Ce jeudi 11 avril, le Général Président Omar El Béchir, acculé depuis mi-décembre par la rue, a finalement chuté. Un Conseil militaire de transition a repris les leviers du pouvoir « pour deux ans ». Celui-ci devait être dirigé par le général Awad Benawf, précédemment ministre de la Défense et vice-président soudanais.
Cependant, il y a problème : nommé à la tête du Conseil militaire de transition, Awad Benawf est un important pilier du parti du Congrès, resté au pouvoir depuis trois décennies.
Au sein de l’armée, il a occupé plusieurs fonctions importantes avant de devenir directeur des Services de renseignements. Cet homme du sérail militaire est nommé en 2015 par Omar el-Béchir au poste de ministre de la Défense. En février dernier, tout en conservant ce poste, il accède à la vice-présidence du Soudan et prend la tête du Haut comité de sécurité créé pour faire face aux manifestations. Ce nouvel homme fort est bien un bras droit du président déchu.
De sorte que si la rue soudanaise et l’opposition se félicitent de l’éjection d’Omar El Béchir, à la tête du pays depuis 30 ans, pour autant, elles redoutent que le scénario de prise de pouvoir tout comme la composition de ce Conseil militaire ne soient ni plus ni moins qu’une simple révolution de palais. D’où, leur totale désapprobation de ce jeu de dupes des dirigeants militaires autoproclamés et leur maintien de la pression en bravant le couvre-feu instauré.
Une pression qui s’avéra payante puisqu’elle poussera l’intéressé à céder moins de 48 heures après la place à un autre général qui n’aura pas servi le régime défunt. Ce dernier devant conduire, pendant deux ans, une équipe gouvernementale civile. Laquelle aura la tâche d’organiser des élections libres et transparentes. Une décision acceptée par une majorité des contestataires soudanais.
Le 2 avril 2019, c’était le chef de l’Etat algérien, poussé par la rue, qui démissionnait publiquement avec effet immédiat. Conformément à la Loi fondamentale, l’intérim est pour le moment assuré par le président du Conseil de la nation, l’équivalent du Sénat, Abdelkader Bensalah. Lequel a la lourde charge de gérer les affaires courantes du pays et d’organiser les élections sous trois mois.
La rue rejette cette situation et considère qu’Abdelkader Bensalah est aussi une personnalité honnie, un symbole du système politique qu’elle est en train de combattre depuis des semaines. Ce qu’entraîne la contestation populaire à réfuter radicalement toute hypothèse d’une transition gérée par une quelconque figure de ce système.
En lieu et place, les manifestants et l’opposition exigent une transition politique sans aucune figure du système clanique. Pour ce faire, l’Algérie a connu, le vendredi dernier sa 8ème journée de contestation contre le système. La rue réfutant le statu quo politique, continue d’exiger une équipe transitionnelle inclusive mais dépouillée de toute figure du système.
Au Soudan comme en Algérie, les populations, longtemps soumises à des régimes claniques dictatoriaux veulent un vrai changement de régime, une véritable démocratisation de la vie politique. En somme, elles n’aspirent qu’à un simple idéal : l’accès à la démocratie et à la liberté d’opinion. Deux fondamentaux absolument nécessaires à l’instauration d’un Etat de droit pour la tenue d’élections libres et transparentes. Pas plus !
Gaoussou M. Traoré