Le président de la République avait d’abord dans des interviews à des médias étrangers balayé d’un revers de la main l’éventualité d’une négociation avec les jihadistes maliens Iyad Ag Ghaly et Amadou Kouffa. IBK déclarait ceci en juin-juillet 2019 : « Une mare de sang nous sépare de ces gens. Je suis disposé à reconstruire le Mali avec tous ses enfants, y compris avec ceux qui apporteront la preuve d’une repentance sincère. Mais attention : cela n’a rien à voir avec l’impunité, et les criminels devront répondre de leurs actes », a indiqué IBK à nos confrères de Jeune Afrique à propos de la question de pourparlers avec les criminels précités.
Entretemps, le chef de l’Etat, compte tenu certainement du niveau élevé des violences intercommunautaires et des attaques terroristes dans le centre du pays, n’écartera plus la possibilité de parler avec Amadou Koufa.
Dans sa première grande interview accordée à un media après sa réélection en 2018, le président IBK est revenu sur les sujets brulants du moment, en particulier la situation sécuritaire du pays : le terrorisme, les violences intercommunautaires, les questions sociales, le dialogue politique… Le locataire du palais de Koulouba s’est alors montre plus prêt que jamais à accepter tout compromis, qui ne « favorise pas l’impunité », pour sauver le Mali. Sur le caractère communautaire de la crise du centre, il répond sèchement : « Il n’y a pas de tribut au Mali, mais des ethnies qui, en particulier dans le centre, cohabitent depuis des siècles de façon apaisée avec des codes établis de règlement de conflits… Les violences et les clivages auxquels nous assistons sont une excroissance, une contagion de ce qui s’est passé dans le nord au cours de la dernière décennie ». Il analyse : « Dans le cadre de leur projet expansionniste et hégémonique, les terroristes djihadistes ont mis à profit les failles et les faiblesses du maillage administratif pour s’insinuer et propager un discours exclusif de haine, le tout sous couvert de la religion. Si l’Etat n’est pas présent dans chaque village, les mosquées, elles, sont partout ».
Malgré tout, IBK, dans son ambition de remettre le pays sur les rails, n’exclut pas un dialogue avec le terroriste Amadou Kouffa, mais pas avec Iyad Ag Ghali. Il estime qu’il n’y a aucune base qui laisse entrevoir la possibilité d’une négociation avec ce dernier qui, rappelle-t-il, « exige l’application de la charia, l’interdiction de l’école républicaine et moderne, le califat, la fin de toutes les valeurs qui fondent notre vivre-ensemble. Nous n’avons rien à nous dire ».
Lors de sa toute-première conférence de presse, le jeudi dernier, le Haut Représentant du chef de l’Etat pour le centre du Mali, Pr Dioncounda Traoré a indiqué que son équipe est prête à engager le dialogue non seulement avec Hamadou Kouffa, Iyad A Ghali, mais aussi avec tous les autres chefs terroristes pour éviter de nouvelles effusions de sang au centre. « Il ne faut jamais écarter le dialogue. Si on parle on peut se comprendre à condition qu’ils soient prêts à discuter avec nous. Nous sommes prêts à dialoguer avec Kouffa et les autres pour économiser les pertes en vies humaines », a-t-il souligné..
Il faut signaler que l’organisation non gouvernementale International Crisis Group avait dans un rapport publié en mai 2019 recommandé au pouvoir malien de « mandater des chefs religieux » pour entrer en discussions avec les chefs jihadistes qui semaient la terreur et des violences communautaires notamment dans le centre du pays.
En outre, la recommandation de négocier avec les jihadistes maliens est un souhait récurrent exprimé de façon insistante par Tiébilé Dramé, ancien opposant au régime d’IBK et actuel ministre des Affaires étrangères et l’imam Mahmoud Dicko, ancien président du Haut Conseil Islamique du Mali. Cette recommandation est aussi actée par les conclusions de la Conférence d’entente nationale tenue à Bamako du 27 mars au 2 avril 2017.
Bruno D SEGBEDJI
Source : Mali Horizon