Le groupe Bolloré est créé en 1822. Il s’intéresse aux activités portuaires, à la communication, à la logistique, etc. Pour s’implanter durablement en Afrique, ce groupe a su neutraliser le pouvoir de tous ses adversaires. Il a également su agir au moment le plus critique pour la vie de certaines de ces nations où il s’est implanté. Il est également entré en complicité avec des dirigeants insouciants.
Les concessions accordées au groupe Bolloré en Afrique en échange à des faveurs sur le continent ne datent pas d’aujourd’hui. Il a été au centre de beaucoup d’encouragements de corruption sur le continent. Il a réussi toujours dans cette politique grâce à la complicité de certains dirigeants des pays concernés, mais aussi des dirigeants français.
Le groupe Bolloré, pour se faire valoir en Afrique et aux yeux de tous ses concurrents potentiels, a pleinement joué aux techniques bourgeoises. Dans les années 1980, il était nommé le « petit prince du cash- flow ». A ces temps, il disait aimer « jouer le jeu du profit » et de préférer la « modernité à la lutte des classes ». Cette modernité n’est rien d’autre qu’une technique d’asphyxie de tous les adversaires économiques sur le continent afin de concentrer entre les mains de ses différentes filiales présentes en Afrique. C’est le « monarchisme économique ».
Pour réussir efficacement sa politique, il fait assurer la communication. Celle-ci est susceptible de manipuler les réalités, de s’adonner à des panégyriques de certains dirigeants, maquiller les délits des mauvais dirigeants. Pour ce faire, le groupe Bolloré se fait munir d’une chaine de télévision, de radio voire de presses écrites. Toutes à son service. En effet « Matin plus » et « Direct soir » sont des chaînes spécialistes en soin d’images des dirigeants africains contestés par leur peuple, mais qui font l’affaire de Bolloré. Il corrompt également des journalistes du continent pour qu’ils agissent à son nom. En mai 2007, il a remis des invitations de voyage à 6 rédacteurs en chef de la presse camerounaise. Les frais de ces voyages étaient entièrement à la charge du groupe.
Si l’Afrique ne représente que le quart du chiffre d’affaires officiel du groupe qui était estimé en 2007 à 6,4 milliards d’euros, il faut noter les nombreuses filiales qu’il possède et qui sont reparties de part et d’autre sur le continent, les nombreuses installations portuaires, de transports voire de plantations qu’il contrôle font de lui un grand conquérant.
Ceux-ci sont renforcés par les réseaux politiques et médiatiques qui couvrent ses arrières. En outre des médias, il faut noter que depuis l’époque coloniale, deux sociétés ont permis au groupe Bolloré d’amasser suffisamment de richesses. Il s’agit de la Société commerciale d’affrètement et de combustibles (SCAC) qui va être associée dans les années 1986 avec une autre branche de ladite société pour donner naissance à SDV Logistique internationale. La seconde société s’appelle SAGA qui sera rachetée elle aussi en 1997.
La création de la marque ombrelle Bolloré Africa Logistics en septembre 2008 a fait du groupe Bolloré le « premier réseau intégré de logistique en Afrique ». Profitant de son pouvoir dans le continent, il va forcer les relations de collaboration avec les États afin d’asphyxier le chiffre d’affaires de tous ses conquérants. On se rappelle comment en 2007 il a reçu à décourager son principal adversaire à Dakar, le mastodonte des Émirats arabes unis Dubai Ports World (DPW). Pour réussir ce coup, il s’est affiché auprès de Nicolas Sarkozy, M. Alain Madelin a été saisi pour suivre de près son dossier. Qu’en est-il également de son affaire avec Progosa ? Le groupe Bolloré a reçu à avoir cette entreprise à ses côtés grâce à des procédures judiciaires qu’il engage à cet effet.
