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Pourquoi le Saint Coran ne s’adresse-t-il qu’aux hommes ?

« On a dit fort bien que si les triangles faisaient un dieu, ils lui donneraient trois côtés. », Montesquieu, Lettres persanes.

Pourquoi le Coran ne s’adresse-t-il qu’aux hommes ? Cette question est régulièrement posée, à vrai dire par des femmes le plus souvent. Ceci suppose logiquement que si les hommes ne remarquent pas cette supposée particularité, c’est bien qu’en apparence le Coran s’adresserait donc en premier lieu à eux. Cela se comprendrait alors de deux manières :
– Les allocutaires premiers du Coran sont les hommes : le Coran s’adresse à eux parce qu’ils en sont plus dignes ou ont plus de capacités pour cela que les femmes.
– Le masculin domine grammaticalement, comme si le discours coranique était conçu pour être adressé à des hommes.

• La première hypothèse est fondamentalement misogyne, voire machiste et phallocrate. La religion est après tout une affaire d’hommes et les religions monothéistes attestent quasiment toutes de cette prégnance antique laquelle s’explique principalement du fait que pouvoir et religion sont par essence mêlés et, secondairement, du fait des mentalités de leurs dépositaires et gardiens. Si tel était le cas, alors Dieu serait machiste, misogyne et phallocrate !
Cependant, il est connu de tous que le Coran considère les hommes et les femmes comme pleinement égaux. Ce qui est tout aussi sûr, c’est que les premiers exégètes qui ont participé à l’élaboration de l’Islam avaient les mentalités de leurs époques. Bien que de très nombreux écrits et discours réformistes contemporains s’évertuent à promouvoir les femmes en Islam, il reste indéniable que l’Islam est, comme toutes les religions répétons-le, entièrement conçu au service des hommes, et les femmes à leur service.
Toutefois, un point fait chez nous consensus : le Coran est un message universel, or l’Humanité est composée d’hommes et de femmes et, sous peine de contradiction supplémentaire, le Coran étant égalitaire nous l’avons dit, il ne peut de plus être accusé de ne s’adresser qu’à la moitié mâle de l’Humanité. Aussi, est-ce notre lecture du Coran qui nous donne l’impression de ce déséquilibre puisque nous sommes conditionnés, hommes et femmes, par la vision genrée de l’Islam et que nous pensons donc la retrouver lors de notre compréhension du Coran. En d’autres termes, si l’on ne peut reprocher au Coran de n’avoir pas inventé l’écriture inclusive, il est possible de constater que l’Islam a imposé une lecture exclusive du Coran.

• Concernant la deuxième hypothèse, en arabe, comme en français, le masculin l’emporte grammaticalement et ces deux langues ne connaissent guère le cas dit neutre. Ainsi, le nom Allâh est de genre masculin, ce qui lorsque nous le prononçons, hommes ou femmes, impose inconsciemment à nos esprits que nous concevions Dieu/Allâh en tant que sujet masculin, mâle, l’image d’un homme, quand bien même l’Islam a évité l’écueil de sa représentation figurée.
Pourtant, nous savons que son Essence n’est pas sexuée, mais les contraintes linguistiques de l’arabe lui ont imposé un genre, son ipséité n’est-elle pas représentée par le pronom huwa/Lui. Cet exemple illustre parfaitement la problématique : la transcription en genre grammatical ne tient pas nécessairement compte du genre réel de ce qu’elle nomme et décrit. En arabe, le cas inverse existe aussi puisqu’il est bien connu que le pluriel de choses de genre masculin entraîne un accord au féminin singulier, ex. : kutub yadrusûna-hâ où kutub/des livres est représenté par le pronom « hâ/elle » qu’ils étudient/yadrusûna, S34.V44. De même pour les collectifs d’êtres, ex. : qâlat al–a‘râb qui mot à mot signifie les Bédouins (elle) a dit, S49.V14. Il y a donc bien des contraintes grammaticales spécifiques à la langue arabe régissant et limitant la perception du genre par l’allocutaire.

