Après la marche historique de protestation contre la fraude électorale, Paul Ismaël Boro, un des soutiens de taille de Soumaila Cissé, a été enlevé, le dimanche 26 Aout 2018, chez lui dans les environs de 21 heures. Simple coïncidence ou exécution d’un plan machiavélique pour réduire au silence des caciques de l’opposition qui osent rejeter publiquement les résultats e la mascarade électorale ? En tout cas, cet enlèvement est intervenu quelques jours après que le président contesté, IBK, a proféré des menaces publiques. En droit, dans les commissariats, on aurait parlé déjà de présomption pour des affaires similaires. Est-ce alors le début de l’application de ces menaces ? Nous le saurons dans les jours qui suivront. Mais l’opposition n’entend pas se laisser faire et envisage, d’ores et déjà, une grande marche de protestation pour réclamer la libération de Paul Boro.
Menaces verbales, manipulations des jeunes, intimidations et arrestations arbitraires, atteinte à la liberté d’expression et de presse, enlèvements…tels sont les actes dégradants et inhumains dont les Maliens, particulièrement les opposants au président IBK, sont victimes. Tout se passait comme si tous ceux qui n’apprécient pas sa gestion chaotique sont considérés comme ennemis de la République et doivent par conséquent disparaître, sans laisser de trace. C’est la seule réponse qu’apporte le pouvoir en place à la grogne qui enfle, suite au rejet des résultats de l’élection présidentielle par la majorité des Maliens, pour dire non aux fraudes massives et surtout au bourrage des urnes étayé par des images ayant fait le tour du monde à travers les réseaux sociaux.
Il n’est caché de personne que depuis la proclamation des résultats définitifs du second tour de l’élection présidentielle qui place IBK en tête, les contestations n’ont pas tardé. Hommes politiques, mouvements de jeunes, personnalités individuelles … qui croient dur comme fer que Soumaila Cissé est le président élu par les urnes, sont dans un combat farouche pour disent-ils, défendre la démocratie et le choix des Maliens via les urnes. Paul Ismaël Boro, ancien collaborateur d’IBK et actuel allié de Soumaila Cissé, est un des grands acteurs de ces constations.
A la grande surprise des Maliens, le dimanche dernier, lendemain de la grande marche de protestation des résultats et de réclamation de l’investiture de Soumaila Cissé le 04 septembre, des personnes encagoulées, arrivées à bord d’une dizaine de véhicules non immatriculés, auraient fait irruption dans sa maison pour l’enlever. Pour le moment, ni les auteurs ni les raisons de cet enlèvement peu orthodoxe ne sont connus, chacun y allant de son commentaire. De toute façon, rien ne saurait et ne pourrait justifier une telle barbarie dans un Etat dit de droit.
Du côté du camp de Soumaila Cissé, on dénonce un règlement de comptes du régime à l’encontre de Paul Boro qu’on cherche ainsi à punir pour sa courageuse position politique. Tout comme on estime que le président IBK et ses acolytes veulent faire taire tous les opposants, à travers des arrestations, des enlèvements, des actes de torture… et ces méthodes, qui commencent à s’installer dans le pays, sont des signes de l’étape fœtale d’une nouvelle dictature au Mali.
Il est aussi important de noter que lors de sa récente sortie, le président Ibrahim Boubacar Keita a menacé les opposants. Si pour certains ce ne sont que des propos en l’air lancés par un colérique, pour beaucoup, bien au contraire, des menaces du genre, venant du premier responsable du pays, sont à prendre très au sérieux. De là à penser que l’enlèvement de Paul Ismaël Boro rentre dans le cadre de l’exécution desdites menaces, ce pas est malheureusement franchi.
En tout cas, si le régime est l’auteur de cet enlèvement, on ne peut que lier cet acte au positionnement politique de la victime qui avait claqué les portes du parti au pouvoir pour rejoindre l’opposition où il était en train de jouer un rôle de premier plan, notamment dans le mouvement de contestation des résultats proclamés de l’élection présidentielle. En effet, si Paul trainait des casseroles, pourquoi attendre qu’il soit à l’Opposition pour l’enlever et justement à ce moment précis ?
Cet acte, qui vient s’ajouter à tant d’autres, ne font que noircir davantage l’image déjà sombre du Mali, un pays où sans aucun respect de procédures judiciaires, un citoyen peut être enlevé de cette manière, à domicile et par des hommes armés et encagoulés. On n’ose donc pas croire que des terroristes se baladeraient en ville à bord d’une dizaine de véhicules, pour agir ainsi tranquillement, sans la moindre intervention de la Sécurité nationale. Comme pour dire qu’aucune équivoque n’est permise sur les auteurs de cet acte qui en ont réalisé d’autres du genre, au mépris de la Loi.
La Minusma, Barkhane et le G-5 Sahel sont témoins de ce genre d’actes qui méritent d’être portés à la connaissance de la justice internationale pour éviter une éventuelle escalade car les citoyens honnêtes et prêts à défendre la démocratie ne se sentent plus en sécurité jusque dans leur propre maison. Dans ce genre de situations, des réflexes d’autodéfense peuvent être adoptés et nous les déconseillons fortement. Mais hélas, un incident peut si vite arriver ! Et qui en assumera la responsabilité ?
En réalité, devant de tels actes, force ne reste plus à la loi, mais la loi reste à la force. Ce qui ne contribue en rien à la stabilité du pays déjà si fragile, si nous nous savons d’où nous venons. En effet, il y a seulement cinq ans, s’il n’y avait pas l’opération serval…
Ce qui est sûr, si l’allié de Soumaila Cissé, Paul Boro, n’est pas ramené, son camp politique envisage, avec l’opposition et tous les démocrates épris de justice, ainsi que les ardents défenseurs de la démocratie, de mener des actions de grande envergure pour le retrouver. Ce qui commence par une grande marche programmée pour le samedi prochain.
Les auteurs de son enlèvement doivent donc le ramener pour éviter à notre pays d’autres crises. Mais tout en sachant que les tortures et autres actes de barbarie ne resteront jamais impunis car le peuple malien et la communauté internationale veillent !
Boureima Guindo
Source: Le Pays