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Présidentielle : Chronologie d’une élection présidentielle mouvementée

Suite à la convocation du collège électoral par le Décret n°2018-0398/P-RM du 27 avril 2018 et à l’effet de procéder à l’élection du président de la République (scrutin du 29 juillet 2018), le dépôt des candidatures en vue de l’élection présidentielle débute le  30 mai 2018 à partir de 00 heure et prend fin le 28 juin 2018 à minuit”. Retour sur un scrutin particulièrement mouvementé.

A la date du 28 juin 2018, ils sont 30 prétendants à faire acte de candidature auprès de la Cour constitutionnelle, instance habilitée à statuer sur les dossiers de candidatures. Le 30 juin 2018, sur trente dossiers de candidatures déposés, dix-sept ont été validés par la Cour constitutionnelle. Mais la  liste des candidats est revue à la hausse le 4 juillet ; date de la proclamation de la liste définitive des candidats à l’élection présidentielle par la Cour constitutionnelle. Entretemps, les candidats recalés, essentiellement pour dossier incomplet ont introduit des recours à la cour. Le 4 juillet, la Cour constitutionnelle proclame donc la liste définitive de 24 candidats à la présidentielle. L’arrêt  tombe à la mi-journée. Sur 32 dossiers de candidature, 24 ont été validés et 8 rejetés. Selon la présidente de la Cour ConstitutionnelleManassa Dagnoko, il s’agit des candidats dont les dossiers ont été déclarés recevables par le Conseil constitutionnel et qui répondent à toutes les exigences légales et réglementaires de validité. Parmi eux figurent une seule femme, Mme Kanté Djénéba Ndiaye mais aussi le président sortant Ibrahim Boubacar Keita. Sept prétendants dont les candidatures avaient été invalidées par la Cour faute de soutien valide ou authentique ont finalement été retenus. Il s’agit de Choguel Kokala MaïgaHarouna SankaréCheick Mohamed Abdoulaye Souad dit Modibo DiarraNiankoro Yéah SamakéMamadou TraoréHamadoun Touré et Mountaga Tall. Selon la Cour constitutionnelle, ces candidats ont pu régulariser leurs dossiers et dans le délai. Par contre, huit autres candidatures ont été rejetées par la Cour constitutionnelle pour des raisons liées essentiellement au parrainage. Cette décision de la cour est irrévocable, selon sa présidente.

Le samedi 7 juillet 2018 débute officiellement la campagne pour l’élection présidentielle. L’un des temps forts de cette campagne demeure les meetings de lancement des deux principaux candidats, le président sortant Ibrahim Boubacar Keïta, et le principal opposant Soumaïla Cissé. Le dimanche 8 juillet, le président sortant Ibrahim Boubacar Keita lance sa campagne  dans un Stade du 26 Mars plein à craquer. Au cours de cette rencontre, IBK s’est dit satisfait de la mobilisation et promet de renforcer ses actions dans les domaines des capacités des forces armées maliennes, de l’agriculture et surtout des infrastructures routières. Au même moment sur l’autre rive de Bamako,  le chef fil de l’opposition, Soumaïla Cissé, tient  son premier meeting de campagne devant près de 50 000 personnes réunies au Boulevard de l’Indépendance. Le président Cissé trace les priorités de son programme « Ensemble, restaurons l’espoir ». Ce programme repose sur cinq piliers : la paix et la sécurité par le rétablissement de l’autorité de l’Etat, l’instauration d’un véritable dialogue entre tous les Maliens, la réforme de l’État pour qu’il soit au service des citoyens, la promotion des femmes et des jeunes et la construction d’une économie performante et solidaire

Cette campagne du premier tour aura été surtout marquée par de fortes suspicions de fraude. En effet,  à moins d’une semaine du premier tour de l’élection, le directoire de campagne de Soumaïla Cissé dénonce l’existence d’un fichier électoral « parallèle » différent de celui audité par des experts de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) en avril dernier.

