Né le 27 mai 1938 à Kayes, Woundioum Sissoko est fonctionnaire à la retraite domicilié à Korofina-Nord. Poursuivi pour faux et usage de faux, abus de confiance et dépossession frauduleuse, Woundioum Sissoko était à la barre des Assises de Bamako le mercredi 29 septembre 2021. Ces faits sont prévus et punis par les articles 282, 102, 104 et 274 du code pénal. Reconnu non coupable des faits, il a été acquitté des charges.
Les faits remontent à 1976, plus précisément le 1er novembre. La dame Aminata Nafi Ndiaye, officier de police a bénéficié de deux parcelles n°47 et n°48 A dans la zone du lotissement de Korofina-Nord (zone des officiers).
Ainsi, son époux Woundioum Sissoko a sollicité la lettre d’attribution pour la mise en gage à la Banque de développement du Mali afin d’avoir un prêt. Depuis, elle n’a plus réclamé ladite lettre jusqu’à leur divorce intervenu courant 1987.
A cette époque, Woundioum Sissoko a laissé entendre que la lettre est toujours en gage suite à sa convocation chez l’oncle de dame Ndiaye. Courant 2017, la plaignante est revenue à la charge pour réclamer que le titre de propriété de ses parcelles soit mis à sa disposition. En vain.
Face au refus de l’inculpé de remettre ledit titre, la plaignante a fait déposer par les soins de Me Koumaré notaire, une demande au bureau des domaines et du cadastre du district de Bamako qui suite à une réquisition en date du 4 octobre 2017 a répondu : “Il existe dans le dossier archive une double lettre d’attribution S/N du 6 novembre 1976 relative à la parcelle n°CC7/ et 8 au nom de Woundioum Sissoko, Energie du Mali”.
Il est également écrit “Gage autorisation n°31/83 du 23 décembre 1982, convention n°265-1479, BDM du 11 octobre 1982 Bamako 25 avril 1985. Une originale du lettre d’attribution S/N du 1er novembre 1976 relative aux parcelles n°47/48A zone des Officiers du lotissement de Korofina-Nord au nom de Mme Sissoko Nafi Ndiaye DSS 3e arrondissement. Au bas, il est écrit : transfert autorisé au nom de mari Woundioum Sissoko le 1er novembre 1976 : cession gratuite”. Ainsi, les investigations menées au niveau des services des domaines ont permis la découverte d’une lettre antidatée du 14 juillet 1976 par Woundioum Sissoko avec une fausse signature d’Aminata Nafi Ndiaye, autorisant un transfert des dites parcelles à son profit en les transformant en permis d’occuper en date du 18 décembre 2008 mis sous-main de justice au cours de cette procédure.
Interpellé, Woundioum Sissoko a nié les faits tout au long de l’information, disant que son épouse de l’époque, à savoir la plaignante lui a fait don desdites parcelles en autorisant le transfert à son nom sans pouvoir produire aucune pièce ni aucun témoignage en appui de ses allégations lorsque l’on sait qu’en matière immobilière, le don et le transfert ne sauraient se concrétiser sans un écrit dument signé par les parties.
Au début du procès le mercredi 29 septembre 2021, le conseil de la défense a sollicité de la Cour de déclarer l’affaire éteinte parce que le dossier est de 1976, une affaire de parcelle de plus de 40 ans.
Le conseil de la partie civile a indiqué que leur client n’a su qu’en 2017 que l’accusé a transformé les documents à son nom et que c’est à partir de cette année que l’infraction est constituée.
Le vieillard de 83 ans, à savoir Woundioum Sissoko à la barre déclarera ceci : “Ma femme m’a informé un jour qu’elle a reçu une parcelle des autorités militaires et qu’elle souhaite le mettre en mon nom et qu’il faut adresser une correspondance à sa hiérarchie à cet effet. Une autre fois, elle m’a apporté la lettre d’attribution avec mon nom dessus. Ainsi, j’ai commencé à construire ladite parcelle sur fonds propre parce que j’étais dans une maison étatique.
Avant d’avoir la lettre d’attribution en mon nom, je lui ai demandé sa lettre pour la placer en banque afin d’avoir un prêt pour finir la maison. Lorsque j’ai terminé la construction on avait déjà divorcé, mais on avait gardé contact, car on a des enfants”, relatera l’inculpé.
Woundioum Sissoko de continuer en ces termes : “C’est jusqu’en 2017 qu’elle m’a fait appel pour qu’on discute. Et lorsque j’ai été chez elle, elle m’a dit d’aller voir un notaire pour tirer au clair l’affaire de la parcelle. C’est comme ça qu’un jour, un huissier m’a apporté une convocation du Tribunal d’administration. Je n’ai jamais su qu’il y avait deux lettres d’attribution dont une pour elle et une pour moi. J’ai toujours pensé que celle qu’elle a transféré en nom était la seule et l’unique”.
Aminata Nafi Ndiaye a signalé à son tour qu’elle lui faisait confiance comme toutes bonnes épouses. “A cette époque, on n’avait pas le culot de demander une telle chose à sa hiérarchie, il y avait vraiment de la discipline militaire. Je lui ai juste donné mon attribution pour lui permettre d’avoir son prêt, rien de plus et il en a profité pour tout changer et falsifier en imitant ma signature. Moi j’ai même été punie pour lui avoir prêté mon attribution”, a fait savoir la plaignante.
A la question de la Cour pourquoi n’avoir pas réclamé sa lettre plutôt, à savoir juste après leur divorce, dame Ndiaye répondra : “Chaque fois que je lui demandais, il me disait que c’était toujours en gage. Je ne pouvais pas faire autrement, car c’est le père de mes enfants et je n’aurai jamais imaginé un tel acte de sa part”.Après plus de 8 h de débat, la Cour a reconnu non coupable des faits reprochés à l’accusé Woundioum Sissoko et il a été acquitté des charges.
Marie DEMBELE
Source: Aujourd’hui-Mali