Je n’ai jamais été directeur de l’Hôpital du Point G, ni Mme SY Kadiatou Sow directrice de la Compagnie malienne de Développement du Textile (CMDT). Par contre j’ai été directeur d’Hôpital régional ! Comment ! Lisez plutôt la narration qui suit.
Par ces temps de délation permanente et de réécriture de l’Histoire, c’est nécessaire et même une obligation morale d’évoquer nos itinéraires professionnels.
Rentré au Mali le 11 mars 1976, après six ans d’exercice de la médecine dans les Hôpitaux français (Orsay, Soisson, Lagny, Compiègne et Mont- Didier), je suis affecté par note de service pour imprégnation et avec comme encadreurs, le Dr. Jubin à l’Iota, le médecin Colonel Louvet au service des maladies dermatologiques et vénériennes de l’Institut Marchoux aujourd’hui Canam, le Dr. Djigui Diabaté à la PMI Centrale, le Dr. Daouda Keita, alors Directeur national de la Santé, le Pr. Bocar Sidi Sall au service de traumatologie-orthopédie de l’Hôpital de Kati, qui à présent porte le nom de ce grand maître de l’Ecole de Médecine, de Pharmacie et d’Odontostomatologie, dont il était directeur adjoint à ses débuts aux côtés de Pr. Aliou Bah.
Après Bamako, refusant de me soumettre au tirage au sort, je choisis d’aller à l’Hôpital régional de Gao où je sers sous les ordres du Dr. Samba Sissoko dit Batch, y séjournant un (01) an, trois mois cinq jours.
Par décret je suis muté à l’Hôpital régional de Ségou comme médecin-chef où je n’assurerais jamais cette fonction. L’ainé Dr. Bakary Coulibaly à deux ans de la retraite a été affecté à Bamako « Comme complément d’effectifs ». Était-ce une sanction ? Ça y ressemble !
Toujours est-il que l’engagement pris de ne jamais aller me plaindre pour refus de passation de service a été respecté. C’était compréhensible qu’à deux ans de la retraite, après des années et des années de bons et loyaux services rendus aux citoyens, le grand frère Dr. Bakary fasse des démarches pour une sortie plus glorieuse. Je logeais chez ma tante Nafissatou Samba Niass-Diallo, veuve d’Ibrahima Souba Diallo petit frère de ma mère.
Bien installé par l’ainé le Dr. Bakary Coulibaly, j’ai pris en charge les services de médecine adultes comme enfants y compris les nourrissons.
Un vendredi le 12 juillet 1978, le Dr. Bakary Coulibaly m’informe quand je suis venu lui dire bonjour à 07 h 30 min comme d’habitude, que nous allons procéder à la passation de service matérielle, la passation financière se fera l’après-midi à 14 h 30 min. Le gestionnaire M. Koné fera la passation matérielle. Elle s’effectuera entre 07 h 30 et 13 heures. Le médecin chef m’autorisa à revenir à 15 heures pour la passation financière étant donné que la pause devait intervenir à 12 H 30 min.
A 15 heures, dès que je tape à la porte et que le médecin chef l’ouvre, il me présente un télégramme qui m’affecte à l’Hôpital régional de Sikasso comme médecin chef. Mon ainé me dit affectueusement : mon fils, nous faisons quoi maintenant !
Je souris et lui dit, mon père il faudra faire la passation avec le Dr. Ousmane Sow qui doit me remplacer selon le décret. Comme je vous l’avais dit quand vous m’aviez annoncé à mon arrivée le 28 avril 1978 que la passation de service attendra : j’ai répondu mon père, j’ai fait des études de médecine, mais pas des études de médecin chef. De surcroit je n’ai pas exercé cette fonction de médecin chef ! Et je ne m’en suis plaint nulle part comme promis, mon père !
A présent, trouvez un véhicule avec le Directeur régional de la santé et je rejoindrais Sikasso dès demain. Ce qui a été aisé à faire pour le Dr. Coulibaly, le directeur régional étant un ainé que j’ai connu déjà étudiant, le bien aimé Dr. Fomba Nianankoro.
