Élu pour une nouvelle fois, avant-hier, au Togo, le jeune président est arrivé au pouvoir en 2005, dans le cadre d’une dévolution du pouvoir au nom de la légitimité familiale. Il est, en effet, le fils du dinosaure Gnassingbé Eyadema, lui-même incrusté au pouvoir plus de 33 ans. A moins de vouloir attendre le prochain passage de témoin à son fils qui n’est pas encore né, on comprend mal l’amour immodéré de Faure pour le pouvoir. Ce quatrième mandat, qui fait des émules ailleurs, n’est-il pas le mandat de trop ?
Élu ou mal élu, Faure a fait des émules parmi certains de ses pairs africains, comme Pierre Nkurunziza (2005/2020) au Burundi, Paul Kagame au Rwanda (2000/2020), luimême s’étant inspiré de son père, Eyadema (1967/ 2005) et de ses amis d’Afrique centrale Omar Bongo (1967/2009), Paul Biya (1982/2020), Denis Sassou Nguesso ( 1979/ 1992 et 1997/2020), Teodoro Obiang Nguema (1979/2020) etc.
Aujourd’hui on compte parmi ceux qui veulent l’imiter Alpha Condé de Guinée. Le 10 février dernier, en marge du sommet de l’Union Africaine à AddisAbeba, Alpha Condé, dans une interview accordée à France 24 /RFI, a laissé entendre qu’il briguerait un troisième mandat après une révision couplée au référendum prévu le 1er mars prochain.
Hasard ou calcul, Addis-Abeba est le siège historique de l’Union Africaine. Sauf qu’à bien y réfléchir, le Togo n’est pas la Guinée et Faure n’est pas Condé, le premier, ne l’oublions pas, à l’âge du fils du second et n’a pas un parcours historique d’opposant.
Quant à la Guinée de Sékou Touré, après avoir dit non à la France et opté pour l’indépendance, elle a lutté farouchement pour conserver son indépendance en façonnant le Guinéen d’aujourd’hui.
Alors qu’est- ce qui peut bien pousser le jeune Gnassingbé et le vieux Condé à vouloir autant de mandats ?
La peur du lendemain, incontestablement liée aux excès du pouvoir, le goût immodéré du pouvoir, l’âge justement, avec l’absence de repères solides pour l’un et qui frôle la sénilité chez le second. S’y ajoutent les voix des thuriféraires et des affidés du régime, le manque de réaction de l’Union Africaine et de la CEDEAO qui, comme les policiers, interviennent presque toujours après les faits (le médecin après la mort en quelque sorte). Ce qui les rend moins crédibles, car pompiers pyromanes, ils allument les feux par leur inaction et interviennent après pour l’éteindre, avec des méthodes irréfléchies et inadaptées, comme en Gambie, comme en Guinée Bissau et au Mali.
La Guinée en ébullition compte ses morts et ses blessés parmi les plus jeunes, victimes de la soldatesque, alors que la communauté internationale s’éloigne d’elle et lui retire, une à une, sa caution aux élections couplées au référendum du 1er mars. Déjà, une voix discordante s’est faite entendre et s’ajoute à celles des opposants auxdites élections, à ce qu’il paraît, et pas la moindre, celle des sous-officiers de l’armée guinéenne pour dénoncer les violences faites dans les quartiers et s’en désolidariser.
Un signe avant-coureur d’un frémissement de l’armée, difficile de ne pas y croire tant le saut dans l’inconnu d’Alpha Condé s’inscrit dans la démesure.
Source : l’Indépendant