Le ministre des Droits de l’homme et de la Réforme de l’Etat, Me Kassoum Tapo avait été saisi par la Minusma, la CMA et la Plateforme sur des cas de violations des droits de l’homme documentés dans les localités de Douentza, Mopti, Badiangara. La CMA et Plateforme alléguaient des cas d’enlèvements et de tortures exercés sur leurs éléments qui seraient dans les commissariats ou à la Sécurité d’Etat. Un rapport de Human Right Watch est tombé dans cette foulée, dans lequel de graves accusations sont portées contre l’armée malienne. Le rapport de HRW parle même de charniers qui existeraient dans les cercles de Douentza, Badiangara, et Mopti. Mais ce que Human Rights Watch n’a pas fait dans l’élaboration de son rapport, c’est de recueillir la version du gouvernement malien ; le principe du contradictoire.
C’est face à ces pressantes interpellations que le ministre Tapo a conduit une mission de 72 h dans la région. Mission entamée le lendemain du 22 septembre. Le premier hic a été le fait que la CMA, pourtant accusatrice, n’a pas voulu participer à la mission, prétextant que la logistique, à savoir les véhicules, ne lui convient pas. Elle a avancé qu’une telle mission doit s’effectuer dans des avions. La Minusma quant à elle n’a pas voulu se rendre à Douentza et Badiangara. Des localités qu’elle a même classées zones rouges. Elle s’est contentée de l’étape de Mopti. La Plateforme a effectué le voyage avec le ministre. La mission ministérielle a été effectuée en compagnie du nouveau gouverneur de Mopti, et des défenseurs des droits de l’homme au Mali.
A Douentza, une séance de travail a eu lieu avec les autorités des localités mises en cause dans le rapport de Human Rights Watch. Coup de théâtre, ces autorités ont dit être plutôt victimes de la terreur des jihadistes, et non de l’armée malienne. La gendarmerie confirme n’avoir pas arrêté quelqu’un, et la prison des gendarmes, qui a été visitée, ne contient rien. L’imam et le chef de village démentent les exactions et disent n’avoir jamais vu d’enquêteurs de Human Rights Watch dans leur localité.
A Badiangara, la délégation n’a vu que deux détenus de droits communs. A Mopti où la Minusma a pris part aux visites, personnes n’était là. Les conditions de détention à Sévaré y sont meilleures. A Douentza comme à Badiangara, ce sont les gendarmes qui ont plutôt été attaqués et il y a eu des morts. Les notabilités ont dit qu’il n’y a pas de problème de sécurité particulier à part les attaques jihadistes. Au camp militaire de Sévaré, il a été indiqué que depuis 2 ans, aucune mission n’a été organisée sans la participation de la gendarmerie. Et chaque personne arrêtée est remise à celle-ci qui la conduit aussitôt à Bamako. Une visite a été rendue au QG du G5 Sahel à Sévaré.
« Nous n’avons eu le moindre début de soupçon de violations, d’exactions, ou de charniers. Il m’est difficile après ces constats de dire qu’on est dans un pays de non droit, de torture », a indiqué le ministre Tapo au cours d’une conférence de presse hier dans son département.
Alors, comment le rapport de cette organisation internationale des droits de l’homme a-t-il été élaboré ? Pour le ministre, ce sont des rapports non fiables, conçus de Génève ou de Paris sur la base de coups de fil.
Dans son rapport, Human Right Watch mentionne que des cas de violences sur nos forces armées ont été relevés et seront révélées plus tard. Ce qui irrite le ministre. « Cela n’est pas sérieux. Le gouverne ne toléra pas et n’acceptera pas non plus que des attaques sans fondements soient portées contre nos forces armées, au moment où celles-ci sont victimes chaque jour de lâches attaques ».
Une mission sera conduite à Génève par le gouvernement malien avec un rapport interministériel pour démentir les allégations contenues dans celui de Human Rights Watch. « Nous n’avons pas d’autre choix que de répondre à ces accusations au plan international et rétablir la vérité. Le Premier ministre du Mali (Abdoulaye Idrissa Maïga NDLR) est un militant connu des droits de l’homme. Je ne serai complice de personne et nous n’avons pas de leçon à recevoir de quelqu’un. La création de ce département est une volonté politique affirmée des plus hautes autorités du Mali. Personne n’a contraint le président IBK à créer ce département. Sans aucune preuve, on attente à l’honneur de nos soldats. Pourtant, souvent l’armée arrête des présumés terroristes, la justice les libère pour faute de preuves ».
La Minusma a été la première à saisir le ministre Tapo sur 73 cas documentés de violations des droits à Douentza et Badiangara, alors qu’elle-même les a classées zones rouges. Comment elle-t-elle parvenue à y mener ses enquêtes ? Le hic, c’est que jusque-là le ministre Tapo n’a pas reçu le fameux rapport de la représentation onusienne au Mali. « Ou elle m’amène ledit rapport, ou je refuse de les recevoir désormais ».
Abdoulaye Diakité