Selon Tiébilé Dramé, le directeur de campagne de Cissé, ce fichier comporterait un potentiel de plus de 1,2 millions de voix fictives, sur environ 8 millions d’électeurs inscrits, l’équipe de Soumaïla Cissé est vite rejoint par 19 autres candidats à la présidentielle, sur les 24,  qui s’interrogent sur la fiabilité du document. Dans un communiqué conjoint, les candidats demandent une rencontre avec le Premier ministre. Objectif : lever toutes les zones d’ombre sur ce fichier avant d’aller aux élections.

Pour être rassurés, les partis contestataires demandent une rencontre de haut niveau avec le Premier ministre pour, disent-ils, « examiner les conditions politiques et techniques d’un scrutin crédible le 29 juillet 2018 ». Ils convient également les membres de la CENI, et la communauté internationale à cette réunion.

En plus, les 20 candidats ou leurs mandataires exigent que « les autorités judiciaires compétentes se saisissent du dossier pour situer les responsabilités ». Finalement à la veille du scrutin du 29 juillet, un accord sous la houlette de la communauté internationale est trouvé autour du « fichier électoral et des procurations » entre le gouvernement et les 20 candidats.

 Un scrutin sur fond d’insécurité

Dimanche 29 juillet 2018, le premier tour de la présidentielle se déroule. Si les opérations de vote se déroulent dans le calme dans la capitale, la situation est plus difficile dans le centre du pays, en particulier dans la région de Mopti où l’insécurité chronique a un impact direct sur le déroulement du scrutin. Des incidents ont eu lieu dans des communes du Nord et du centre du pays où le vote n’a pas pu se tenir. Le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation annonce via un communiqué que 644 bureaux au total (sur 21 863) n’avaient pas pu ouvrir suite à « des attaques à main armée et autres violences ».

Avant même la proclamation des résultats officiels au premier tour de la présidentielle, une vingtaine de candidats, parmi lesquels les principaux challengers du président sortant Ibrahim Boubacar Keïta, dénoncent, le  mercredi 1 aout 2018, les résultats du scrutin qu’ils estiment « émaillé de multiples anomalies ». Parmi les « graves anomalies » que les challengers du président sortant dénoncent en chœur : « La corruption et l’achat du vote des électeurs », et « l’utilisation abusive des moyens de l’État » au service du candidat IBK.

Le 2 août 2018, le ministère de l’administration territoriale et de la décentralisation, proclame  les résultats du premier tour de la présidentielle. Il y aura un second tour  le 12 aout entre le président sortant Ibrahim Boubacar Keita et le chef de file de l’opposition Soumaïla Cissé qui obtient 17,80% des voix. Le taux de participation est de 43,06%.

Le 8 aout 2018, la cour constitutionnelle valide le premier tour de l’élection présidentielle avec des chiffres quasi identiques aux scores du ministère de l’administration territoriale et rejette tous les recours de l’opposition. Au lendemain de la décision de la cour constitutionnelle, un collectif de 18 candidats organise un grand meeting au Palais de la Culture. Occasion pour eux d’exiger plus de transparence et de dénoncer la mascarade électorale organisée par le pouvoir.

Echec au Takokélen

En 2018, le chef de l’Etat sortant, Ibrahim Boubacar Keita et ses partisans caressaient l’espoir de faire comme Alpha O Konaré et Amadou Toumani Touré. Mais, ce rêve de IBK est brisé : il est contraint à un second tour. En effet,  le président sortant sera contraint  à un second tour    Ibrahim Boubacar Keïta a obtenu 41,42% des suffrages exprimés, Soumaïla Cissé est pour sa part crédité de 17,80%, selon les chiffres annoncées, par le ministre en charge de l’Administration territoriale. Ces résultats sont en somme un désaveu cinglant pour le président Keïta. Ainsi, IBK devient le 1erprésident sortant de notre histoire démocratique à passer par une seconde manche pour assurer sa réélection. Pour celui qui avait obtenu 77 % des voix en 2013.