• Ceci étant, même si le masculin domine grammaticalement dans le texte coranique pour de simples raisons linguistiques, c’est bien la lecture, l’interprétation, qui est faite du Coran par les hommes qui a programmé en tout lecteur et lectrice la compréhension du genre masculin grammatical en tant que représentant du sexe masculin. En effet, tous les qualificatifs-clefs dans le Coran sont le plus souvent au masculin pluriel alors que leur signification réelle est mixte. Il en est ainsi des substantifs al–mu’minûn/les croyants, al–muslimûn/les musulmans, al–muttaqûn/les craignants-Dieu, aṣ–ṣâbirûn/les persévérants, aṣ–ṣâlihûn/les vertueux, etc.
En arabe comme en français cet emploi est en réalité tout à fait mixte puisque sont ainsi qualifiés et désignés aussi bien les croyants que les croyantes, les musulmans que les musulmanes, les vertueux que les vertueuses. Ceci est encore plus patent en certaines locutions maintes fois répétées telle : al–ladhîna âmanû/ceux qui ont cru qui englobe l’ensemble de ceux qui ont la foi, hommes ou femmes. Citons aussi al–ladhîna ûtû al–kitâb/ceux qui ont reçu le Livre dont l’équivalent est le célèbre ahl al–kitâb/les Gens du Livre, locutions comprenant naturellement les hommes comme les femmes. Il en est de même pour l’interjection yâayyuhâ–n–nâss/ô hommes, le collectif nass ayant ici le sens de gens et recouvrant de fait aussi bien les hommes que les femmes. Signalons que le singulier kâfir/dénégateur n’est jamais employé au féminin dans le Coran, ce qui ne signifie pas pour autant qu’il n’y ait pas dénégatrice/kâfira et vérifie bien que les qualificatifs pluriels sont mixtes puisque l’on trouve de nombreuses occurrences du pluriel kâfirûn lequel vaut par conséquent autant pour les dénégateurs que les dénégatrices.

• Citons une autre conséquence du fait que le Coran n’est que le reflet de la langue des Arabes. Or, ceux-ci n’avaient pas pour usage de nommer directement une femme, mais de dire : fille de untel ou femme de untel. Ainsi trouve-t-on « ma femme », ex. : S3.V40, « sa femme », ex. : S29.V32. Concernant la désignation par le lien marital : la femme de untel/imra’atu fulân, nous lisons en S66.V10 : « Quant à ceux qui dénient, Dieu a donné en exemple la femme de Noé [imra’ata Nûh] et la femme de Loth [imra’ata lût]… » et au v11 : « Quant à ceux qui croient, Dieu à donné en exemple la femme de Pharaon [imra’ata fir‘awn]… », ce qui confirme bien l’empreinte sociologique sur la langue coranique, langue du Prophète récepteur de la Révélation. Mais, en ce même passage, au v12, il est nominativement mentionné Marie : « Ainsi que Marie la fille de Imrân… » L’exception est notoire, Marie est le seul prénom de femme cité dans le Coran et cet usage s’explique linguistiquement dans le contexte de ces versets par le fait que Marie n’est réellement la femme d’aucun homme en ce sens qu’elle est demeurée vierge. Elle apparaît par contre logiquement rattachée en tant que descendante d’un ancêtre éponyme : « la fille de Imrân », là encore il s’agit d’un usage linguistique reflétant la structure clanique des sociétés arabes. S7.V20.

• Il convient donc que nous apprenions à lire le Coran selon une perspective inclusive en déconstruisant la lecture dominante exclusivement genrée, c’est-à-dire dominée par la masculinité laquelle réduit la perception du propos coranique aux seuls lecteurs-récepteurs hommes. Nous prendrons à titre d’exemple les premiers versets du Coran en rétablissant la mixité grammaticale littérale réelle : « Ceci est l’Écrit, sans doute aucun, un guide pour les craignants-Dieu [hommes et femmes] ; [2] ceux [et celles] qui croient en l’Inapparent, accomplissent la prière et de ce que Nous leur avons attribué font largesse [3] et ceux [et celles] aussi qui croient en ce qui t’a été révélé et en ce qui a été révélé avant toi et qui de la Fin dernière sont convaincus ; [4] ceux-là [et celles-là] suivent une direction de leur Seigneur, ceux-là [ et celles-là] sont les bienheureux [et les bienheureuses].[5] »
En ces versets dont nous avons montré qu’ils dessinaient de manière programmatique le devenir de tous les croyants, et donc de toutes les croyantes, cf. S2.V2-5, la mixité grammaticale n’est pas une vue de l’esprit et sans doute est-ce par souci de le préciser que certains autres versets formulent, si besoin était, de manière explicite l’égalité genrée du propos coranique : « Dieu a promis aux croyants et aux croyantes des jardins au pied desquels coulent ruisseaux où ils demeureront… » (S9.V72)

