Le Premier ministre, Boubou Cissé, vient de boucler ses 100 premiers jours à la tête du gouvernement. Occasion désormais traditionnelle de dresser un tout premier bilan de son action aux commandes de l’exécutif national.
Boubou Cissé a pris fonction dans un contexte véritablement tumultueux. La grève des enseignants menaçait de compromettre l’année scolaire, une perspective grosse d’hypothèques pour notre système éducatif. Sur la scène politique, le climat était très tendu avec une vive tension entre majorité et opposition. Fait nouveau : l’irruption des acteurs inhabituels avec des revendications politiquement connotées, contribuant à mettre la stabilité du pouvoir sur la corde raide.
La série des massacres des populations civiles dans la région de Mopti achevait d’assombrir le ciel sous lequel l’actuel Premier ministre a pris les rênes du gouvernement. Les dossiers brûlants et volumineux débordaient.
Un peu plus de trois mois plus tard, il est indéniable que de bons résultats ont été réalisés sur ces gros dossiers. Le sauvetage de l’année scolaire est incontestable ; l’apaisement du climat politique et social est patent ; la pacification de la région de Mopti est un processus bien enclenché.
Ces résultats sont les fruits d’une méthode : le contact direct avec les protagonistes, une oreille attentive à leurs préoccupations, ainsi que l’implication de personnalités influentes. Dès sa prise de fonction, Boubou Cissé a expérimenté sa méthode du contact direct par des échanges sans filtre avec les enseignants grévistes. Occasion de les convaincre que les pouvoirs publics jugent leurs revendications légitimes. Ensuite, des personnalités respectées sont entrées dans la danse pour attirer l’attention des enseignants sur la responsabilité qui est la leur quant à l’avenir du pays. De quoi faire retomber immédiatement la colère des pédagogues en arrêt de travail.
Sur le plan politique, la méthode du contact direct avec l’ensemble des acteurs a permis à Boubou Cissé de traduire en acte l’instruction du président de la République de former un gouvernement de large ouverture. Là également, le renfort des légitimités traditionnelles et des leaders religieux a contribué à mettre en avant l’importance de l’implication de l’ensemble de la classe politique à la sortie de crise. Il n’en fallait pas plus pour attirer dans le gouvernement des voix fortes de l’opposition dont la carrure et le talent sont d’un apport appréciable dans la conduite des affaires publiques. L’Accord politique de gouvernance qui en a résulté est le sésame qui a ouvert les portes de la sérénité sur l’échiquier politique.
Pendant ses tournées dans le pays profond, le Premier ministre met en pratique le schéma de l’écoute attentive. Partout, le Premier ministre tient à rencontrer l’ensemble des acteurs locaux. Au contact de ceux qui vivent la crise au quotidien, il est forcément imprégné des informations qui construisent l’intime conviction, élément essentiel pour un décideur dans sa solitude au moment de prendre les décisions capitales.
Aussi, dans les régions, Boubou Cissé ne se prive pas de la contribution des légitimités locales et autres ressortissants ayant une certaine influence dans les villages du fait de leur implication dans le développement local.
La méthode a permis au Premier ministre de se faire une idée précise de la situation sur le terrain. Il en a certainement conclu qu’il faudrait assurer une présence vigoureuse de la force publique et en même temps voler au secours des populations en détresse avec des actions humanitaires. D’où le renforcement des effectifs militaires sur le terrain, la distribution de vivres et des actions sur le plan sanitaire.
Les résultats de son action plaident pour Boubou Cissé et confortent l’opinion de ceux qui ont soutenu, juste après sa nomination, qu’il avait l’épaule pour diriger le gouvernement. Membre de l’attelage gouvernemental, sans discontinuer, depuis 2013, il a eu le temps de découvrir les arcanes du sommet de l’Etat. Qui plus est, sa longévité au poste de ministre en charge des Finances lui offre une position au carrefour des politiques publiques.
Cette somme d’expériences, alliée à sa personnalité plus consensuelle que clivante, constitue un atout pour compenser son déficit en combat politique. Diriger le gouvernement est une fonction éminemment politique qui expose aux joutes et coups politiciens. Mais Boubou Cissé en est pour le moment épargné. Sa posture d’homme d’actions totalement dédiée à la sortie de crise lui offre un autre bouclier. Pas un seul de ses actes, encore moins de ses déclarations ne laisse entrevoir une quelconque ambition de se forger un destin national. Difficile de trouver des bâtons à mettre dans ses roues tant que ses coups de pédale ne le conduisent pas vers la colline du pouvoir. Le jour où il voudra capitaliser ses bons résultats en cédant à la tentation, comme bien de ses prédécesseurs, de franchir la derrière marche qui le sépare du sommet, nul doute que l’adversité se révélera d’une toute autre nature.
En attendant, Boubou Cissé peut profiter du climat serein pour continuer à poser des actes dans le sens de la réponse aux préoccupations nationales. Pour le bien de tout le monde.
B. TOURÉ
Source: L’ Essor- Mali