Alors que nous nous disposons à célébrer notre pays pour la soixante-troisième fois, nous devons prendre conscience de la chance que nous avons de jouir d’un si riche héritage légué par nos ancêtres et pères fondateurs, qui doit normalement nous permettre d’envisager l’avenir avec confiance et enthousiasme. Sauf que, en plus de la crise économique, notre nation endeuillée continue à pleurer ses morts à cause de tensions négatives et inutiles qui sont entrain de contribuer à prolonger, envenimer et exacerber les conflits au nord et au centre de notre pays, mais encore, l’accord de paix n’a sûrement pas atteint ses objectifs, qui étaient d’apporter la paix et la sécurité à nos populations et de préparer la voie à une solution politique juste, pacifique et durable aux conflits.
Nous nous joignons à la nation pour adresser nos plus sincères condoléances et exprimer notre compassion et notre solidarité profonde aux familles des victimes. Nous rendons aussi hommage aux braves et héros tombés sur le champ de bataille qui méritent à jamais notre reconnaissance et notre respect relatif à l’ultime sacrifice qu’ils ont accompli pour notre nation.
Peu de périodes dans l’histoire de notre nation ont été plus difficiles que celle dans laquelle nous nous trouvons actuellement. Le Mali doit traiter les causes profondes des problèmes auxquels il est confronté. Nous avons besoin d’avoir plus que des conversations simples. Nous avons maintenant besoin d’aider à clore ce chapitre aberrant de notre histoire, et surtout d’aider à donner un nouveau départ. Les priorités immédiates sont de faire face au terrorisme ‘‘djihadiste’’, de conclure la paix et de s’attaquer à l’inflation. L’histoire nous a appris que les conflits nuisent au développement et à la prospérité. Le coût élevé des conflits armés a paralysé nos activités économiques et freiné l’élan en faveur de la consolidation de notre nation.
Il est temps de prendre les décisions éclairées essentielles à la réussite de nos démarches pour un Mali stable et surtout de montrer la volonté politique nécessaire qui nous permettra de consolider notre nation. A cet effet, nous devons rassembler toutes nos forces pour faire les meilleurs choix. Nous ne devons pas nous tromper d’adversaire et nous ne devons pas non plus nous tromper dans le choix de nos engagements. La souffrance de notre insatisfaction doit nous permettre de retrouver le chemin de la solidarité et de l’unité. L’unité doit être au cœur de nos engagements, car l’union de nos actions doit être autour du Mali. Le Mali doit être notre cause et notre source, et tout doit converger vers sa consolidation.
Nous devons nous mobiliser plus que jamais pour sauver nos acquis afin d’éviter à tout prix que cette crise ne tourne davantage au désastre économique et social. Toutes les parties aux conflits qui ravagent notre pays doivent s’unir et recommencer la quête de la paix avant que les 1
puissances obscures de la destruction ne nous engloutissent tous. Ces parties doivent reprendre les pourparlers en faisant preuve de souplesse, dans un esprit constructif, afin que puisse être dégagée une solution pragmatique qui conduise à rendre l’accord viable et crédible pour une paix durable et garantisse la sécurité des populations sur toute l’étendue du territoire national. Nous devons tous nous rappeler que, malgré nos différents, nous avons bien plus de choses en commun en tant que nation. Depuis toujours, nous sommes liés par des valeurs qui définissent qui nous sommes en tant que Maliens, et qui nous servent de boussole à travers tous les types de changement, y compris les questions de guerre et de paix. Le moment est venu pour nous tous de nous rassembler et d’unir nos forces dans la lutte pour cette paix. Il n’y a pas de progrès sans compromis et pas de victoire sans sacrifice.
Les crises que nous vivons sont aussi le fruit de l’infidélité à l’esprit de nos ancêtres et pères fondateurs où l’imposition du libéralisme idéologique vide de contenu, vide de sens et d’identité au détriment de nos valeurs a quasiment détruit nos tissus sociaux. L’inaptitude du système a abruti les nouvelles générations et nous a absolument dévié des voies à suivre pour un avenir prospère. Les acteurs et les enjeux de ces perversions multiformes doivent sans doute être écartés de nos voies pour la renaissance de l’idéal Africain. Or cette renaissance, développée avec une vraie vision collective, est guidée par les politiques de sécurité nationale avec un contenu économique solide, durable et solidaire, et un programme financier viable et efficace, le tout reposant sur nos valeurs et notre identité.
La célébration de notre indépendance doit être le symbole de notre responsabilité, notre liberté et surtout notre prospérité dans la paix. Depuis plus de six décennies le peuple malien mène un combat pour la justice, la réduction de la fracture sociale, et le développement humain. Ce combat n’est autre que pour honorer la promesse qui a toujours été au cœur de notre vie sociale et culturelle, la promesse que nous avons reçue de nos aînés, qui veut que chaque génération vive mieux que la précédente. Nous devons nous acquitter de cet engagement envers nos jeunes populations, qui doivent être mieux nantis que nous afin que notre Nation avance vers des lendemains meilleurs. Les décisions que nous prenons maintenant définiront le type de nation et ce que nous laisserons à nos enfants. Nous ne pouvons plus continuer à voguer au gré des crises. Il est absolument temps d’unir le destin de l’ensemble des citoyens à celui de la nation. Œuvrons donc ensemble pourévoquerles problèmes liés à cette période transitoire de la vie de notre pays et apporter les solutions viables afin de démontrer à nous-mêmes et au reste du monde que notre nation est unie dans sa lutte pour la liberté, la paix et le développement durable. Agissons ensemble pour que cette période soucieuse mène à des lendemains plus sereins et que ce nouveau cycle de la vie de notre nation soit rempli d’espoir positif pour nous tous. Évidemment, l’espoir concerne toujours l’avenir. Alors, engageons-nous ensemble pour construire un projet
de redressement national afin de recréer l’espoir dont les plus fortes sources sont liées aux valeurs, mais aussi et surtout, changer le cours de la vie de notre nation.
Que Dieu bénisse notre nation dans une Afrique unie et en paix.
Cheick Boucadry Traore