• La mixité grammaticale occultée de la terminologie coranique n’explique pas pour autant le cas de figure de certains versets traitant d’une problématique féminine, mais s’adressant a priori aux seuls hommes, ex. : « Et ils t’interrogent quant aux règles. Réponds : C’est une indisposition. “Écartez-vous” donc des femmes durant les règles et ne les “approchez” qu’une fois qu’elles ne les ont plus. Et, lorsqu’elles se sont nettoyées, venez à elles comme Dieu vous l’a ordonné…» (S2.V222)
L’on note que ce verset répond à une question posée par des hommes, question formulée en fonction de ce qui les préoccupe alors : la possibilité ou non d’avoir des rapports sexuels avec des femmes ayant leurs menstruations. La réponse leur est donc adressée directement et selon leur angle de vue : « Écartez-vous” donc des femmes durant les règles et ne les “approchez” qu’une fois terminées. » Ceci explique que présentement ce ne soit pas par sexisme qu’il n’est pas dit aux premières concernées, les femmes : « vous ne pouvez pas avoir de rapports sexuels durant vos règles, mais en dehors de cette période vous êtes libres de le faire. »
Concrètement, cette orientation du discours coranique traduit seulement le fait que la Révélation s’exprime en fonction de la réalité d’une société très patriarcale en laquelle les femmes étaient tenues à l’écart de toutes décisions. Quoi qu’il en soit, cela ne nuit en rien à la compréhension non genrée d’un tel propos, bien au contraire, puisque cette mesure de protection concerne en premier chef les femmes.

Il en est de même en un verset relatif aux ablutions : « Ô vous qui avez cru [hommes et femmes] ! Lorsque vous vous apprêtez à prier lavez-vous le visage et les mains […] ou que vous ayez “caressé” femmes, mais que vous ne trouviez point d’eau [pour vous nettoyer], alors ayez en l’intention en recourant à une terre propre… »( S5.V6)
Le propos semble ici ne s’adresser qu’aux hommes en cas de rapport sexuel, mais nul n’a jamais songé que seuls les hommes avaient à se laver les parties génitales après un rapport sexuel. Du reste, il a été antérieurement dit en ce même verset que « après un rapport/junub, [hommes et femmes après un rapport] alors nettoyez-vous »
Encore une fois, l’apparente non-mixité du propos est énoncée conformément aux mentalités du milieu historique en lequel il est révélé, milieu dominé par le patriarcat et le machisme.

• La mixité grammaticale est donc la règle et le Coran n’y déroge que lorsque le sujet concerne spécifiquement les femmes, ex. : « Dis aux croyantes/al–mu’minât…», S24.V31. Cependant, en correction du déséquilibre sociétal justifiant une asymétrie apparente quant aux allocutaires, il arrive que le Coran ait à préciser l’égalité intrinsèque de traitement entre hommes et femmes, citons : «afin que Dieu châtie les hommes hypocrites /munâfiqîn et les femmes hypocrites/munâfiqât, les hommes polythéistes/mushrikîn et les femmes polythéistes/mushrikât et qu’Il accueille le repentir des croyants/mu’minîn et des croyantes/mu’minât ; Dieu est Tout de pardon et de miséricorde. » (S33.V73)
Ceci a pour effet, non pas de réduire l’adresse faite aux femmes à ce seul type de versets, mais bien d’être compris comme induisant une compréhension générale non genrée du message coranique quels que soient les spécificités de certains versets.

