À la différence du Niger voisin où des milliers de manifestants étaient dans les rues de Niamey, l’appel à mobilisation des jeunes du Mali contre la politique française dans le Sahel, n’a mobilisé que quelque dizaines de Maliens, ce 25 mai 2019, à l’esplanade de la Bourse du travail de Bamako. Et pourtant, moins que cette cause nationale, les Bamakois avaient inondé les rues de la capitale pour faire partir un PM. Il en fut de même quand il s’est agi de dire non à un changement de la loi fondamentale. L’unité, la paix et la cohésion du Mali ne sont-elles pas au-dessus de ces intérêts partisans ?
Contre l’impérialisme français, pourtant décriée sur tous les toits au Mali, force est de constater que les Maliens ne semblent pas prêts à aller véritablement au charbon. En tout cas, la preuve a été une nouvelle fois administrée ce 25 mai 2019, à l’esplanade de la Bourse du travail. En appel à de jeunes des « jeunes patriotes » décidés à en découdre avec cette vieille politique de l’ancienne métropole, les Maliens sont restés cloitrés dans leur antichambre. Une situation qui ne fait guère honneur aux héritiers de Firoun, de Kankoum Moussa, de Babemba TRAORE… quand on sait que pour les mêmes raisons, des milliers de Nigériens ont inondé les rues de Niamey pour exprimer leur colère contre la politique française au Sahel.
À travers cette manifestation, il s’agissait de à la fois de dénoncer la duplicité de la France dans la gestion de la crise malienne et apporter une réponse aux insanités du général français, Jean Bernard PINATEL, jugé rancunier et raciste.
Même si la détermination des jeunes était irréprochable, force est de constater que les observateurs sont restés sur leur faim avec l’intérêt manifesté par les Maliens à leur appel à manifester. Car, pour défendre le Mali contre l’ancienne puissance coloniale, ils n’étaient que quelques dizaines de personnes à la Bourse du travail. Une mobilisation en deçà des attentes face à une préoccupation aussi importante que l’unité et la paix dans un pays en proie à la violence terroriste, depuis 2012. À la suite de l’ancien ambassadeur français au Mali, Nicolas Normand, ils sont nombreux les Maliens qui s’interrogent de plus en plus si France est présente au Mali pour la paix. En six ans de présence avec les moyens que l’on connait, la France est incapable de venir à bout des terroristes. Pire, les chiffres officiels sur le nombre de victimes et l’ampleur de la propension du phénomène du nord vers le centre prouvent à suffisance que la situation se détériore de jour en jour et d’année en année. Cette France n’a jamais caché son soutien à ceux-là mêmes qui sont à l’origine du malheur qui frappe notre pays, les rebelles du MNLA assimilable à leurs amis les Touaregs.
Une chose est sûre, « Seule la lutte libère », dit-on. Mais dans le contexte de notre pays, intellectuels, leaders politiques et communautaires préfèrent dénoncer à demi-mot la France pourtant considérée par eux comme étant la principale responsable de la dégradation sécuritaire de notre pays. D’ailleurs, aucun de ces leaders politiques et religieux qui sont souvent en première ligne quand qu’il s’agit de s’attaquer au régime n’était pas visible sur les lieux de cette manifestation loin d’être une partie de plaisanterie.
Par Abdoulaye OUATTARA