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Religion : comment enrayer la violence ?

Notre monde est en péril. Le cercle vicieux de la violence et de la haine en réponse à la provocation et aux insultes doit être brisé au plus vite, pour éviter une catastrophe plus grande encore que celle qui se déroule sous nos yeux désemparés. Les dirigeants du monde doivent se réunir pour définir ensemble un cadre de coexistence pacifique et amicale entre les cultures et les confessions.
« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs ! ». C’est par ces mots que Jacques Chirac, Président de la République française, avait réveillé en 2002 les consciences internationales face à l’urgence climatique. Première étape d’un processus qui permit à la quasi-totalité des chefs d’Etat du monde de signer, 13 ans plus tard, l’Accord de Paris sur le Climat : le premier engagement mondial pour sauver notre planète.
Aujourd’hui, nous devons regarder en face le péril d’un nouvel embrasement religieux planétaire.
Quelles que soient les raisons qui poussent les uns ou les autres à allumer ou attiser le feu dans les cœurs des plus simples, le constat est là : le brasier a échappé au contrôle de ceux qui l’ont initié. La haine et l’intolérance religieuse gagnent les populations qui ont tout intérêt à retrouver une cohabitation pacifique.
Face à un front de détestation et de dérive terroriste ponctué d’attentats, qui se réclame de l’islam, un autre extrémisme est apparu qui veut que soient confondus islam et terrorisme, musulmans et terroristes. Un amalgame au nom duquel certaines personnes, ayant une tribune dans les média, se permettent de s’exprimer, de vomir toutes les outrances, tous les affronts.
La liberté d’expression est un droit inaliénable. Toute personne raisonnable y aspire. Mais comme toute liberté, elle s’arrête où commence celle d’autrui. Elle a des devoirs comme elle a des droits. La liberté n’est rien sans responsabilité, sans respect. Au nom de la liberté d’expression peut-on insulter son voisin ?
Les moyens d’expressions ne sont plus ceux d’antan. Si autrefois les caricatures étaient publiées à petite échelle et circulaient sous le manteau, les moyens de communication actuels leur permettent de toucher instantanément l’humanité toute entière. Et ce qui fait rire quelques-uns, choque et blesse une multitude, qui en général choisit de ne pas répondre à l’agression. Mais pour certains esprits, la colère emporte toute limite, exige de réagir, échappe à toute raison. Ils choisissent de s’exprimer en lettres de sang. Ils savent qu’ils atteindront le monde entier. Ils choisissent de tuer des innocents, bafouant les convictions qu’ils prétendent défendre.
Les attentats terroristes de ces derniers jours sont absolument injustifiables et condamnables mais ils montrent la portée universelle et la gravité que peut avoir à notre époque tout acte que chacun pose, serait-ce une image, un mot. Chacun sait que pour les musulmans du monde entier y compris les plus modérés, les caricatures du Prophète (psl) ont été une atteinte profonde à ce qu’ils ont de plus sacré.
N’est-il pas temps de réfléchir aux conséquences de ses actes ? Demander un minimum de retenue, est-ce attenter à sa liberté d’expression ?
Nous sommes entrés dans une logique de confrontation entre deux perceptions qui campent sur leurs positions sans laisser place ni à l’écoute ni au dialogue. D’un côté des partisans d’une liberté d’expression sans limite et du droit au blasphème ciblent des milliards de musulmans dans le monde. De l’autre, des personnes se sentant agressées dans leur foi et qui finissent par céder à la colère en passant à une vengeance aveugle, prétendant rendre justice pour tous les musulmans.
Deux libertés brandies pour l’affrontement : liberté d’expression contre liberté de culte. Le choc des deux est extrême et redoutable. Il mène à une escalade, un engrenage d’atrocité et de vengeance de plus en plus difficile à stopper. Que ne ressurgisse pas un passé inhumain pas si lointain !
Si on veut éviter le pire, il est urgent que du monde entier, de toutes origines, toutes cultures, et de toutes religions, des représentants acceptent de se retrouver pour une conférence internationale sur le vivre-ensemble. Que chacun ait sa voix et puisse s’exprimer. Pour renouer avec le dialogue, amorcer la conciliation. Pour faire valoir les points communs plutôt que les divergences. Pour déterminer comment la liberté des uns peut s’exprimer sans porter atteinte à la dignité et à l’honneur de l’Autre.
Quel monde voulons-nous ?
Celui de la haine et de la violence, ou celui du respect mutuel et de la responsabilité ?
Je le dis à mes amis occidentaux : condamner la violence et les meurtres est une chose, accepter de reconnaître les causes et tenter de régler le problème en est une autre. Condamner la violence ne suffira pas à ramener la paix dans les cœurs et dans les foyers. Se replier sur ses certitudes et élever des murs pour se protéger des autres est irréaliste.
Il est nécessaire d’avoir la volonté de mettre sur la table tous les différents d’origine religieuse qui gangrènent la gestion politique du monde.
Il faut initier une concertation internationale d’une ampleur inédite pour éteindre l’incendie. Je propose que les chefs d’Etat du monde entier se réunissent aux côtés des principales figures religieuses de toutes confessions, pour crever l’abcès des non-dits et créer les conditions du vivre-ensemble. Nous devons définir ce qui est acceptable par tous dans le respect de la liberté d’expression et du droit au respect de la religion d’autrui. Pour mettre un terme aux tueries et aux représailles, aux provocations et aux insultes qui n’apportent que division et haine.
Ecoutons-nous et respectons-nous, pour rétablir un cercle vertueux de communication et de compréhension.
La liberté d’expression a un prix terrible quand elle est perçue chez l’autre comme un manque de respect et une atteinte profonde à l’honneur. Les incompréhensions ont des conséquences imprévisibles et imparables.
L’humanité a bien des défis économiques à relever et bien des désastres naturels auxquels faire face. Que les mots et les images qui circulent maintenant partout n’en créent pas davantage.
Aliou Boubacar Diallo
Président d’honneur de l’ADP-Maliba
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