Contre le désordre, le ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat et des Domaines, Irimirane Abdoulaye TOURE, a pris une décision ferme, le 22 mai dernier, en annulant les actes d’attribution de parcelles situées dans les servitudes, notamment le long des marigots et collecteurs.
Cette mesure, bien que réclamée de longue date, marque la volonté politique de mettre fin à une pratique qui a longtemps défié les règles de l’urbanisme et mis en péril la sécurité publique. Certes, c’est une mesure salutaire qui doit motiver les autorités à aller au-delà pour désormais identifier et traduire en justice les auteurs de ces attributions illicites.
Les servitudes, espaces réservés à des fonctions publiques spécifiques telles que l’écoulement des eaux pluviales, sont trop souvent l’objet d’occupations illégales, favorisées par des complicités au sein même de l’administration. Plusieurs quartiers paient les frais de cette situation pendant les saisons pluvieuses. En attribuant illégalement ces terrains, certains agents ont compromis la salubrité urbaine et contribué à l’aggravation des inondations dans le pays. La catastrophe de 2024 est l’illustration parfaite de cette situation. Celle-ci a fait plus de 70 morts, sinistré des milliers d’individus avec des dégâts matériels importants.
La décision du ministre intervient dans un contexte de reprise des opérations de déguerpissement engagées dans plusieurs quartiers de Bamako en vue de prévenir les inondations cette année. Des habitations, érigées en violation flagrante des textes régissant l’urbanisme, sont actuellement en cours de démolition depuis le 22 mai dernier. Elles seront toutes rasées sans dédommagement.
Dans sa décision du 22 mai, le ministre TOURE précise : « Tous les actes d’attribution de parcelles octroyées dans les lits et servitudes des marigots sont annulés dans toutes les dispositions.»
Le ministre a également ordonné la démolition des constructions illégales, en déclarant : « Toutes constructions érigées sur ces parcelles seront démolies. Pour l’exécution de cette décision, le gouverneur du district, les sous-préfets des sept arrondissements, les autorités municipales, ainsi que les responsables des domaines du cadastre, de l’urbanisme et de l’habitat, sont expressément instruites à agir dans leurs champs de compétence respectifs ».
Si cette opération, certes douloureuse pour certaines familles, répond à une nécessité impérieuse de protection de la vie des milliers d’autres individus, elle ne saurait suffire. En effet, il ne suffit pas d’annuler les actes irréguliers : il faut désormais identifier et traduire en justice les auteurs de ces attributions illicites. Une politique de tolérance zéro s’impose à la suite des enquêtes rigoureuses et des sanctions exemplaires aux auteurs et leurs complices pour servir d’exemple à d’autres seront tentés. À défaut, les démolitions actuelles ne seront qu’un épisode de plus dans le cycle vicieux de l’urbanisation anarchique.
Dans l’esprit du concept Mali Kura, les autorités de la Transition doivent engager des actions en justice contre les attributaires fautifs, qu’il s’agisse d’élus locaux, de chefs coutumiers ou de fonctionnaires impliqués. Ces poursuites, combinées à des sanctions exemplaires, sont essentielles pour restaurer le respect des textes et protéger les populations des catastrophes liées aux occupations illégales. Ceux qui sont auteurs de la vente illégale des servitudes doivent répondre de leur acte en vue de mettre fin au laisser-aller.
PAR SABA BALLO