Arrivé à Sikasso le 13 juillet 1978 au moment de la retraite au flambeau organisée par le président Kamissoko des Anciens combattants et blessé de guerre 1939-1945 amputé d’un de ses membres supérieurs. Hommage à lui et Paix à son âme !
J’ai le bonheur de trouver mon cadet et camarade Aly Egoudou Boly comme adjoint administratif à qui je confie bien volontiers la gestion des affaires administratives et financières. Un comité de gestion présidé par le médecin chef et le directeur administratif et financier est installé, comprenant les autres médecins de l’Hôpital, tous les majors des différents services, le surveillant général de l’Hôpital François Xavier Samaké, et le Secrétaire général du Comité syndical de l’Hôpital grand père Garang Konaré. Car grand père du directeur régional de la Santé Dr. Sidi Adama Konaré.
Le Comité de gestion a rendu compte régulièrement de l’utilisation des fonds qui lui sont alloués dans un rapport mensuel durant tout le séjour à Sikasso.
Une semaine après la prise de service, j’ai droit à la visite de l’Inspecteur en chef des services de santé du Mali le Dr. Karim Sangaré.
- Qu’y a-t-il tonton pour venir à l’Hôpital de Sikasso une semaine seulement après l’installation du médecin chef ?
- Mon fils, je venais seulement pour savoir comment tu es installé !
- Je suis bien installé et bien entouré par une belle équipe.
La semaine suivante, l’Inspecteur en chef, le Dr. Karim Sangaré est de nouveau à Sikasso à l’Hôpital régional.
- Tonton (Il est le père du Dr. Diagne Amy Noëlle Sangaré une grande amie), il y a anguille sous roche. Dites-moi la vérité. Qu’est-ce qui fait venir deux fois en si peu de temps, l’Inspecteur en chef des services de santé du Mali ?
- Mon fils, des lettres anonymes de dénonciations des mauvaises pratiques du personnel de l’Hôpital de Sikasso nous parviennent régulièrement au ministère. Le personnel surtout du Bloc opératoire se livre à des interventions chirurgicales, presque toutes les nuits à telle enseigne que le lendemain, il reste peu de matériel stérile pour les malades peu nantis dont la liste s’allonge au fil du temps, sans être opérés.
L’inspecteur Sangaré recommande les services de l’infirmier Siaka ‘‘ Rouge’’, un indicateur du Commissariat de Police.
- Tonton, l’engagement est pris de nettoyer les écuries d’Augias, sans recourir à Siaka. C’est promis !
Je décide de dormir dans le bureau du médecin chef que j’intègre désormais à des heures indues pour les infirmiers de garde dont certains, les chirurgicaux, étaient déjà à l’œuvre illicite.
Je décide que tous les infirmiers des autres pavillons soient recyclés au Bloc opératoire ; qu’il n’y a aucune raison que toutes et tous ayant le même cursus de formation (Les écoles du 1er et 2ème cycle des Infirmiers) ne puissent pas être des aides opératoires ; que les techniciens du bloc instaurent la magouille comme mode de fonctionnement et prennent en otage l’Hôpital Régional de Sikasso ce n’est pas normal !
Trois mois après, sous la supervision du chirurgien chef Fousseyni NDaou (Paix à son âme) et du major du Bloc opératoire et surveillant général de l’Hôpital François Xavier Samaké, toutes les infirmières et tous les infirmiers sont devenus de bons aides opératoires et peuvent assurer des pansements des opérés. Elles et ils sont en mesure de remplacer l’équipe des infirmiers du Bloc opératoire.
Depuis la deuxième visite de l’inspecteur en chef des services de santé, une équipe de surveillance interne et externe de l’Hôpital est mise en place, et elle aussi en trois mois a atteint l’objectif visé : suivre les opérés nocturnes jusqu’au domicile de leurs logeurs, que ceux-ci soient de Sikasso ville ou de la périphérie.
Un matin, le médecin chef qui chaque jour demandait au surveillant général, si tout c’est bien passé la nuit, reçoit la même réponse que d’habitude : Dr. N’avez-vous pas lu les rapports des infirmiers de garde ?
