Plusieurs raisons, dont trois principalement, expliquent la défaite du candidat de l’URD. Lequel vient, pour la deuxième fois consécutive, de se faire battre à plate-couture par IBK, son challenger de 2013.
La première raison est à lier au déficit d’image du candidat de la Coalition pour l’Alternance et le Changement.
Réalisées dans la même posture, ou presque, les affiches de campagne de Soumaïla Cissé étaient ternes, austères, voire muettes. Elles expriment, pour la plupart d’entre –elles, l’anxiété du candidat. Avec, à la clé, un visage assombri, inexpressif. Contrairement aux affiches d’IBK, montrant des images « travaillées », un visage reluisant d’un candidat sûr de lui. Un candidat proche de ses concitoyens de tous âges, de toutes les composantes de la société.
Bons orateurs, piètres politiciens
La seconde raison de la défaite de Soumaïla Cissé s’explique par le ralliement du sulfureux chroniqueur, Ras Bath. Réputé pour ses chroniques au vitriol à l’égard du pouvoir IBK, le leader des CDR (Comités de Défense de la République) n’a pas su mobiliser ses « troupes » au profit de son candidat.
Disséminés, selon lui, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, les CDR auraient pu diminuer – au premier tour de l’élection présidentielle – l’écart de points entre IBK et Soumaïla Cissé. Mais hélas ! Candidat à sa propre succession, le président sortant a récolté 41,70 % des suffrages, contre 17,78% pour le candidat de l’URD. Soit plus du double des points d’écart.
« Soumaïla Cissé était bien parti pour remporter cette présidentielle, surtout après les scandales qui ont émaillé le quinquennat d’IBK », rassurent des milliers de Maliens, convaincus de ses capacités à sortir notre pays de la crise actuelle.
Mais au lendemain de l’annonce, à grands renforts de publicité, du ralliement de Ras Bath au camp Soumaïla Cissé, ses sympathisants ont décidé de voter pour IBK.
« Nous ne comprenons pas comment un candidat de sa trempe peut-il s’encombrer avec Ras Bath, qui fait croire qu’il a du monde derrière lui ; mais qui, en réalité, n’a personne avec lui », déplorent-ils.
Même le soutien de Tiébilé Dramé, leader du PARENA, n’a pu mobiliser ses troupes au profit de « Soumi ».
L’un comme l’autre sont reconnus de bons orateurs, capables de haranguer les foules ; mais ils se sont montrés incapables d’accrocher les électeurs, las d’entendre les mêmes discours. Les mêmes diatribes à l’endroit du régime IBK.
Abandon des médias classiques au profit des réseaux sociaux
La troisième raison de la défaite de Soumaïla Cissé s’explique par la « mauvaise médiatisation » de sa campagne.
Contrairement à 2013 où, il était suivi dans ses déplacements par une horde de journalistes, le candidat de l’URD aura mené, au cours de cette présidentielle, une campagne au rabais.
Payés, disent-ils au lance-pierre, les rares journalistes invités ont boudé ses meetings.
Relayés sur les réseaux sociaux, surtout dans un pays où 90% de la population est analphabète, ses meetings n’ont pas eu l’impact escompté.
S’y ajoute l’inexploitation du bilan d’IBK. Jugé « catastrophique » par l’opposition, ce bilan aurait pu augmenter les chances de Soumaïla Cissé à la présidentielle du 29 juillet dernier ; mais il a été mal exploité par le candidat de l’URD.
Autre raison et non des moindres de la défaite du chef de file de l’opposition : son incapacité à convaincre Aliou Boubacar Diallo et Dr Cheick Modibo Diarra à le soutenir au second tour de l’élection présidentielle.
Arrivés, respectivement, au troisième et quatrième rangs, avec 8,03% et 7,39 % des suffrages, ces deux candidats totalisent, à eux seuls, 15,42% des voix. Une réserve de voix, dont Soumaïla Cissé aurait pu profiter au second tour. Mais hélas !
« Ni l’un, ni l’autre, ne correspondent à notre idéal de changement. Remplacer Ibrahim Boubacar Keïta par Soumaïla Cissé n’est pas l’alternance et le changement », indique Dr Cheick Modibo Diarra, à l’issue du point de presse organisé à cet effet.
Comme on le voit, le challenger d’IBK n’a pas tiré leçons de sa défaite de 2013. Comme il y a cinq ans, il s’est fait entourer d’hommes et de femmes, qui ne seraient pas à la hauteur de l’enjeu. D’où la déception de ses milliers de sympathisants, qui ont rallié le camp adverse.
Oumar Babi
Canard Déchainé