L’Alliance pour la Démocratie au Mali-Parti africain pour la Solidarité et la Justice (Adema-PASJ) a organisé, jeudi dernier à Bamako, une conférence débat entre les politiques et les universitaires sur les grandes questions de la nation. Le débat a porté sur la constitution de février 1992, la Charte de la Transition, la nouvelle loi électorale et le projet de la nouvelle Constitution. La classe politique était représentée par les vice-présidents de l’Adema-PASJ, Me Kassoum Tapo et Makan Moussa Sissoko. Pour les universitaires, il y avait les constitutionnalistes Pr. Cheick Hamallah Touré et Dr. Mamadou Konaté.
C’est sous la modération du journaliste Alexis Kalambry que le grand débat s’est tenu à la Maison de la Presse. Un débat qui a permis à des hommes politiques et ceux de l’université de s’affronter sur des questions cruciales de la vie de la nation au moment où le pays s’aventure dans des grandes réformes pour sa refondation. A ce jour, une commission de rédaction de la nouvelle constitution a déjà été mise en place et une nouvelle loi électorale promulguée est en vigueur. D’autres réformes sont envisagées.
Sur les thèmes débattus, les deux écoles (politiques et universitaires), étaient unanimes sur la réussite de la nouvelle loi électorale par rapport à son avant-projet déposé devant le Conseil national de Transition (CNT). Elles ont toutes les deux félicité le CNT pour les amendements apportés sur l’avant-projet. « Elle est acceptable, ladite loi », ont-ils affirmé. Par contre, ils n’ont pas pu se mettre d’accord sur les réformes politiques et institutionnelles. Pour les politiques de l’Adema-PASJ, il suffit d’aller à des réformes minima, pas en profondeur, pour organiser les élections afin de permettre un retour à l’ordre constitutionnel.
Selon l’avocat à la Cour, Me Kassoum Tapo, quatre grands points sont à réviser pour permettre d’avoir une constitution prompte à une meilleure sortie de la transition. Il cite : « La seconde chambre, le sénat », pour permettre une bonne gouvernance administrative et territoriale, « La Cour des Comptes », pour se conformer aux exigences de la Cedeao, « certaines modifications électorales et une amnistie constitutionnelle pour les actions qui ont amené à la transition ». La même thèse a été soutenue par le constitutionnaliste Makan Moussa Sissoko de l’Adema-PASJ.
Pour la rédaction d’une nouvelle Constitution, Me Tapo a fortement mis en garde, car selon lui, une nouvelle constitution amène obligatoirement à une IVe République. Ce qui, à en croire Me Tapo, n’est ni opportun ni nécessaire pour le moment. « Une IVe République doit obligatoirement changer certaines natures du régime politique », insiste-t-il, avant de signaler qu’il ne voit aucune opportunité de changement de régime. Il faut faire attention pour ne pas amener quelque chose que l’on ne connaît pas avec une nouvelle constitution, s’est inquiété l’avocat. « On ne change pas de République comme ça », conclut-il.
Pendant deux heures d’horloge, le débat a été houleux entre politiques et universitaires sur plusieurs questions de droit public et constitutionnel. Les quatre conférenciers sont tous hommes de droit, avocat ou doctrinaire. Les politiques ont alerté sur les risques de réformes en profondeur et ont invité à une simple révision de la constitution afin d’inclure les points nécessaires aujourd’hui pour une issue heureuse à la Transition. Tandis que les deux universitaires, qui prônent la légitimité à la légalité contrairement aux politiques, acceptent d’aller à une refondation en profondeur.
La conférence débat a été un exercice démocratique salué par le Secrétaire général de l’Adema-PASJ, Yaya Sangaré et le président de la jeunesse du parti, Mamadou Cherif Diarra. « Il faut que le Président de la Transition nous dise clairement si la constitution va être révisée ou si c’est une nouvelle constitution qui sera rédigée. Pour le moment rien n’est clair », a soulevé le président des jeunes du parti.
« Il faudrait un autre arrangement politique avec toute la classe politique pour apporter les réformes nécessaires afin d’aller à des élections et un retour définitif à l’ordre constitutionnel », ont conclu les deux hommes politiques.
Koureichy Cissé
Source: Mali Tribune