- Si ! monsieur le surveillant général : RAS (rien à signaler) écrivent-il tous en cœur ! Habillez-vous François et habillez Chaka rouge ; donnez-lui un plateau de soins post-opératoires ! Rendez-vous à Wayerma, au domicile de monsieur Karagnara. Dites que c’est vous qui êtes chargé aujourd’hui de faire les soins de monsieur Sidibé. Dès qu’on vous montrera l’opéré, embarquez-le dans l’ambulance et mettez-le au Bloc opératoire, dans la salle des soins infirmiers. Prévenez-moi dès votre retour !
- Au bout d’une demi-heure, ou une heure, le surveillant général et Chaka sont de retour. Le surveillant général me dit, docteur, « l’oiseau est dans la cage »!
- François, allons voir l’oiseau.
Je tente en vain de faire dire par monsieur Sidibé le nom de celui qui l’a opéré. Le surveillant général François Xavier Samaké réunit tout le personnel du Bloc opératoire dans le couloir à ma demande. J’invite chacun d’entre eux, un à un à aller voir le patient opéré dans la salle des soins infirmier en ma présence. Monsieur Sidibé refuse de reconnaître parmi eux celui qui l’a opéré. Une bonne leçon de sociologie malienne ! C’est l’échec de la tentative de rompre le pacte entre les privilégiés opérés rapidement parce que nantis et le réseau mafieux de la santé : Impossible de briser l’omerta conclue entre eux !
Il reste à faire parler les infirmiers eux-mêmes.
- Qui parmi vous a opéré monsieur Sidibé de sa hernie in-guino sernotale ? Silence de mort malgré la répétition trois fois de la question : qui a opéré monsieur Sidibé ?
- Ecoutez mes chers collaborateurs ! J’ai pu savoir que vous l’avez opéré dans la nuit du 7 au 8 août 1978 ; j’ai pu savoir que le malade opéré a quitté l’Hôpital à minuit quarante-cinq (00 h 45 min).
J’ai pu savoir que vous l’avez ramené chez Karagnara à Wayerma. Vous vous doutez bien que je sais qui l’a opéré et avec quels aides opératoires. Je suis en train de chercher à vous offrir l’occasion d’avoir des circonstances atténuantes au nom de l’adage qui dit : « Une faute avouée est à moitié pardonnée ».
Encore une dernière fois, qui a opéré monsieur Sidibé ?
Enfin, le chef du réseau se décide : c’est moi qui ai opéré monsieur Sidibé !
Le surveillant général est chargé de soumettre une convocation d’une réunion extraordinaire du Comité de gestion de l’Hôpital au directeur administratif Aly Egoudou Boly. Le jour de la réunion, le surveillant général entre dans le bureau du médecin chef et d’entrée de jeu proclame : « J’entre dans ce bureau aujourd’hui la tête basse ; j’affirme être sincère chaque fois que répondant aux différents questionnements du médecin chef qu’il n’y avait rien à signaler ; j’ignorais tout ce qui se passait la nuit dans cet hôpital, n’y habitant pas et étant logé très loin des lieux ! ».
S’adressant à ses collaborateurs, il s’exclame : que dieu ne couvre pas dans l’au-delà, celui ou celle qui parmi vous me couvre aujourd’hui !…
Ils sont tous invités à s’assoir et la séance est ouverte.
La parole est donnée en premier lieu au responsable du Bloc opératoire après François.
Docteur Diallo, les faits qui nous sont reprochés sont irréfutables. Nous attendons les décisions du Comité de gestion. C’est exact, le surveillant général est en dehors de ce que nous faisions !
La parole est donnée au Secrétaire général du Comité syndical : grand-père, que dis-tu ?
- Directeur, médecin chef, nos collègues du Bloc opératoire sont entre vos mains, c’est à vous de décider.
Le médecin chef regarde le directeur administratif et financier Aly Egoudou Boly un long moment. Celui-ci reste silencieux.
- Grand père, proposes-nous une attitude, une sanction.
- Médecin chef, je vous demande de proposer au directeur national de la santé d’affecter les collègues fautifs « au Nord ».
- Pourquoi pensez-vous que servir à Gao, Tombouctou pour un fonctionnaire malien est une sanction ? Grand père, je viens de Gao après une escale de trois mois à Ségou, sans jamais avoir demandé à quitter Gao, où j’étais passionnément au service de la population et des malades, avec le même dévouement qu’ici.
