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Zone aéroportuaire de Bamako : LES ENVAHISSEURS

Les constructions illicites ont poussé comme des champignons dans ce domaine affecté à l’activité aéronautique. Une opération de démolition a débuté

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Mercredi 12 août. Le ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, Dramane Dembélé est en visite dans la zone aéroportuaire de Bamako-Sénou, un espace de plusieurs centaines d’hectares relevant du patrimoine de l’Asecna (Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar). La zone est officiellement délimitée. Le domaine est traversé sur une grande partie par la route nationale 7 qui relie Bamako à Sikasso.
Le ministre Dramane Dembélé, accompagné de membres de son cabinet, a concentré sa visite sur le côté est de la voie. Son initiative est justifiée par un constat : depuis quelques temps, le domaine aéroportuaire, censé accueillir des installations provisoires, est l’objet de convoitises. Ça et là, on peut voir des chantiers en dur. La spéculation foncière qui caractérise le foncier dans la capitale y a étendu ses tentacules.
Des garagistes et autres artisans occupent le site sur une profondeur de plusieurs centaines de mètres. Des milliers d’artisans se côtoient dans l’anarchie la plus totale. Ils sont garagistes, mécaniciens, tôliers, ferrailleurs, peintres, etc…
Il y a aussi des vendeuses de produits alimentaires qui disposent de magasins ne répondant à aucune norme d’hygiène. Mouches, cafards et autres parasites pullulent sur les produits dont la plupart finissent pourtant dans nos assiettes.
Les épaves de voitures, les conteneurs, les kiosques et autres installations de fortunes anarchiquement disposés font du site un nid pour les bandits qui y pratiquent toutes sortes d’activités. De jour comme de nuit. Il n’y a aucun doute : l’endroit favorise l’insécurité qui monte dans notre capitale.
Sur les lieux, le ministre a rencontré les occupants regroupés en association. Leur porte-parole indique qu’ils ont reçu des autorités de la Commune VI l’autorisation de s’installer provisoirement dans la zone. « Nous avons emprunté la zone. Le maire nous avait averti que l’endroit fait partie de la zone aéroportuaire et que de ce fait, nous pouvions être déguerpis quand l’Etat le jugera nécessaire », a indiqué l’homme qui met en garde ceux qui ont entrepris des constructions en dur. Il assure que son association est opposée à toute construction durable dans la zone. Mais cela n’a pas empêché certaines personnes de le faire avec la complicité de la mairie de Commune VI, assure-t-il.
Le ministre a expliqué sa démarche par le souci de préserver la zone aéroportuaire, mais également d’organiser le site afin qu’il ne serve pas de cache aux ennemis du pays. Ses interlocuteurs ont adhéré à la démarche et promis de coopérer dans ce sens.

DES PRECEDENTS FACHEUX. Non loin des artisans, un marché spontané grouille de monde. Y sont vendus en gros et en détail, bananes plantains, oignons, et pommes de terre importées. Toute la journée, des camions, remplis de produits, affluent et des travailleurs journaliers déchargent les cargaisons dans un tohu-bohu indescriptible. Les responsables de ce marché ont donné les mêmes explications que leurs voisins, les artisans.
En s’enfonçant plus en profondeur dans le site, le spectacle qui se présente est tout simplement ahurissant. Ici, les chantiers poussent comme des champignons et s’étendent à perte de vue. Certaines maisons sont au stade de la finition. « Les gens ont construit malgré les injonctions et savent que l’espace appartient bien à l’Asecna », confie un responsable de ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat. « Une grande partie de la zone aéroportuaire a été morcelée et cédée à des privés depuis plusieurs années. Je suis aujourd’hui étonné d’apprendre que l’Etat n’était pas au courant», réagit un autre interlocuteur.
A la vue de la colonne de véhicules de la délégation ministérielle, certains travailleurs des chantiers prennent la fuite, abandonnant tout derrière eux. D’autres, plus téméraires, ont préféré ignorer la présence des visiteurs. Mais ils ont été contraints d’arrêter les travaux.
Un constat : il existe une grande complicité entre ceux qui travaillent sur les chantiers et les propriétaires des maisons. Les premiers ne livrent jamais les noms des seconds. Mieux, ils brouillent volontairement les pistes pour que le propriétaire ne soit pas identifié. Cela a été le cas sur un des chantiers sur lesquels que le ministre s’est rendu. Les travailleurs étaient affairés à l’arrivée de la délégation. Les agents de la sécurité qui accompagnaient le ministre procédèrent à leur arrestation et obtinrent d’eux le numéro de téléphone de leur employeur, c’est-à-dire l’entrepreneur chargé des travaux.
Joint par le chef de cabinet du ministre, l’entrepreneur expliqua que le chantier appartient à une dame. Elle est à Bamako ? Non, répondra l’homme, assurant que la dame en question vit en France. «  Ok, tu viendras chercher tes employés au commissariat de police et apportes avec toi les documents et l’autorisation de construire », lui lança le chef de cabinet. Pris de panique, l’homme avoua n’avoir aucune autorisation de construire. En veine de franchise, il révéla que la propriétaire se trouvait bien à Bamako, et donna son nom et son numéro de téléphone. Jointe au téléphone, la dame que nous désignerons par l’initiale « A », nia catégoriquement avoir un chantier dans la zone aéroportuaire. Le ministère a promis de poursuivre les investigations pour mettre la main sur le ou la propriétaire.
Comment les propriétaires de ces chantiers ont-ils pris le risque de construire dans une zone dont le statut est très connu et où les déguerpissements avaient défrayé la chronique ? Ont-ils misé sur la faiblesse de l’Etat ? Jugeaient-ils, peut être naïvement, avoir rempli toutes les conditions pour avoir des parcelles dans la zone et construire ? Ou tout simplement pensaient-ils qu’il n’y aurait jamais de contrôle ?
Pour le ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, aucun doute n’est permis : certaines personnes ont bénéficié de la complicité d’agents de l’Etat. « Je pense qu’il y a eu des complicités. Nous allons en tirer les enseignements. L’Etat est déterminé à arrêter toutes ces pratiques », a assuré le ministre Dembélé en ordonnant la démolition de toutes les constructions illégales dans la zone. Cette opération a commencé hier. Mais sera-t-elle menée jusqu’au bout ? La question vaut d’être posée au regard de précédents fâcheux en la matière. Le cas le plus récent étant celui de Souleymanebougou où une opération de démolition de constructions jugées illégales a été prématurément interrompue.

Be. COULIBALY

source : L’ Essor

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