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Violences dans l’espace universitaire : L’AEEM, la «CMA de la colline du savoir»

Aujourd’hui dans l’espace universitaire à Bamako, les étudiants usent de la violence comme moyen de pression pour en imposer à l’administration universitaire à la manière de la CMA qui sème la terreur, par le crépitement des armes, pour se faire entendre. Comparaison n’est pas raison, mais il est évident qu’aujourd’hui, les membres de l’AEEM terrorisent leurs collègues sur la colline du savoir au vu et au su d’une autorité universitaire impuissante.

Aeem syndicat etudiant eleve defenseur campus badala

Plus révoltant, l’AEEM n’épargne pas le corps professoral qui fait incessamment l’objet de menaces et d’agressions physiques. Face à cette situation inadmissible dans un pays en proie à l’insécurité au nord comme au sud, les enseignants ont décidé de tirer la sonnette d’alarme en déplorant le laxisme de l’Etat.

Les membres de l’Association des Elèves et Etudiants du Mali (AEEM) sont devenus des loups pour leurs camarades au nom desquels ils sont sensés lutter pour revendiquer leurs droits. Loin d’être des responsables modèles, ils imposent et dictent leur loi par la violence physique. La vie sur la colline du savoir n’est pas loin de celle qu’ont connue les populations du nord au plus fort de l’occupation en 2012. Armés de machettes et d’armes à feu, ces quelques éléments font de l’université leur chasse gardée et n’hésitent pas à ôter la vie pour leurs intérêts égoïstes.

Ces révélations ont été faites lors d’une conférence de presse animée par le syndicat national de l’enseignement supérieur  du comité de l’USLHB. C’était le vendredi 03 février 2017 dans la salle de conférence de l’ex-FLASH.

Cette sortie médiatique du syndicat  fait suite à l’assassinat, le mardi 23 janvier 2017, de l’étudiant Drissa Doumbia de la section Etudes germaniques, classe L2. Il a été assassiné par les étudiants Taleb Salah Ould Cheikc de la Licence Lettres classiques et Almoustapha dit Tandjougora Sanogo de la Licence Anglais Unilingue dans la cour de la faculté à l’aide d’un couteau de cuisine aux alentours de 17 heures.  Sans être inquiétés, les assassins n’ont eu aucune peine à reprendre place dans la voiture à bord de laquelle ils étaient arrivés pour commettre leur forfait.

Selon les conférenciers, les auteurs de ce crime odieux, toujours dans la nature, ont été purement et simplement exclus le même jour par le syndicat.   Mais avant, l’université avait connu d’autres cas de violence. Précisément au mois de mars 2014 suite à un affrontement entre des clans d’étudiants, des cas de blessés ont été enregistrés et les cours suspendus du fait des jets de gaz. Sur cette même colline qui appartient désormais à l’AEEM, précisément le 21 juillet 2014, une étudiante  de la Licence Socio-anthropologie, a subi un viol collectif pendant le mois de Ramadan de la part d’étudiants se réclamant de l’AEEM. Tout comme au nord du Mali  où les femmes ont subi le même sort en l’absence des autorités.

Véritables maîtres de la colline du savoir pour le contrôle de la gestion du parking de motos et de l’Amphi de 1000 places, des clans se sont violemment affrontés en avril 2015 avec l’usage de machettes. Au-delà, les membres de l’AEEM terrorisent leurs camarades étudiants et prélèvent par la force, un montant sur les maigres bourses. Comme dans la jungle, le plus fort bouffe le plus faible.

C’est un secret de polichinelle que les étudiants sont impliqués dans la gestion du parking de motos, le processus des inscriptions à l’université, toutes choses qui génèrent une manne financière faisant l’objet de toutes les convoitises avec des conflits violents occasionnant des blessés et des morts.

Les enseignants, objets de menaces incessantes

Si les étudiants vivent désormais dans le couloir de la mort, les enseignants non plus ne sont pas épargnés. A titre d’illustration, Dr Boureima Touré, Secrétaire général du syndicat, signale que le 12 mai 2016, un affrontement entre des clans rivaux d’étudiants de la faculté des lettres et des sciences et langues, s’est soldé par la destruction de la voiture personnelle du Dr Boubacar S. Coulibaly, enseignant au département Anglais.

Il en est de même pour l’enseignant Mamadou Coumaré qui a trouvé les vitres et clignotants de sa voiture endommagés pendant qu’il était en cours. Plus révoltant, le 5 mars 2016, un groupe d’étudiants dirigés par le comité AEEM, mécontents du refus des professeurs de procéder à des repêchages, se sont introduits de force dans les salles d’examen pour déchirer les sujets et copies d’examen lors de la session de rattrapage.

Comme si cela ne suffisait pas, des étudiants ont tenté de s’introduire nuitamment au domicile du Chef de DER Sciences de l’Education dans l’intention de s’en prendre physiquement à sa personne.

En bref, les enseignants vivent dans l’insécurité totale. Face à cette situation, le personnel enseignant qui observe une grève depuis le 23 janvier, jour de l’assassinat de l’étudiant, n’entend pas reprendre les cours tant que la sécurité sur son lieu de travail ne sera pas assurée. « Nous allons dispenser les cours à condition que l’espace universitaire soit sécurisé », a martelé Dr Boureima Touré, le Secrétaire général du syndicat.

Par ailleurs, la politisation de l’école, le laxisme des autorités, l’interférence des députés et le manque de sanction ont été déplorés par les enseignants qui pensent à l’unanimité que l’AEEM est devenue une mafia avec la bénédiction de l’Etat. Le conférencier et auteur d’un ouvrage sur la violence à l’université, Idrissa Soiba Traoré, a dénoncé la gouvernance de l’AEEM comme  moyen de pression. Selon lui, l’autorité aussi exerce des violences sur les enseignants en refusant de leur payer les primes et d’assurer leur protection.

Rappelons que le lundi 30 janvier dernier, une rencontre s’est tenue entre le ministre de la sécurité et de la protection civile, Gal Salif Traoré et son homologue en charge de l’enseignement supérieur. Il s’agissait de discuter sans tabous de la sécurisation de l’espace universitaire afin de trouver les voies et moyens d’un retour à la quiétude dans cet espace.

Modibo L. Fofana

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