- Grand père : I. Konaré ! Je vais sortir tout ce personnel actuel du Bloc opératoire. Il sera remplacé par une nouvelle équipe dès demain. Une note de service sera prise à cet effet.
Qu’aucun élément de l’ancienne équipe ne soit encore aperçu en train de rôder au tour du Bloc opératoire, surtout à partir de 21 heures. Chers collègues et collaborateurs du Comité de gestion, qu’en pensez-vous ?
A l’unanimité, la décision a été jugée clémente, d’autant que même un blâme inscrit au dossier n’a pas été évoqué.
En dépit de cette clémence, le chef du réseau profitant d’alliance avec le Général Amadou Baba Diarra n° 2 du Comité militaire de Libération nationale (CMLN), a remué ciel et terre pour remettre en cause la décision. Le ministre de la Santé Colonel Missa Koné, armé du rapport du Comité de gestion ayant abouti à la décision, a défendu fermement ladite décision. Le chef du réseau était réputé être un grand féticheur et menaçait de liquider le médecin chef si jamais il ne rétablissait pas son équipe au Bloc opératoire. Un grand chirurgien du reste un grand ami Dr. Bakary Camara, me téléphone de Tombouctou où il était en service, pour me conseiller de céder sinon, par la magie noire ils vont te tuer pour rien ! Ecoutes-moi, Ali, je suis de Sikasso je connais mes parents ! Pire le chef du réseau, va voir ma femme, qui allaitait notre première fille pour convaincre celle-ci qu’elle sera veuve si jamais, elle ne me persuade de remettre son équipe au Bloc opératoire.
Ma femme vient en larmes à l’Hôpital où elle savait que j’étais hospitalisé pour une grippe intestinale avec déshydratation sévère suite à une diarrhée et à des vomissements. J’étais pris en charge par l’équipe chinoise.
Au grand bamanan qui affirmait avoir fait un coup de semonce, j’envoyais Aïssata Bal lui dire qu’il soit le dernier des féticheurs Diarra, si je passais la nuit, vivant. Bien-sûr elle est rentrée convaincue qu’elle sera veuve. « Les écuries d’Augias ont été bel et bien nettoyées ! » Et pour un bon moment. Le Dr. Mahamadou Balla Cissé et Mme Coulibaly Aminata Samaké Diabaté, le Dr. Sountoura, sa femme Djénéba Koné et bien d’autres s’en souviennent sûrement ! Les raisons des mutations successives, trois postes en si peu de temps, me seront clarifiées par le Ministre de la Santé Colonel Missa Koné lui-même.
Les 3, 4 et 5 novembre 1978, le Ministre de la Santé et des Affaires sociales Missa Koné convoque le 2ème Séminaire de la Santé de l’histoire du Mali. Celui-là qui va décider de la privatisation du secteur de la santé à la quasi-unanimité contre l’avis de seulement trois médecins, le Dr. Adama Doumbia chirurgien orthopédiste et traumatologue, élève du Pr. Bocar Sidi Sall, Dr. Mohamed Chérif Cissé, urologue et Dr. Ali Nouhoum Diallo généraliste.
Dès que j’ai demandé la parole en déclinant mon identité, le Ministre Colonel Missa Koné s’est levé, est venu me sortir de la salle : M’burankè, m’burankè, je vous présente mes excuses. A peine arrivé à Ségou où on vous a affecté sans vous avoir rien demandé, j’ai dû vous envoyer à Sikasso, sans non plus avoir demandé votre avis.
J’y ai été contraint. Un matin mon téléphone sonne :
- Ntoma ! Je suis à la verticale !
- Repos ! Ntoma, il faut nommer le Dr. Ousmane Sow, médecin chef de l’Hôpital de Ségou !
- Ntoma, le Dr. Ousmane Sow a été relevé de sa fonction de médecin chef de l’AMA (Assistance Médicale Africaine) pour insuffisance, pour ne pas dire plus.
- Ntoma, je dis de le nommer médecin chef de l’Hôpital régional de Ségou et c’est un ordre !
