Le pouvoir Judiciaire a pour rôle de contrôler l’application de la loi et de sanctionner son non-respect. Le concept de son indépendance ne doit pas être entendu dans un sens absolu ou étroit. Le ministre de la Justice, membre du pouvoir exécutif est chargé de la gestion du service public de la justice.
Il n’existe pas, en réalité, de définition universellement admise du concept de l’indépendance du pouvoir judiciaire, qui émane de la théorie de la séparation des pouvoirs, développée par Montesquieu. Les trois pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire selon Montesquieu, doivent être indépendants les uns des autres afin d’empêcher des dérives despotiques et d’assurer les libertés des citoyens. La France, quant à elle, a développé sa propre conception de la séparation des pouvoirs, fondée sur la limitation des attributions de l’autorité judiciaire à l’égard de l’exécutif. Et notre Constitution en vigueur s’est beaucoup inspirée de la Constitution française. La France s’est rendue compte qu’une stricte séparation des pouvoirs peut aboutir à la paralysie des institutions.
Cela s’est produit sous le Directoire (1795 – 1799) et sous la IIe République (1848 – 1851), où le conflit entre l’exécutif et le législatif s’est, à chaque fois, soldé par un coup d’Etat. Aujourd’hui, de nombreux régimes politiques privilégient le principe de la collaboration des pouvoirs, tout en disposant de moyens d’action des uns envers les autres. Le chef de l’Etat peut, par exemple, dissoudre l’Assemblée Nationale, qui à son tour, a la possibilité de renverser le gouvernement et les magistrats du parquet sont soumis à l’autorité hiérarchique du gouvernement.
Inspirés par la théorie de la séparation des pouvoirs, les rédacteurs de la Constitution américaine ont institué en 1887 un régime présidentiel, organisé par la séparation des pouvoirs, tempéré par l’existence de moyens de contrôle et d’actions réciproques. Le régime politique malien, faut -il le rappeler, n’est pas présidentiel. Le ministère malien de la Justice, comme celui de la France, est l’administration centrale chargée de la gestion du service public de la Justice, placé sous l’autorité du ministre de la Justice, Garde des sceaux.
Il est important de distinguer l’indépendance des magistrats du siège (les juges) et celle des magistrats du parquet (les procureurs). Les Juges sont indépendants dans l’exercice de leurs compétences juridictionnelles, lors des jugements ou des arrêts qu’ils rendent. Ils sont inamovibles et ne peuvent recevoir d’affectation nouvelle sans leur consentement. Par contre, l’indépendance des magistrats du parquet est limitée. Ils reçoivent nécessairement des instructions de leurs chefs hiérarchiques même si à l’audience ils retrouvent leur liberté de parole. «La plumer est serve, la parole est libre», dit-on.
Le procureur Général et les procureurs de la République sont sous l’autorité du Garde de sceaux. Donc, malgré leur appartenance à l’autorité judiciaire, ils ne sont pas indépendants du pouvoir exécutif. Par ailleurs, les magistrats n’ont pas, comme les membres du gouvernement ou du parlement un pouvoir propre. Ils dépendent, en grande partie, du Garde des sceaux.
En ce qui concerne notre pays, le ministre malien de la justice, Mohamed Ali Bathily doit s’occuper de l’administration de la justice, contrôler entre autres, les activités judiciaires et assurer une surveillance générale sur le personnel judiciaire. Donc, il doit rappeler les procureurs, qui sont sous son autorité, à l’ordre, .
Le pouvoir judiciaire n’est en réalité qu’une parcelle du pouvoir exécutif. Ce qui fait du Garde des sceaux l’autorité de surveillance et du contrôle de ce pouvoir. Cela limite vraiment le principe de l’indépendance de la justice. On ne peut pas parler d’immixtion dans les affaires judiciaires lorsque le ministre de la Justice joue son rôle de surveillance sur le personnel judiciaire.
Le pouvoir judiciaire exerce en réalité une portion du pouvoir exécutif dans le domaine judiciaire. Son indépendance est souvent un sujet de polémique. Si les juges sont presqu’indépendants dans l’exercice de leurs fonctions, les procureurs, quant à eux, sont sous l’autorité du ministre de la Justice, membre du gouvernement.
Moussa DANIOKO
Depuis Libreville
SOURCE: L’Indépendant