Le turban ou chèche est une bande de tissu enroulée autour de la tête de sorte à couvrir la bouche, le nez, les yeux et les oreilles. Sa longueur varie entre 4 à 8 mètres suivant les communautés et le milieu. Plus qu’un complément vestimentaire, le turban protège contre la chaleur, le froid, la poussière, les tempêtes de sable. Il peut servir aussi de couverture, de tapis de prière, de corde pour attacher et même d’arme pour se défendre.
Cette bande d’étoffe fait partie du code vestimentaire des hommes à Tombouctou. Dans certaines tribus, impossible d’imaginer un homme d’âge mur dans les lieux publics sans son chèche.
Ce complément vestimentaire peut être aussi un atout formidable dans le cadre de la prévention contre le Covid-19. Parmi les mesures barrières contre la maladie, il est demandé à tout le monde de se couvrir le nez et la bouche. Avec le turban, on fait mieux que se couvrir le nez et la bouche. Que pensent donc les praticiens de l’efficacité du turban dans le cadre de la prévention contre le Covid-19 ?
Pour le directeur régional de la santé de Tombouctou, Dr Moussa Hamma Sankaré, le turban est efficace contre le coronavirus. Le praticien pense que même s’il n’est pas cité parmi les mesures barrières contre cette pandémie, le port du turban constitue une protection. Tout comme le hijab des femmes. Le turban permet de stopper les postillons qui s’échappent de la bouche lorsque l’on parle. D’où son efficacité pour empêcher la contamination lorsque vous êtes en face d’un malade.
Dr Moussa Hamma Sankaré conseille aux hommes d’avoir au moins 3 turbans et les femmes aussi 3 hijabs. «Le turban qui est porté aujourd’hui doit être remplacé le lendemain par un autre pour donner le temps de laver celui qui a été utilisé», explique le médecin.
Une raison supplémentaire donc pour se mettre au turban. Déjà, dans le milieu nomade en général, le turban est un symbole de maturité, de responsabilité, d’engagement au sein de la société. Le côté esthétique est très important. Le chèche confère du charme et du respect à celui l’arbore.
À Tombouctou, les origines du turban remontent au XVè siècle à l’Université de Sankoré, l’une des plus anciennes du monde. Il servait de symbole pour couronner les études des apprenants. Il était donc considéré comme un second diplôme. Il peut être conféré aussi à une personnalité comme une espèce de diplôme honoris causa.
Dans la tradition de la Cité mystérieuse, on rencontre plusieurs types de turban. Le turban-diplôme. Celui-ci est délivré à l’occasion d’une cérémonie festive.
Il est attaché à l’intérieur de la mosquée de Sankoré et le récipiendaire est conduit à Badjindé où les oulémas détachent le turban.
Des questions lui sont alors posées pour s’assurer qu’il est habilité à recevoir le turban. C’est lorsque les réponses sont satisfaisantes que le turban est remis en place par les sages en signe d’agrément.
Le turban est aussi remis au jeune en âge de se marier comme signe distinctif de responsabilité et d’acceptation dans le cercle des sages. Le chèche est encore attaché au cadi (juge islamique), à l’imam (celui qui conduit la prière) et au chef coutumier. À toutes les cérémonies, il est conféré par un sage qu’on appelle le cheikh des cheikhs.
À Tombouctou, le turban est porté par les Sonrhaï, les Arabes, les Tamasheq et les Peuls. De nos jours, même les gens qui séjournent dans le Nord du pays prennent goût à attacher le turban. Il n’est pas rare de voir les éléments des FAMa arborer des turbans lorsqu’ils sont en patrouille ou en mission. Le turban protège bien contre la rudesse du climat dans les zones désertiques.
En période de chaleur, le thermomètre affiche des niveaux hallucinants au-delà de 45°. Pendant la période du froid, les températures deviennent glaciales. Le chèche constitue une excellente protection à la fois contre la chaleur et le froid. Sans parler de la poussière qui est en suspension, presqu’en permanence dans les contrées désertiques.
Moulaye SAYAH
Amap-Tombouctou
Source : L’ESSOR