Le groupe des dix-huit se fissure

Après la proclamation des résultats du premier tour,  l’unité de l’opposition vole en éclats.  En effet, la première à  briser l’alliance est l’unique femme candidate à l’élection présidentielle. Mme N’Diaye Djénéba N’Diaye. Elle sera rejoint par le candidat du Mouvement Mali Kanu (MMK), Modibo Koné. Le revirement de ce dernier fut très surprenant. Et pour cause : l’ancien PDG de la Compagnie Malienne de Développement des Textiles (CMDT), Modibo Koné s’était clairement aligné dans le camp de l’opposition pendant toute la campagne. Ensuite c’est le tour de la Codem  de  Housseini Amion Guido d’appeler à voter pour le candidat Ibrahim Boubacar KEITA au second tour de l’élection présidentielle. D’autres membres du collectif adoptent une autre stratégie. Celle de ne pas donner de consigne de vote : Aliou Diallo,  Mohamed Ali Bathily, Oumar Mariko, Hamadoun Touré, Adama Kané, Mamadou Igor Diarra…

La classe politique malienne venait (encore) de démontrer toute son immaturité et  les jeux d’intérêts qui caractérisent les politiques maliennes

 

Un second tour marqué par la fraude et la violence

Le dimanche 12 août 2018, les électeurs  participent sans enthousiasme au second tour de la présidentielle. Un scrutin marqué par une faible mobilisation et des violences au cours desquelles un agent électoral est tué  à Tombouctou. Un scrutin surtout marqué par des accusations de fraude. Ainsi avant même la publication des résultats, le candidat de l’opposition, Soumaïla Cissé,  rejette lundi 13 août 2018 à l’avance les résultats du second tour de la présidentielle, entachés selon lui de fraudes, et appelle la population à “se lever”. “D’ores et déjà, nous rejetons les résultats”,  déclare au QG de son parti Soumaïla Cissé… “J’en appelle à tous les Maliens à se lever (…) Nous n’accepterons pas la dictature de la fraude”, a-t-il ajouté.

“La fraude, elle est avérée, c’est pour ça qu’il y a des résultats que nous n’accepterons pas. Ceux qui ont fraudé, c’est ceux qui embrasent le pays”, a ensuite dit à la presse Soumaïla Cissé, qui a été crédité de 17,78% des voix lors du premier tour le 29 juillet, contre près de 42% au président sortant “. Soumaïla Cissé rejette aussi  les résultats définitifs annoncés  le lundi  21 août  2018 par la cour constitutionnelle, selon lesquels, IBK, 73 ans, a obtenu 67,16 % des suffrages, contre 32,84 % à Soumaïla Cissé. « Je rejette catégoriquement et sans équivoque les résultats proclamés par la Cour constitutionnelle. Par conséquent, je ne reconnais pas élu le président déclaré par elle », a déclaré Soumaïla Cissé, le 23 août dernier, lors d’une conférence de presse. « Cette institution s’est discréditée en se constituant prisonnière volontaire d’un régime autocratique », a accusé Soumaïla Cissé, qui, à la présidentielle de 2013, avait rapidement concédé sa défaite face à IBK. Très en verve, Soumaïla Cissé a affirmé faire partie des 18 candidats sur les 24 à l’élection présidentielle malienne à avoir dénoncé « les fraudes massives ». Selon lui, les résultats du scrutin du 12 août sont désormais également contestés par une partie de l’opinion publique.

En tout cas, il « rejette catégoriquement et sans équivoque les résultats proclamés par la Cour constitutionnelle ». Soumaïla Cissé l’affirme : « Je ne céderai pas, en votre nom, à faire établir votre victoire, par tous les moyens légaux, politiques et pacifiques ». En conséquence, il ne reconnaît « pas élu le président déclaré ». Depuis l’opposition a mobilise plusieurs centaines de milliers de personnes  à l’intérieur ainsi qu’à l’extérieur du pays pour réclamer le respect du vote des citoyens.

Mémé Sanogo

Source: L’ Aube

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