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Un projet d’accord révisé soumis le 27 novembre dernier aux parties prenantes aux pourparlers inter-maliens d’Alger : L’autogestion se profile pour le nord du Mali

Dans cette nouvelle mouture datant du 27 novembre 2014, il est fait mention des mesures devant être mises en œuvre durant une période dite intérimaire  « qui prend effet immédiatement après la signature de l’Accord global et définitif de paix et devant s’étaler sur une durée allant de 18 à 24 mois « . Parmi ces mesures figurent en bonne place l’intégration des  » combattants des mouvements armés dans les corps constitués de l’Etat y compris au sein des Forces de défense et de sécurité du Mali (FDSM) et l’harmonisation de leurs grades « . D’autre part, les  » membres des mouvements anciennement officiers des FDSM seront intégrés au moins aux mêmes grades « . Tout cela devant intervenir  » dans un délai qui n’excédera pas six mois suivant la signature de l’Accord « . En plus, le gouvernement est appelé à réaliser  » sous le sceau de l’urgence et par ordre de priorité au profit des populations affectées par la situation sécuritaire dans les régions Nord du Mali  » des actions et projets de développement économique, social et culturel qui nécessitent des centaines de milliards FCFA qui vont au-delà des capacités de notre pays. Le gouvernement va-t-il, en connaissance de cause,enfiler cette camisole de force que constitue ce nouvel Accord d’Alger ? Il est permis d’en douter compte tenu de l’importance de ce dossier dont l’objectif est la recherche d’une paix qui serait autant durable que réaliste dans sa mise en œuvre.

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Il est désormais clair que nous nous acheminons progressivement mais inexorablement vers la signature d’un accord de paix qui va conduire le pays dans une « décentralisation renforcée  » voire forcée et qui aura des  conséquences plus que néfastes pour l’unité du Mali. Déjà dans son préambule, ledit projet d’accord pour la paix et la réconciliation dresse un état des lieux plus que polémique en certains points, pour ne pas dire erroné, et qui est ainsi libellé :  » Nous, Gouvernement de la République du Mali et Mouvements signataires…ayant procédé à une analyse approfondie de la situation du Mali, en général, et en particulier celle des régions du Nord, appelées par certains   » Azawad « , marquées notamment par une violence cyclique doublée d’une mauvaise gouvernance qui n’a pas permis aux populations locales de participer effectivement à la gestion de leurs propres affaires et qui a engendré l’exode massif des communautés ainsi qu’une très grande pauvreté et un retard considérable en terme de développement socioéconomique par rapport au reste du pays, causant des souffrances indicibles, et exacerbant l’incompréhension entre les communautés… « . Il s’agit là de savoir entre quelles et quelles communautés ? Nous laissons au lecteur, qui connaît mieux le Mali de Kayes à Tessalit en passant par Nioro du Sahel et Douentza, le soin de faire sa propre lecture en ce qui concerne le niveau de développement comparé des différentes localités du pays. Une situation consécutive notamment à la mauvaise gouvernance qui a caractérisé la gestion du pays en général et celle des régions du Nord où des notabilités ou (ex) rebelles se sont toujours  » enrichis  » de la très grande pauvreté des populations. Et au nom desquelles des rebelles d’aujourd’hui les plus en vue se sont servis en centaines de millions FCFA dans les caisses noires de Koulouba. Chaque fois que l’argent ainsi empoché commençait à s’épuiser, ces éternels rebelles se faisaient entendre à travers des crépitements de fusils Kalachnikov pour faire peur aux locataires qui se sont succédé au palais présidentiel. Avec le nouvel accord en négociation, qui ne pourrait jamais être mis en œuvre au vu de son coût très élevé et du fait qu’il constitue même un danger pour l’intégrité du territoire national, il est évident que l’on s’achemine vers la partition du Mali ; avec l’abandon progressif des régions du nord aux mouvements armés qui pourront les rebaptiser « Azawad « , comme le sous-entend d’ailleurs le document soumis aux parties.

Réforme institutionnelle et réorganisation territoriale

Dans son article 8, l’accord  prévoit que  » les parties conviennent de mettre en place une architecture institutionnelle et de développement permettant aux populations du Nord de gérer leurs propres affaires, sur la base du principe de libre administration et assurant une plus grande représentativité au sein des institutions nationales « . A cet effet, il est notamment prévu la mise en place de collectivités territoriales dotées d’organes élus au suffrage universel, bénéficiant d’un très large transfert de compétences et jouissant des pouvoirs juridiques, administratifs et financiers nécessaires. Dans ce cadre, ajoute le document, la région sera dotée d’une Assemblée régionale élue au suffrage universel direct et qui élira à son tour son Président qui est également le Chef de l’Exécutif et de l’Administration de la région.