- Et le Dr. Ali Nouhoum Diallo qui y a été nommé, sans jamais avoir pris fonction, qu’est-ce que j’en fais ?
- Ntoma, de son sort, c’est à toi d’en décider !
- Ntoma, je suis à la verticale !
Mburankè, je n’ai pas mis beaucoup de temps à réfléchir. Je vous ai affecté à Ségou sur la base de la réputation que vous vous êtes faite à Gao. Je suis sûr qu’avec cette réputation, vous pourriez remettre de l’ordre dans l’Hôpital de Ségou.
Je savais qu’il fallait assainir l’Hôpital de Sikasso sur la foi de toutes les lettres anonymes qui nous parvenaient au Ministère. Sikasso c’est chez moi, on ne veut pas de toi à Ségou, eh bien, tu iras à Sikasso. Encore une fois, mburankè, toutes mes excuses ! J’espère que vous savez que je suis le cousin de Tiékoura Koné, le mari de votre petite sœur Aïssa Diallo ? A présent, allons en salle.
Inutile de vous dire que tous mes confrères retenaient leur souffle avant de nous voir réapparaitre le Ministre Koné et moi-même.
Pour comprendre la conversation téléphonique entre le chef de l’Etat, président du CMLN Moussa Traoré et le ministre Missa Koné, il suffit de savoir que le Dr. Ousmane Sow était l’époux de Rokiatou Sow, Présidente de l’Union nationale des Femmes du Mali (UNFM) et membre de droit du futur Bureau exécutif central de l’Union démocratique du Peuple malien (UDPM).
C’est pour éviter la nomination au poste d’adjoint du Dr. Abdoulaye Diallo, directeur national de la santé, le Gana réputé intègre et patriote, puis d’éventuel chef ou directeur de cabinet du ministre de la Santé et des Affaires sociales, le Dr. N’Golo Traoré que j’ai saisi l’opportunité d’être adjoint, ensuite assistant du Pr. Bernard Duflo par voie de concours.
A la même période les Dr. Abdoulaye Soumaré, Mamadou Marouf Keita étaient respectivement assistants des Pr. Mamadou Lamine Traoré (Chirurgien) et Mohamed Touré (Pédiatre).
Le grand frère Mamadou Dembélé allias Pédro, ancien Premier ministre avait, lui, choisi comme adjoint le Dr. Filifing Sissoko.
C’est la fuite de l’administration de la santé, être directeur d’hôpital national ou directeur de cabinet d’un ministre qui m’a conduit à l’agrégation en médecine Interne (Maître de Conférences agrégé).
Attention manika, ma génération est de cette race d’Hommes !
Comment Monsieur Youssouf Sory Kéita, éducateur à la retraite, même ancien militant de l’UDPM, puis de sa mue le Mouvement patriotique pour le Renouveau (MPR), peut-il insinuer que les nominations à des postes sous le général Moussa Traoré, n’obéissaient nullement à des considérations politiques ?
Tous les cadres occupant des postes de direction qui ont pris la parole avec un esprit critique à la Conférence organisée par l’UDPM avec comme thème : « La démocratie au sein du parti » ont été relevés, chassés de leurs logements de service, dans les jours qui ont suivi la conférence présidée par le camarade Djibril Diallo, Secrétaire politique de l’UDPM à l’époque : Kadari Bamba directeur des Industries, Mme SY Kadiatou Sow chargée des ressources humaines à la CMDT.
La signature de la lettre ouverte du 7 août 1990 adressée au Président Moussa Traoré offre au gouvernement l’occasion de se débarrasser de toutes celles et de tous ceux qu’il soupçonnait depuis longtemps de n’être pas des siens : Mamadou Ba, Richard Toe, Soumaïla Cissé (Paix à son âme) sont ainsi relevés de leurs postes de responsabilité à la CMDT. Il en a été ainsi à l’INRSP des Pr. Siné Bayo ; Yéya Issa Maïga et bien d’autres.
Tous les dirigeants des CLDR sont interdits de faire la politique pendant dix ans dans une disposition transitoire de la Constitution de 1974 du CMLN.