• Enfin, il existe un certain nombre de versets dont la mixité de propos a été occultée par l’Exégèse mâle dominante : « Et parmi Ses signes : Il a créé de vous/min anfusi-kum, pour vous, des épouses/azwâj pour que vous viviez en tranquillité/taskunû avec elles/ilay-hâ et Il a mis entre vous de l’affection/mawadda et de la bonté/raḥma. Il y a en cela des preuves pour des gens qui réfléchissent.» (S30.V21)la traduction standard rend bien ici l’interprétation empreinte de juridisme islamique fondée sur la mythologie judéo-chrétienne de la création d’Ève à partir d’une côte d’Adam [Il a créé de vous] justifiant du statut inférieur de la femme et, conséquemment, du rôle dévolu aux femmes : « pour vous des épouses/azwâj ».
D’une part, la finalité des femmes est ici d’être « épouses» et, d’autre part, elles sont nécessairement au service de leurs époux puisque ceux-ci ont droit divin de pouvoir vivre « en tranquillité avec elles », d’autres d’ailleurs traduisent plus explicitement par « afin que vous puissiez vous reposer auprès d’elles ». Notons que cette conception du couple évacue assez logiquement l’amour du champ relationnel marital : « Il a mis entre vous de l’affection et de la bonté ». La charge patriarcale se passe ici de commentaires et Dieu est exégétiquement convoqué pour défendre la vision du monde des hommes de ces temps-là.
D’un point de vue littéral, la compréhension diffère grandement : «parmi Ses signes, qu’Il ait créé pour vous et de vous-mêmes/min anfusi-kum des complémentaires/azwâj afin que vous preniez appui l’un à l’autre/ilay-hâ et qu’Il ait mis entre vous doux amour et bienveillance. Vraiment, il y a en cela des signes pour ceux qui réfléchissent. » Observons dans un premier temps que par anfusi-kum/vous-mêmes, en arabe comme en français, rien n’indique le genre, seule la lecture voulue par les hommes fait qu’ici le masculin l’emporte en notre compréhension. Au contraire, qu’il soit dit « de vous-mêmes » évoque la reproduction des êtres humains à partir d’un couple homme femme. Le terme azwâj est le pluriel de zawj, mot mixte qui bien avant que de signifier époux ou épouses connote la notion de choses équivalentes formant une paire, deux éléments complémentaires, voire des équivalents, et seulement par extension des conjoints, un couple d’homme et de femme.
S’agissant de création par Dieu : « Il ait créé », l’on ne peut ici retenir le sens de couple qui n’est pas une création, mais bien un résultat de la complémentarité créationnelle voulue par Dieu quant aux hommes et aux femmes, d’où ici notre : « complémentaires/azwâj ». Cette complémentarité lorsqu’un couple se forme, sans que la notion légale de couple marié intervienne présentement, a pour conséquence une symétrie dans les rapports : « afin que vous preniez appui l’un à l’autre ».
L’on note que dans le syntagme li-taskunû ilay-hâ le pronom « hâ » est donc neutre conformément au caractère mixte du pluriel azwâj, d’où notre « afin que vous preniez appui l’un à l’autre/ilay-hâ ». Rien n’indique donc que la femme soit le repos de l’homme, mais, au contraire, que l’un et l’autre doivent s’assister mutuellement. Cette réciprocité suppose donc, non plus de simples liens de service : « affection/mawadda et bonté/raḥma », mais « doux amour/mawadda » et « bienveillance/raḥma ».
Signalons que la lecture juridico-patriarcale opérée par l’Islam quant à ce type de verset est projetée jusqu’en la perception de l’Au-delà, traduction standard : « Ils auront [au Paradis] des épouses pures ». Pour autant, en ce verset rien n’indique qu’il s’adresse en premier lieu aux hommes : « et fais belle annonce à ceux qui croient [hommes et femmes]…qu’ils auront [au Paradis] des conjoint(e)s/azwâj pur(e)s », cf. l’analyse littérale de ce verset en S2.V25.

Conclusion
Comme on le voit si l’on dénouait les liens herméneutiques mis en place par l’exégèse dominante, le Coran s’adressait alors tant aux hommes qu’aux femmes. La situation selon laquelle nous percevons actuellement le discours coranique n’est pas celle en laquelle nous vivons, mais bien celle selon laquelle les hommes de la société arabe du VIIe siècle reçurent la Révélation. Du fait de leur prédominance dans la société d’alors, ils imposèrent leur lecture patriarcale et misogyne. Or, les hommes par l’intermédiaire de l’orthodoxie essentiellement mâle demeurent encore les gestionnaires du sens de la Révélation et surimposent à tous la perception genrée du propos coranique. Ce ne sont donc pas que les seules contraintes sémantiques propres à la langue arabe coranique qui génèrent l’impression d’un propos coranique adressé pour l’essentiel aux hommes, mais bien plus des conditions historiques de réception, ce sans que pour autant la Révélation soit tributaire de l’Histoire.
Il faut donc apprendre à lire le Coran en nous défaisant de l’habitude d’une lecture du point de vue de l’homme mâle engendrée par l’Islam et du conditionnement qui en découle afin de comprendre que la totalité du discours du Coran s’adresse à tous, hommes et femmes, l’Humanité.

Très bon week-end
à tous les fidèles en jeune

 

Source: info-matin

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