Deux assauts simultanés commandés directement par François Hollande ont mis fin aux prises d’otages à Dammartin-en-Goële (40 km de Paris) et dans l’est parisien, dans une épicerie casher de la porte de Vincennes. Dans la première, les deux frères Kouachi, auteurs présumés du massacre deCharlie Hebdo, ont été tués lors de l’assaut. Dans la seconde, Amedy Coulibaly, auteur présumé du meurtre d’une policière, a lui aussi été tué au cours de l’intervention des forces de l’ordre. Retour sur le profil de ces trois hommes et sur leurs liens désormais avérés.
Les deux frères d’abord. Il y a Saïd, l’aîné, 34 ans, et Chérif, le cadet, 32 ans. Orphelins très jeunes de leurs parents originaires d’Algérie, ils sont élevés en foyer dans le nord-est parisien. Absolument pas religieux, ils ont plus le profil de petits délinquants que d’islamistes. Au début des années 2000, Chérif Kouachi découvre l’islam auprès d’un prédicateur du XIXe arrondissement, Farid Ben Yetou.
Parcours chaotique
Début 2005, il est arrêté à l’aéroport, juste avant de décoller pour Damas, pour son implication dans la filière des Buttes-Chaumont, qui visait à recruter de jeunes Français et à les envoyer en Irak pour mener le jihad, dans les années 2000, après la chute de Saddam Hussein, bien avant le jihad en Syrie. Il écope en 2008 d’une peine de trois ans de prison, dont la moitié avec sursis. La filière des Buttes-Chaumont est alors démantelée par les services de renseignement.
Saïd a été lui aussi un temps inquiété avant d’être relâché. Chérif, indique son avocat d’alors Vincent Olivier, n’avait rien d’un combattant. Il était surtout choqué par l’intervention américaine en Irak et les exactions commises par les soldats américains à la prison d’Abou Ghraib. Chérif Kouachi se serait pour sa part radicalisé en prison.
En 2010, après sa libération, Chérif se distingue à nouveau. Il est soupçonné d’avoir voulu aider à faire évader Smaïn Ait Ali Belkacem de la prison de Clairvaux. Il s’agit d’un autre jihadiste condamné en 2002 à une peine de prison à perpétuité pour sa participation àl’attentat de la station RER Saint-Michel, en octobre 1995.
C’est là qu’il y a un lien avec l’homme abattu porte de Vincennes, Amedy Coulibaly, 32 ans. Un lien aujourd’hui avéré. Si le nom de Chérif Kouachi est cité dans ce dossier de la tentative d’évasion, il bénéficiera d’un non-lieu, alors qu’Amedy Coulibaly a été condamné à quatre ans d’incarcération pour sa participation.
Radicalisation
Amedy Coulibaly s’est réclamé avant sa mort vendredi du groupe Etat islamique, reprochant à la France de s’y attaquée. Il a entamé un périple de délinquant en 2000, avant de basculer dans l’islam radical en prison. En 2001, il est à nouveau condamné pour vol aggravé et n’apparaît dans un dossier d’islam radical qu’en 2010 avec le projet d’évasion de Smaïn Aït Ali Belkacem. Condamné à cinq ans de prison, il a fini de purger sa peine en mai 2014. En 2009, il se pourrait d’ailleurs qu’il ait été reçu, avec environ 500 jeunes en formation, par le président Sarkozy à l’Elysée, comme l’explique le journal Le Parisien.
Contacté par BFMTV pendant sa prise d’otages dans l’épicerie casher porte de Vincennes, Coulibaly a assuré qu’il s’était « synchronisé » avec les assaillants de Charlie Hebdo : « Eux, Charlie Hebdo, moi, les policiers ». Hayat Boumedienne, 26 ans, la jeune femme dont la police a diffusé vendredi un avis de recherche avec celui d’Amedy Coulibaly, était présentée lors de l’enquête sur le projet d’évasion comme sa compagne, épousée religieusement et non civilement. Elle est actuellement dans la nature.
Jihad au Yémen
Si Chérif Kouachi était le plus connu des deux frères par les services français, Saïd était lui connu des services yéménites. Il a fait un séjour dans le pays en 2011, et notamment dans la ville Shihr, connue pour ses centres d’enseignement du salafisme. Les services yéménites l’avaient signalé aux services américains .
Son frère est-il lui aussi allé au Yémen ? C’est en tout cas ce qu’a déclaré au téléphone à BFMTV celui qui s’est présenté comme Chérif Kouachi, pendant la prise d’otages à Dammartin-en-Goële. Information confirmée vendredi soir tard dans la soirée par le procureur de Paris François Molins, lors d’une conférence de presse au palais de justice de Paris. Le tueur de Charlie Hebdo a également affirmé avoir été envoyé et financé par al-Qaïda au Yémen, et plus précisément par l’islamiste américano-yéménite Anwar al-Awlaki, tué au Yémen lors d’une frappe d’un drone américain le 30 septembre 2011.
Un responsable américain a d’ailleurs confirmé jeudi 8 janvier que les deux frères Kouachi « étaient sur leur liste de surveillance depuis des années ». Ils étaient notamment interdits de vols vers ou depuis les Etats-Unis.
Source: rfi.fr