Concours de poésie, course de chameaux, expos photo et conférences culturelles : le festival des villes anciennes bat son plein depuis une semaine à Oualata, Au son des flûtes et des tambours, une foule joyeuse déambule le long des murs ocre richement décorés de l’ancienne cité caravanière du sud-est de la Mauritanie nichée dans les sables.
A l’entrée de la ville, située à une centaine de kilomètres de la frontière malienne, une cinquantaine de nomades enturbannés et vêtus d’amples boubous accueillent à dos de dromadaire les visiteurs venus des quatre coins du pays pour célébrer leur patrimoine.
“Je suis un grand amoureux des vieilles villes du Sahara. J’y puise mon inspiration. Oualata, sa couleur ocre, sa rivière de sable… Pour nous, ce n’est pas un désert. Chaque dune a un nom”, confie M’Barek Ould Beyrouk, écrivain mauritanien et conseiller culturel du président Mohamed Ould Abdel Aziz.
Un festival tournant, entre Oualata, Chinguetti, Ouadane, Tichitt
Créé en 2011, ce festival qui tourne entre quatre villes anciennes, Oualata, Chinguetti, Ouadane, Tichitt, attire plusieurs milliers de personnes chaque année.
“Ces cités sont notre histoire, notre identité commune, mais elles vivaient dans l’isolement, l’enclavement. Le festival a permis de les sortir de l’oubli et de générer une économie locale” salutaire dans cette région pastorale aux confins du pays, fait valoir le directeur du festival, Mohamed Adnan Beyrouk.
Au bord d’un plan d’eau, non loin de grandes tentes blanches où s’affiche l’artisanat local, de jeunes nomades délestent leurs chameaux de gros sacs de sel le temps d’une pause, avant de reprendre la route vers les souks maliens.
Oualata, étape des routes caravanières
Fondée au VIIe siècle, Oualata fut longtemps une importante étape des routes caravanières transsahariennes, Célèbre pour son intense activité culturelle, la cité, alors surnommée “rivage de l’éternité”, connut son apogée au XVe siècle. Son déclin progressif marqua le début de la prospérité de Tombouctou, sa rivale du nord du Mali.
Dans les années 1980, Oualata devient tristement célèbre pour son fort colonial transformé en bagne, où sont jetés les prisonniers politiques. Entre 2005 et 2011, la vague d’attentats qui frappe la Mauritanie porte le coup de grâce à la ville.
“Il y a dix ans, Oualata était une ville quasiment abandonnée, à cause du développement catastrophique du terrorisme et du grand banditisme dans cette région, où les frontières étaient poreuses”, souligne Mohamed Mahmoud Ne, le directeur de l’Office national du tourisme. “Mais aujourd’hui nos frontières sont sécurisées”, affirme-t-il, en confiant son “espoir” de voir revenir les touristes dans cette belle endormie “au cachet particulier, qui conjugue les cultures arabo-berbère et africaine”.
Un dédale de maisons ornées de dessins géométriques
Oualata et ses dédales de maisons ocres, ornées de gracieux dessins géométriques dessinés à l’argile, ont servi de décor au long-métrage “Timbuktu”, du réalisateur mauritanien Abderrahmane Sissako, couronné par le César français du meilleur film en 2015. Malgré ce regain de notoriété, les touristes étrangers restent rares.
Le ministère français des Affaires étrangères a allégé au printemps 2017 ses restrictions de voyage pour plusieurs zones de la Mauritanie, classées “rouge” depuis la vague d’attentats et d’enlèvements ayant frappé le pays pendant les années 2000.
Conséquence: la Mauritanie a accueilli 1.500 touristes la saison passée, et compte tripler la fréquentation cette année. Une fois par semaine, de fin octobre à fin avril, un charter de touristes en provenance de Paris atterrit à Atar (centre), une région prisée pour ses circuits de trekking dans le désert. Mais la région de Oualata, elle, reste “formellement déconseillée”.
“J’espère que le Quai d’Orsay puisse faire évoluer cette zone rouge en Mauritanie. Elle s’explique de moins en moins. Depuis des années nous avons fait beaucoup d’efforts pour sécuriser le pays”, affirme le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, venu inaugurer le festival.