C’est la même technique que Bolloré à pratiquer contre son autre concurrent français, le groupe Necotrans. Ce groupe était un leader de la logistique et du transport dans le monde. La concurrence était tendue entre les deux groupes, des procédures judiciaires vont être engagées, mais toujours dans la défaveur de Nicotrans. Après plusieurs altercations judiciaires, le groupe est racheté par Bolloré en août 2017.
Le groupe Nicotrans s’est étonné de son expulsion de Conakry par Bolloré Africa Logistics sur décision signée du président de la République guinéenne, Alpha Condé en 2008. Cette affaire a été vue comme un problème entre Chirakiens et Sarkozistes. Le ministre français des Affaires étrangères de Sarkozy, Bernard Kouchner, avait aidé la Guinée à l’organisation de ses élections. En échange de cela, les marchés de Nicotrans qui ont une tendance plutôt vers Chirac devraient être concédés à Bolloré. C’est dans ce cadre que Bolloré sera accusé le 16 mars 2011 pour « corruption internationale » grâce à une plainte de Nicotrans auprès du procureur de la République de Paris. Cette procédure va coûter cher au plaignant qui sera confronté à plusieurs problèmes de trésoreries et sera dans l’obligation de céder ses marchés à Bolloré.
Notons que Bolloré est une fabrication des Français en complicité avec des dirigeants africains insouciants pour l’avenir de leur pays. Cette fabrication a été maintenue de génération en génération. Toutes les activités que ce groupe mène en Afrique ont toujours reçu de façon indirecte des programmes d’aide publique ou directement par des contrats publics.
Le groupe Bolloré est ainsi devenu un félin dans le continent africain qui se profite de la faiblesse des États ou de celle des autres entreprises du continent pour gagner suffisamment de places. Qui ne sait pas interrogé en 1990 lorsque Denis Sassou Nguesso venait au pouvoir au « Congo-Brazzaville » après un coup d’État ensanglanté ? Cette période a été pour le groupe un moment propice de lier une relation forte avec ce pays. Cela a été pareil au Libéria où le groupe était actionnaire d’une société belge, Socfinal, grâce à laquelle il va obtenir la concession d’une plantation d’Hévéa au moment où le président Taylor prenait le pouvoir par la force.
À ce titre, le conseil de sécurité de l’ONU l’avait accusé d’ « exploitation illégale » des ressources naturelles du Libéria. Mais cela n’est resté qu’au stade d’accusation.
Le groupe Bolloré a toujours été au centre des scandales de corruption dans les 45 pays africains où il s’est implanté durablement. Voici expliqué par son directeur général Gilles Alix, la méthode qu’il appliquait : « Les ministres, on les connaît tous là-bas. Ce sont des amis. Alors, de temps en temps — je vais être clair —, on leur donne, quand ils ne sont plus ministres, la possibilité de devenir administrateurs d’une de nos filiales. C’est pour leur sauver la face. Et puis on sait qu’un jour ils peuvent redevenir ministres. »
Ces propos d’un ancien du groupe Bolloré en 2006 ne sont pas anodins: « L’Afrique est comme une île, reliée au monde par les mers. Donc, qui tient les grues tient le continent ! »
Après toutes ces analyses, nous avons envie de nous demander les raisons pour lesquelles tous ces temps ont été attendus pour mettre en garde en vue Vincent Bolloré qui est l’actuel chef du groupe en Afrique. À y regarder de près, nous nous disons que la mise en garde à vue de Vincent Bolloré le 24 avril 2018 pour des concessions portuaires au Togo et en Guinée constitue une technique pour asphyxier le groupe afin d’implanter à sa place en Afrique un groupe macroniste. L’Afrique est devenue un champ de combat pour les entreprises occidentales. L’Afrique va-t-elle continuer à s’exposer ainsi à l’exploitation de ces entreprises étrangères ? Il est grand temps que les Africains prennent leur destin en main pour arrêter ces concurrences déloyales sur le continent.
Vincent Bolloré est aujourd’hui victime d’un péché commis par le groupe dans le but de s’implanter durablement en Afrique.
Fousseni TOGOLA
Le Pays