conseil National de transition, CNT, à savoir Malick Diaw et on vient de nommer un troisième général comme premier ministre, ministre de l’administration territoriale et de la de la décentralisation. Nous assistons à la « GENERALISATION » du pouvoir au Mali. Tous les postes stratégiques de l’administration sont occupés par des militaires. Cette amère couleuvre allait être facilement avalable par l’opinion si et seulement si la tenue de la présidentielle figurait en bonne place des priorités du nouveau gouvernement. Il n’en est absolu rien. En se référant à la feuille de route du Président de la transition transmise au gouvernement, l’organisation de l’élection présidentielle pour un retour à l’ordre constitutionnel figure à la huitième et dernière place des missions assignées au nouveau gouvernement du Général Abdoulaye Maiga. Presqu’un mandat présidentiel dans une période exceptionnelle, avec son lot de confiscation des libertés, de misère, de perte d’emplois, de maladie et d’insécurité, n’émeut guère les autorités de la transition à prendre conscience du danger qui guette notre pays.
L’opinion, celle qui avait cru en la volonté, en la bonne foi des autorités à mettre un terme à la plus longue et pénible transition de toute l’histoire du Mali est très dubitative, voire désenchantée, car ne voyant pointer à l’horizon aucun espoir de sortie de crise. Les autorités savent-elles qu’une transition n’a ni pour vocation de durer encore moins de résoudre tous les problèmes auxquels le pays confronté ? La solution à la crise qui secoue le Mali passe inéluctablement par la tenue des élections afin de doter le pays d’institutions légitimes ayant le quitus du peuple. Les autorités sont désormais interpelées face à la gravité de la situation consécutive à la durée de la transition. Qu’elles soient convaincues que tant que le Mali ne sort pas de cette période exceptionnelle ; elles ne pourront pas compter sur des investisseurs et l’économie va forcément en pâtir.
Youssouf Sissoko
Source : L’Alternance