Onze jours après la démission du Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga et son équipe (18 avril) le Mali est toujours sans gouvernement. Désigné par IBK dans la fonction primatoriale trois jours plus tard (21 avril) pour pourvoir à cette tâche « dans l’esprit des conclusions des consultations » que le président a eues avec les leaders des forces politiques – un gouvernement de large ouverture – Dr Boubou Cissé piétine. Ou, pour dire les choses sans ambigüité, il est au bord de l’échec. Et, paradoxalement, c’est lui-même qui en serait la cause.
Dans leur majorité, les chefs des partis politiques et regroupements des partis de l’opposition (FSD et CoFoP) avec qui le président s’est entretenu, dans les 72 heures écoulées entre le départ de Soumeylou Boubèye Maïga et l’arrivée de son successeur, ont étalé sur la place publique leur déception de ce que le locataire de Koulouba ne les a » ni consultés, ni encore moins associés au choix du Premier ministre« . Soumaïla Cissé, Hamadoun Amion Guindo, Général Moussa Sinko Coulibaly, Modibo Sidibé, Cheick Modibo Diarra pour ne citer que quelques unes des figures les plus marquantes de la scène politique malienne l’ont tous dit, chacun avec son style et dans les mots reflétant son degré de colère.
En agissant de la sorte, IBK a montré le peu de cas qu’il fait de la toute première disposition du projet d’ » accord politique de partage de responsabilités » fruit de ses consultations avec les chefs de l’opposition.
Elle est ainsi libellée : » Le partage de responsabilités devrait permettre à toutes les sensibilités significatives de notre société de réaliser l’union sacrée et d’endosser collectivement la difficile gestion de sortie de la crise multidimentionnelle que traverse le Mali. Le choix judicieux des hommes capables d’assumer ces missions est la condition sine qua non du succès. A cette fin, il faudrait définir et identifier ensemble un Premier ministre, Chef du gouvernement, à même de faire face aux défis du moment« .
Le non respect de cette disposition capitale, auquel est venu s’ajouter le communiqué du 22 avril de la présidence de la République tendant à faire croire » à tort » que la nomination du Premier ministre a procédé d’une démarche consensuelle font redouter à l’URD » une aventure à plusieurs inconnues« . Pour éviter que cette formation politique ne s’y fourvoit et que » les acquis obtenus grâce aux efforts de tous » ne se perdent, son 1er vice-président, Pr Salikou Sanogo recommande dans une lettre adressée à son président et tout aussi président du FSD, Soumaïla Cissé, de lier toute participation à un gouvernement à » un accord et une feuille de route solides et contraignants« .
Il est fort probable que cette ligne de conduite soit adoptée par toutes les forces de l’opposition qui se sentent concernées par la mise en place du gouvernement dit de large ouverture. Et le président IBK n’aurait d’autre option que de s’y plier sous peine de compromettre la dynamique de pacification politique enclenchée et de replonger le pays dans un nouveau cycle de violence et d’instabilité aux conséquences imprévisibles.
Toute la question est de savoir si les adversaires d’IBK, auxquels le rapport des forces est nettement favorable dans l’épreuve en cours, ne le mettront à profit pour contraindre le chef de l’Etat à répudier son Premier ministre fraîchement nommé aux fins de lui imposer Modibo Sidibé. L’ancien Premier ministre sous ATT et actuel président des Fare Ankawili jouit largement des suffrages de la classe politique et de la société civile en tant que personnalité possédant le meilleur profil pour débarrasser le Mali de l’hydre de la corruption, renflouer le trésor public et permettre à l’Etat de mieux faire face aux revendications salariales et au mieux-être des populations.
Il est réputé aussi pour être entier sur les questions relatives à l’intégrité du territoire national, à l’unité nationale et à l’autorité de l’Etat. Ce sont, assurément, des atouts déterminants dans le contexte d’effritement actuel.
Saouti Haïdara
Source: l’Indépendant