Les détracteurs du projet porté par la junte le décrivent comme taillé sur mesure pour un maintien des colonels au pouvoir au-delà de la présidentielle prévue en février 2024. La participation n’a atteint que 39,40 %.
Les résultats du vote ayant eu lieu dimanche viennent de tomber : les Maliens ont approuvé à 97 % des voix le projet de nouvelle Constitution soumis au référendum par la junte au pouvoir depuis 2020, a fait savoir vendredi 23 juin, à Bamako, l’autorité électorale, selon des résultats officiels provisoires.
Alors que les militaires ont fait de ce projet un enjeu essentiel de la refondation qu’ils entendent conduire du Mali, confronté à la propagation jihadiste et à une crise multiforme, le taux de participation a seulement atteint 39,40 %.
La participation est traditionnellement faible au Mali mais le scrutin de dimanche a également été entravé par de nombreux incidents et irrégularités dans le Centre et le Nord du pays, selon des observateurs et opposants à la réforme constitutionnelle. Ces entraves se sont déroulées soit sur fond de peur d’attaques jihadistes, soit de désaccords politiques.
Renforcement des pouvoirs du président
Il s’agissait du premier scrutin depuis que les militaires ont pris le pouvoir par la force en août 2020 et qu’ils exercent depuis, quasiment sans partage.
Les détracteurs du projet porté par la junte le décrivent comme taillé sur mesure pour un maintien des colonels au pouvoir au-delà de la présidentielle prévue en février 2024, malgré leur engagement initial à rétrocéder la place aux civils après les élections.
Cette réforme de la Constitution renforce de fait les pouvoirs du président et fait aussi la part belle aux forces armées. Elle met aussi en exergue la « souveraineté » du pays, mantra de la junte depuis son avènement à la tête de l’Etat malien et depuis la rupture diplomatique opérée avec l’ancienne puissance dominante française et le pivotement vers la Russie.
Le vote a d’ailleurs eu lieu moins de quarante-huit heures après le congé fracassant donné par Bamako à la mission de l’ONU après dix ans de présence. La junte et son chef, le réputé populaire colonel Goïta, estiment que la mission a failli et que le Mali peut assumer sa sécurité par ses « propres moyens ».
Le projet de Constitution a en tout cas cristallisé une opposition hétérogène, qui a réussi à se faire entendre. Les groupes armés du Nord qui ont combattu l’Etat central avant de signer avec lui un fragile accord de paix en 2015, et qui exercent un large contrôle dans le Nord, ont empêché la tenue du vote sur un texte dans lequel ils disent ne pas retrouver l’accord de 2015. Ils ont dénoncé des bourrages d’urnes dans les localités du Nord où le vote a eu lieu.
D’influentes organisations religieuses se sont liguées contre le maintien du principe de laïcité de l’Etat dans la Constitution.
L’une des figures de cette mobilisation, l’imam Mahmoud Dicko, s’est d’ailleurs livré, lors d’un meeting pour le « non », à une violente diatribe contre le texte et la junte. D’abord soutien de la junte avant d’en devenir un ardent détracteur, il s’est vu confisquer son passeport jeudi à l’aéroport de Bamako alors qu’il rentrait de Mauritanie, selon son entourage.