Le Mali célèbre le 60e anniversaire de l’indépendance. Regards croisés sur cet évènement symbolique, qui se déroule dans une situation particulière. Les défis à relever restent énormes, mais pas insurmontables.
Le mardi, 22 septembre 2020, le Mali a célébré le 60e anniversaire de son indépendance. L’indépendance a été officiellement proclamée le jeudi 22 septembre 1960, après l’éclatement de la Fédération du Mali. Ce pays de vieilles civilisations a obtenu son indépendance par la voie pacifique comme de nombreux États sur le continent.
Depuis quelques années, cette fête nationale se déroule dans un climat particulier. A cause notamment de la crise multidimensionnelle que traverse le Mali depuis bientôt une décennie. Cette année, une crise sociopolitique, qui s’est soldée le 18 août dernier par un coup de force militaire contre Ibrahim Boubacar Keita, a davantage corsé la situation. Le défilé militaire, l’un des temps forts de la commémoration du 22 septembre, a été présidé par le colonel Assimi Goita, président du Comité national pour le salut du peuple (CNSP).
Une fête moins fastidieuse
L’anniversaire du 22 septembre est célébré en hommage aux héros de la lutte de l’indépendance, des résistants à la pénétration coloniale et tous ceux qui se sont battus pour la libération du peuple malien.
« Tous les Maliens doivent exprimer leur fierté. Nous devons également avoir une pensée pour les pères de l’indépendance, qui ont mené le combat de la libération. Et cela sans oublier les figures de la résistance contre la pénétration coloniale comme Samory Touré, Babemba et Tiéba Traoré, Firhoun Ag Alinssar, Cheick Omar Tall, entre autres », estime Mohamed Touré, président de l’Association des élèves et étudiants ressortissants de la région de Gao et sympathisants (AEERGS).
Si l’esprit de la célébration de cet événement est important, beaucoup plaident pour une fête moins fastidieuse compte tenu de la situation du pays. « On peut célébrer le 22 septembre, mais pas en grande pompe. Car la situation n’est pas favorable aux festivités, le pays est en crise. Nous supposons donc qu’il n’y a pas assez d’argent pour faire la fête, et il ne faut pas oublier que nous avons aussi d’autres besoins prioritaires », juge Fatim Touré, blogueuse et consultante dans une ONG basée à Tombouctou.
« Récurrence des coups d’État »
Cet événement est aussi l’occasion de s’interroger sur le cours de l’histoire contemporaine du Mali, en termes de progrès et de défis afin de dégager éventuellement des pistes nouvelles pour les prochaines années. Sur le plan politique et institutionnel, le Mali, depuis son accession à l’indépendance, a connu trois Républiques, quatre coups d’État. Ce qui est loin d’être élogieux pour un jeune État.
Plus d’un demi-siècle d’existence, « le bilan n’est pas très reluisant », constate Mohamed Touré. « Il y a eu beaucoup de cafouillages et de gâchis dans la gestion de l’État durant ces 60 ans : la récurrence des coups de force militaire, un tous les 15 ans en moyenne, les conflits armés à répétition, surtout les rébellions au Nord, la réponse inadéquate à ces problèmes, l’instauration d’un cycle de violence, l’effondrement de l’État… », a-t-il ajouté, tout en rappelant néanmoins que tout n’est pas sombre.
Comme lui, Meissa Sarr, étudiant en sociologie, trouve aussi que le bilan est assez mitigé. Il pointe du doigt la corruption et la malversation dans la gouvernance. Pour lui, « les promesses de l’indépendance ne sont pas tenues ».
Optimisme
Cependant, malgré les difficultés ou échecs constatés, beaucoup sont optimistes pour l’avenir. Fanta Moïda, blogueuse et enseignante, espère de meilleures perspectives, avec le désir des Maliens de rendre au pays son honneur et sa dignité, à travers une amélioration de l’offre de services dans le secteur de la justice, la santé et l’éducation.
Pour Yagaré Diakité, directrice développement médias à Tuwindi, tout le monde doit jouer son rôle dans l’édification du pays. « 60 ans, c’est énorme : nous avons fait du chemin, mais la route reste parsemée d’embûches. Le Mali doit primer sur nos intérêts personnels », conseille-t-elle.
L’optimisme et l’engagement de tous sont donc importants pour que notre indépendance soit visible sur tous les plans- y compris sur les plans politique et économique. Les défis restent énormes, mais pas insurmontables.
Source : Benbere