Les vagues d’arrestations dans les années 69, 70, 74 de civils et militaires en 1978, y compris des militaires membres du CMLN comme les Capitaines Yéro Diakité, Premier ministre du gouvernement provisoire, et Malick Diallo, le Sergent-chef Siméon Sidibé qui rejoindront au ‘‘ bagne mouroir de Taoudéni’’ l’auteur de cet ouvrage le Sergent-chef Samba Sangaré et de celui de ‘‘ Sur le chemin de l’honneur’’ l’Adjudant-chef Guédiouma Samaké, Pullo Ouéléssébougou, bambarankè Kunari !
L’auteur du décret créant ‘‘ le bagne mouroir de Taoudéni’’ y sera rejoint par les présumés comploteurs du 28 février 1978. Les Capitaines Diby Sillas Diarra, Bakary Camara, Mamadou Sogodogo, le Lieutenant Jean Bolon Samaké, le Sergent Boubacar Traoré pour ne citer que ceux-là, arrêtés en avril 1969 y avaient déjà été assassinés sur ordre du Comité militaire du 19 novembre 1968 ou de ceux parmi ses membres qui avaient le pouvoir de décision.
Ne sont pas mentionnés ici, ceux du groupe de Diby Sillas comme les camarades militaires Abdoulaye Frédéric Traoré, Pafouné Dakouo, Kountou Sangaré, et Sergent-chef Check Coulibaly et bien d’autres qui eux ont purgé leur peine de condamnés aux travaux forcés pendant cinq ans à Kidal.
Les parents de l’Adjudant-chef de l’Artillerie Mamadou Lamine né en 1934, fils de Fily Dabo Sissoko, arrêté à Kati le 20 avril 1976 à 11 heures et fusillé à Taoudénit le 6 octobre 1982 ne feront sûrement pas des bénédictions à l’auteur d’un article qui insinue que, somme toute, le régime du Général Moussa Traoré n’était pas si féroce qu’on l’a dit ou écrit.
Ne lui souhaiteront pas non plus d’être accueilli dans les jardins fleuris du Clément, du Tout miséricordieux, du Pardonneur, les veuves et les orphelins des militaires arrêtés par vagues successives en 1969, en 1976 en 1978, ‘‘ transférés pour beaucoup définitivement’’ qui, au ‘‘bagne mouroir’’ de Taoudéni, qui à Kidal, qui dans d’autres prisons du Mali. Les Colonels Kissima Doukara grand militaire devant l’Eternel, Tiékoro Bagayoko et son complice Youssouf Balla Sylla alias Zapata dorment pour toujours dans les sables chauds de la région de Taoudenit !
Les syndicalistes battus jusqu’au sang, rasés avec des tessons de bouteille dans les années 1970 et/ou leurs enfants applaudiront-ils un article expert en négation de faits historiques ?
Sory Youssouf Keita, tu es un enseignant ; tu es un éducateur !
Sais-tu que ce sont les Hommes qui font l’Histoire. Ils ne choisissent pas toujours les conditions dans lesquelles ils font l’Histoire. Ils la font aussi avec leur subjectivité !
Crois-tu que les prisonniers de Yélimané, de Nioro du Sahel, de Doïla, de Niono, de Kolondiéba, de Ménaka, d’Ansongo et d’Inakouder, de Boureissa, d’Aguelhok, de Tessalit, une fois libres se sont contentés de dormir et de laisser les putschistes du 19 novembre 1968 opérer tranquillement ? Bien-sûr que non !…
Libérés, ils ont après un repos et des jours de réparation bien mérités, rejoint leurs militants toujours dans le combat contre la dictature et pour faire bouger les lignes.
Nul doute qu’avec les luttes acharnées des démocrates et des républicains les lignes ont bougé.
Nul doute aussi que finira cette longue nuit entamée en ce jour sinistre pour tous les Hommes lucides, le 19 novembre 1968. L’aube poindra sûrement !
Les Assemblées générales du « Parti unique et constitutionnel » dans les Communes animées seulement par le courageux Colonel Youssouf Traoré (Paix à son âme), les rencontres des forces vives de la Nation présidées par le Président de la République et Secrétaire général de l’UDPM que les combattants de la liberté ont baptisé, Union démagogique des Pistolets et des Mitraillettes et que les peuls par dérision ont appelée, Yidi Pènè (Ceux qui aiment le mensonge) !
