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Pourquoi Daesh ne peut pas gagner

L’État islamique est capable de faire beaucoup de dégâts mais ne constitue pas une menace existentielle pour la France. Explications.

 

groupe combattants etat islamique eil al qaida

“La France en guerre” : le message est martelé à satiété.  Pris à la lettre, il implique que Daesh fait peser une menace existentielle sur la France, voire sur l’Europeentière. Il n’en est évidemment rien. Si guerre il y a, il s’agit d’un conflit asymétrique. La France ne risque pas d’être occupée et Paris ne sera jamais détruit par les hordes de Daesh comme jadis Carthage le fut par les légions romaines. L’horreur des attentats du vendredi 13 novembre et la légitime émotion suscitée par cet inhumain carnage ne doivent pas occulter les réalités.

Daesh a des moyens militaires limités. Les estimations des effectifs varient de 20 000 à 30 000 hommes, avec sans doute la possibilité de mobiliser quelques dizaines de milliers de “réservistes” supplémentaires. Lors de la prise de Mossoul (juin 2014) et de la débandade de l’armée irakienne, l’État islamique avait mis la main sur plusieurs centaines de véhicules tout-terrain Hummer, sur une cinquantaine de chars, 150 blindés légers et environ 60 000 armes individuelles. Un arsenal considérable sur le plan tactique, mais relatif sur le plan stratégique. Les chars – dont la maintenance laisse à désirer – ne peuvent plus guère bouger sans s’exposer aux frappes aériennes.

Daesh dispose, certes, de ressources financières importantes grâce au pétrole et aux taxes perçues dans la région qu’il contrôle, mais, là encore, il convient de relativiser : en 2014, on estimait la production pétrolière de Daesh à 70 000 barils par jour. Ce chiffre a beaucoup baissé en raison du bombardement des sites, surtout en Syrie, et de la reconquête de certains d’entre eux par les combattants kurdes d’Irak. À titre de comparaison, l’Arabie saoudite produit 9 millions de barils par jour… Ajoutons que Daesh écoule son brut en contrebande au quart du prix du marché, soit 10 dollars au lieu de 40.

Daesh est géographiquement confiné. L’État islamique “administre” grosso modo un tiers de l’Irak, un tiers de la Syrie et 12 millions d’habitants. Son expansion ne peut éventuellement s’effectuer que dans les zones arabes sunnites. Il est hors de question de conquérir Bagdad, ville très majoritairement chiite, de s’aventurer au sud (chiite) de l’Irak ou chez les Kurdes (sunnites mais non arabes). Ces derniers viennent d’ailleurs de reprendre la ville irakienne de Sinjar (350 000 habitants), verrou important sur la route 47 reliant Mossoul (Irak) à Raqqa (Syrie). En Syrie, Daesh se heurte aux minorités alaouites, chrétiennes ou druzes. Au Liban, il manipule quelques réseaux mais ne peut espérer influencer les sunnites locaux au demeurant minoritaires face aux chiites et aux chrétiens.

Daesh a, bien sûr, essaimé dans tout le Sahel, mais pas au point d’être en mesure de prendre le contrôle de vastes étendues de territoires. Avec une possible exception : la Libye, où règne une situation chaotique. Daesh ne peut espérer s’implanter solidement que là où les États ont disparu ou sont déliquescents.

Daech est idéologiquement enfermé dans une vision médiévale de l’islam. Les grandes idéologies totalitaires modernes propageaient un message qui se voulait moderniste et universel. Le communisme (“la plus cohérente des erreurs”, selon Raymond Aron) prétendait promouvoir un système internationaliste et progressiste pour tous les peuples de la planète. Même si le résultat fut épouvantable, le marxisme regardait vers l’avenir et les lendemains qui chantent. Daesh, lui, est fasciné par un passé lointain et mythifié. Il ne s’adresse qu’aux musulmans auxquels il cherche à faire partager une vision régressive et absurde.

En France, Daesh peut convaincre quelques esprits faibles, musulmans d’origine ou convertis, de semer la mort et la désolation. Mais son prosélytisme va nécessairement se heurter à une réalité : les Français musulmans ne rêvent pas de vivre dans l’Arabie du VIIe siècle mais, comme leurs compatriotes chrétiens, juifs ou agnostiques, ils souhaitent surtout améliorer leur sort dans la France du XXIe siècle. Dans nos pays, le gisement de Daesh est, de surcroît, singulièrement limité. Car il est hautement improbable que les Bourguignons, Auvergnats, Bretons, Castillans, Piémontais, Bavarois ou Écossais se convertissent en masse à l’islam. Pas plus que les Chinois, Indiens, Russes, Américains du Nord ou du Sud.

Dans la plus grande partie du monde, Daesh peut donc tenter de semer de sérieux troubles, mais il n’a plus aujourd’hui aucun allié, même si, dans le passé, la Turquie et certains pays du Golfe ont fait preuve d’une dangereuse complaisance. Il ne gagnera pas face aux États-Unis, à la France, à l’Iran, à la Russie et pratiquement face au monde entier. Il ne parviendra ni à faire changer nos modes de vie ni à infléchir les grandes décisions de politiques étrangères. Cela prendra du temps, mais Daesh est voué à finir dans les grandes poubelles de l’histoire.

Source: Le Point

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