Dans une réflexion intitulée ‘’ Faut-il désespérer du Mali d’IBK ‘’, l’universitaire jette un regard critique sur la situation politique du Mali et met en garde le nouveau président. Eléments choisis.
Le professeur Issa N’Diaye rompt le silence. Dans une contribution publiée dans la presse, le professeur de philosophie s’attèle à faire la radioscopie du Mali depuis la chute, le 19 novembre 1968, de Modibo Kéita, le premier président du Mali indépendant. Fidèle à sa ligne de conduite, l’universitaire tire sur tout ce qui bouge.
Mise en garde
En parlant de l’actuel président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita, il déplore « son exercice narcissique du pouvoir, sa sensibilité aux flatteries de ses courtisans(…). Il le met en garde contre le comportement laudateur des courtisans et de toute propension à l’autisme. « Lors de ses soliloques télévisés, il croit que les applaudissements frénétiques d’un public de courtisans, acquis d’avance à sa cause, constituent un signe d’adhésion populaire. Il se croit l’élu de Dieu, oubliant qu’il a été surtout élu par son peuple. Il a vite oublié pourquoi il l’a été. S’il ne prend garde, son autisme politique le conduira à sa perte. N’oublions jamais que le pouvoir isole », avertit le professeur de philosophie à l’Université de Bamako.
Un lourd silence
L’acteur du mouvement démocratique malien estime que la démocratie, une première occasion ratée d’après lui, a fait pire que les 23 ans de dictature de Moussa Traoré, du fait de la mise à l’écart des hommes valeureux pour une « génération spontanée de politiciens sans foi ni loi ». Il flingue Alpha Oumar Konaré, coupable à ses yeux, d’ouvrir la boîte de Pandore. « Le Maradona politique qu’il était a fini par être victime de ses propres dribbles … ». Par rapport au silence de l’ancien président depuis son départ du pouvoir, le professeur Issa N’Diaye adopte un ton à la fois dur et narquois : « Le silence assourdissant du talentueux « professeur de démocratie » de ses homologues africains dont certains trainent encore au pouvoir, son volontaire effacement de la scène politique, ne traduit-il pas les remords d’un homme placé devant le tribunal impitoyable de sa propre conscience, et mesurant pleinement l’ampleur de ses responsabilités historiques face au désastre actuel ? Terrible fardeau que le sien! Se construire sa propre prison pour échapper au regard accusateur de ses propres concitoyens! Alpha Le Démocrate, rase les murs tandis que Moussa le Dictateur parade. Quelle terrible leçon de l’histoire. »
Coup d’Etat manqué
Le coup d’Etat du 22 mars 2012 d’ Amadou Haya Sanogo, a été, de l’aveu du professeur une autre occasion manquée. En effet il dénonce le sabordage occasionné par les putschistes, l’opportunisme des hommes politiques et les agissements de la CEDEAO. L’armée malienne victime de l’affairisme et de l’incompétence et l’économie à forte odeur mafieuse sont également dénoncées dans la diatribe du professeur de philosophie. Face aux errements politiques et à la crise institutionnelle, le professeur Issa N’Diaye propose une nouvelle dynamique institutionnelle pour sortir de l’impasse. « Nous sommes condamnés à créer une nouvelle dynamique à travers des Assises Nationales Populaires, à l’instar de ce qui a été fait au Sénégal par la société civile, même si la dynamique n’a pas été menée jusqu’au bout. Cela a tout de même permis de congédier Wade et d’éviter au pays une guerre civile. Nous pouvons en tirer des leçons ». Et de poursuivre : « Sortons du schéma classique des conférences nationales souveraines, des Etats généraux, des concertations nationales et autres scenarii où l’Etat et la classe politique cooptent les participants.
Autre aspect innovant, les Assises nationales pour être vraiment populaires doivent impliquer les populations depuis la base jusque dans les villages les plus reculés. A chaque étape, il reviendra aux populations de désigner elles-mêmes leurs propres représentants. C’est seulement ainsi que l’on s’assurera de la représentativité des institutions qui en sortiront et surtout de leur légitimité ».