La Conférence des cadres consacrée à la lutte contre la corruption sous la haute présidence du Général d’armée le Président de la République Moussa Traoré, avec les propos du Dr. Birama Diakité qui ont ébranlé les participants répondant tous dans la cohue à une question de Moussa Traoré : Non Mr. le Président ! Non monsieur le Président ! Cette question n’est pas à l’ordre du jour ! Les grandes rencontres avec les forces vives de la Nation dont celle tenue dans la salle plénière de l’Assemblée nationale, avec les célèbres discours des camarades Soumeylou Boubèye Maïga, et d’Aly Niane du Syndicat national de l’Education et de la Culture (Snec) entre autres, la rédaction de la Charte d’orientation nationale et de conduite de la vie publique, voire celle des textes fondamentaux de l’UDPM, sont le fruit de réflexions des anciens membres des CLDR, des clandestins de l’US-RDA, et/ou du Parti Malien du Travail (PMT).
Keita Mandé mansa, ressens-tu vraiment la société en marche et pressens-tu quelles sont les forces motrices du mouvement ?
Mandé mansa, Youssouf Sory Keita, t’es-tu seulement demandé pourquoi dans les assises de la Conférence nationale souveraine du Mali tenue du 29 juillet au 12 août 1991 des voix s’élevaient pour dire : il faut prolonger la Transition que dirigeait le Lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré de deux ans, de cinq ans même ! Sinon, le parti Adema-Parti africain pour la Solidarité et la Justice (Adema-PASJ) prendra le pouvoir et il va tous les libérer !
Tous, entendez les dirigeants du régime du Général Moussa Traoré dont ils étaient des collabos ! Ne pratiquaient-ils pas « l’entrisme » ?
Youssouf, vous avez énuméré beaucoup d’éminents cadres dont l’intégrité est établie ayant assumé des postes de responsabilité, grâce à « l’ouverture démocratique » du régime UDPM ! Les succès dont vous faites état dans « Le Mali sous Moussa Traoré » dans l’Agriculture, dans l’Elevage, dans l’Ecole, la Santé sont les succès de ces cadres, que vous avez eu l’intelligence de déceler et qui ont eu l’autorisation de servir la Patrie avec expertise et dévouement !
Mandé mansa, les Nouvelles sociétés font leur nidation pendant longtemps dans les flancs des anciennes sociétés avant de les remplacer, nous apprennent les philosophes matérialistes historiques ! Les Hommes nouveaux ne sont pas haineux ! Ils sont sereins ! Ils sont innocents ! Ils sont ingénus quel que soit leur âge ! Ils sont resplendissants de lumière !
Les Hommes nouveaux travaillent au bonheur des Humains dans une nature verdoyante ! Une nature bien entretenue ! Une nature au sourire immense !
Mandé mansa, évitez de diviser le peuple malien au moment où vous êtes en charge de l’administration du pays et souhaitez une Union sacrée autour du Gouvernement ! Sortez de l’esprit de vengeance et du souci permanent de réhabiliter le Général Moussa Traoré. C’est l’Histoire qui l’acquittera, s’il doit être un jour acquitté.
Seul le Peuple malien pourrait lui pardonner, lui qui n’a jamais accepté de demander pardon à ce peuple !!!
Mandé mansa Youssouf Sory Keita sortez des querelles de personnes et des combats d’Egos ! Engagez-vous dans des débats d’idées pour refonder la Nation et l’Etat. Une Nation Une, certes ! Indivisible certes ! Mais une nation Plurielle sur les plans linguistique, culturel, confessionnel, politique et syndical.
C’est la condition pour vous, d’apporter une aide efficace à Monsieur le Premier ministre Chef du gouvernement Dr. Choguel Kokala Maïga !!!
Bamako le 6 janvier 2022.
Dr. Ali Nouhoum Diallo
Maître de Conférence agrégé de
Médecine Interne,
Fonctionnaire à la retraite.
Téléphone : 66-78-63-30
Hamdallaye ACI 2000.
Source : Mali Tribune