Il faudra redouter que seules les populations identifiées par les mouvements rebelles ne participent à ces élections qui ne feront que confirmer nos craintes. On aura ainsi un Etat  » Azawad  » dans l’Etat du Mali avec à sa disposition  » une Police territoriale  » et des moyens financiers à hauteur de 30% des recettes budgétaires de l’Etat que les collectivités devront se partager, à partir de 2018. Dans un document dont nous avons reçu copie, les mouvements armés disaient que ce sont eux qui allaient procéder à l’identification des électeurs de l’ «  Azawad  » constitué dansleur tête des trois régions du nord du Mali.

La nouveauté par rapport au projet d’accord daté du mois d’octobre dernier est relative notamment aux mesures devant être prises durant la période dite intérimaire au cours de laquelle  » des mesures exceptionnelles en ce qui concerne l’administration des régions du nord du Mali sont prises et mis en œuvre « . Parmi ces mesuresfigurent la révision de la Constitution, la relecture de la Loi électorale en vue d’accorder notamment un ratio de 1 député pour 30 000 habitants aux régions du nord au lieu de 1 député pour 60 000 habitants pour le reste du Mali, l’élection dans un délai de 18 mois des Assemblées et organes concernés par l’Accord.

D’autre part, contrairement à l’avis même du gouvernement, il est toujours fait mention dans le nouveau texte proposé par la Médiation que  » deux ou plusieurs autres régions peuvent… constituer des entités intégrées et mettre en place les instances requises afin de mieux promouvoir leur développement… « . En fait, une porte laissée ouverte pour la constitution de l’ » Etat de l’Azawad « .

La désignation durant la période intérimaire des autorités chargées de l’administration des communes, cercles et régions du nord devant se faire, elle aussi, « de manière consensuelle par les parties « .

 

Intégration des rebelles et réintégration des déserteurs dans l’armée nationale

Selon le nouveau projet d’accord, dans les 90 jours suivant la signature dudit document, la Commission nationale de Désarmement, de Démobilisation, de Réintégration et de Réinsertion (DDRR) avec le Conseil national pour la Réforme du secteur de la sécurité (RSS) établiront les critères, les quotas et les modalités de l’intégration des combattants dans les corps constitués de l’Etat y compris au sein des Forces de défense et de sécurité du Mali (FDSM). A ce niveau précise le document, les membres des mouvements anciennement officiers des FDSM  » seront réintégrés au moins aux mêmes grades. Ceux qui ne remplissent pas les conditions et ceux qui choisiront de ne pas être intégrés pourront bénéficier d’une pension de retraite, d’une pension proportionnelle ou d’une pension d’invalidité suivant le cas « . A  se demander où le gouvernement du Mali prendra tout cet argent pour satisfaire ces rebelles et tous leurs parents qui pourront se pointer pour bénéficier de ces pensions sans avoir jamais travaillé. S’y ajoute « une représentation équitable des ressortissants des communautés du nord du Mali dans les institutions et grands services de la République (Gouvernement, diplomatie, sociétés d’Etat, etc.) « .

En plus, le gouvernement devra s’engager, entre autres, à organiser la rentrée scolaire 2014-2015 en renforçant la fonctionnalité des cantines scolaires dans 314 établissements par la dotation en produits alimentaires et équipements appropriés ; en procédant à l’orientation de 5 058 élèves admis au DEF dans les académies d’enseignement de Tombouctou et Gao ; en réalisant des points d’eau (forages, puits pastoraux) dans les régions de Kidal, Gao et Tombouctou ; à lutter contre l’ensablement du fleuve Niger, des bras du fleuve, des principaux lacs, des mares et chenaux d’alimentation. A relier Kidal, Gao et Tombouctou à la route transsaharienne et à réaliser également des axes routiers tels Gao-Bourem, Kidal-Menaka ; des aéroports à Kidal, Tessalit, Taoudenit, Menaka, Gao (réhabilitation)  et Goundam.

La liste des engagements que le gouvernement du Mali devra prendre pour satisfaire les revendications des mouvements rebelles est loin d’être exhaustive. Il s’agit maintenant de savoir comment financer ces innombrables chantiers pour un pays aussi pauvre que le nôtre. Autant dire alors que l’on s’achemine vers la signature d’un document dont la mise en œuvre sera quasi impossible voire carrément irréaliste. Tant sur le plan institutionnel qu’en termes de coûts financier et matériel insupportables pour les maigres ressources de l’Etat.

Dans ces conditions, un référendum constitutionnel pour faire passer cette camisole de force est alors plus qu’aléatoire. C’est dire que le gouvernement doit apporter de réels et justes amendements afin que ce projet d’accord soumis par la Médiation internationale soit le plus réaliste possible dans la recherche d’une paix juste, équitable et durable dans le septentrion de notre pays.

Mamadou FOFANA

SOURCE: L’Indépendant  du   1 déc 2014.
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