Ils étaient quelques magistrats (moins d’une centaine) en robe noire, à participer, hier jeudi, à la Cour d’appel de Bamako, au sit-in de soutien à leur collègue Soungalo KONE, président du Tribunal de Niono, enlevé, depuis le 16 novembre 2017, par des ravisseurs. C’était à l’initiative du bureau du Syndicat autonome de la Magistrature (SAM), tendance Aliou Badara NANACASSE.
L’événement a enregistré la participation des membres du Syndicat libre de la Magistrature (SYLIMA), des secrétaires de greffe et parquets, ainsi que les parents et connaissances du juge Soungalo KONE. Sur les banderoles, cousues de fautes, on pouvait lire :
« Détenue contre sa volonté, le juge Soungalo KONE ne peut prendre par la plus grande fête de la Justice » ; « Pour notre sécurité, nous restons debout et vigilants ».
Selon M. NANACASSE, président par intérim du SAM, le sit-in est une forme de manifestation non violente consistant à s’asseoir à terre ou en groupe pour occuper des lieux.
Pour eux, a-t-il expliqué, il ne s’agit pas d’occupation des lieux, mais surtout d’attirer l’attention de l’opinion publique que depuis le 16 novembre 2017, soit 107 jours, leur collègue, Soungalo KONE, président du Tribunal de Niono, se trouve en captivité entre les mains des «forces du mal». Toute chose qui, dit-il, a écœuré le monde de la justice de notre pays.
«Notre impatience de le voir rentrer chez lui est sans limite. C’est pourquoi, nous lançons un appel ultime aux plus hautes autorités du pays, en particulier le Président de la République, président du Conseil supérieur de la magistrature, à mettre tout en œuvre pour faire libérer Soungalo KONE », a déclaré M. NANACASSE. Avant de poursuivre : «Nous avons besoin de Soungalo KONE ; sa famille a besoin de lui ; la Nation a besoin de lui».
À la fin du sit-in, le président par intérim du SAM, Aliou Badara NANACASSE, a déclaré à la presse que ses collègues et lui n’ont pas de reproches particuliers à l’endroit des plus hautes autorités du pays. Pour preuve, a-t-il rappelé, le Président de la République les avait reçu et leur avait donné toutes assurances que ‘’tout sera mis en œuvre pour ramener Soungalo sain et sauf’’.
Par ailleurs, il dit savoir que les forces armées et de sécurité sont sur le terrain ; mais face au silence, et le déficit de communication, les magistrats par sa voix se disent impatients. D’où, l’organisation dudit sit-in.
Selon M NANACASSE, aucun effort ne sera ménagé pour que Soungalo leur revienne sain et sauf. Toutefois, il dit ne pas pouvoir préjuger de tous les actes que le SAM va poser à l’issue de ce sit-in.
«Mais, ce qui est sûr, nous allons poursuivre notre démarche sans relâche jusqu’au jour où nous aurons satisfaction», a-t-il souligné.
Pour rappel, selon les témoignages, le jeudi 16 novembre 2017, vers 20 heures, six inconnus, à bord d’une voiture 4X4 blanche et de quelques motos ont été aperçus dans la rue où se trouve la résidence du président du tribunal de Niono, Soungalo KONE. Mais nul ne sait ce que ces hommes enturbannés cherchaient, mais ils observaient bien la porte du juge.
Au bout d’un certain temps, rapportent les mêmes sources, le jeune homme qui fait le thé à la porte se lève, ouvre la porte et entre dans la concession. Il est violemment poussé dans le dos et maîtrisé par quatre des assaillants. Ses cris sont rapidement étouffés par un coup de crosse de fusil.
Sans désemparer, les ravisseurs foncent dans une chambre et ressortent aussitôt en traînant le magistrat avec eux. Comme ce dernier tentait de crier à son tour, il est assommé de plusieurs coups de crosse puis transporté vers la voiture arrêtée au-dehors. Une sœur cadette du juge, qui tente de s’interposer, est fouettée sans ménagement. Les ravisseurs, après leur opération qui n’a duré à peine que 5 minutes, s’éloignent par la route qui conduit au Macina.
Par ailleurs, faut-il rappeler, qu’en début décembre 2017, M. KONE et le CB de Nara sont apparus dans une vidéo où ils précisent les conditions pour leur libération.
«Je suis le juge Soungalo Koné, enlevé à Niono», déclarait-il, visiblement sous la dictée de ses geôliers, qu’il ne cite pas nommément, au début de cette vidéo de six minutes, adressée à sa famille et diffusée sur les réseaux sociaux.
Après avoir récité quelques versets du Coran, il supplie en langue bambara le gouvernement de «libérer les djihadistes détenus dans les prisons» et plaide également pour «l’application de la charia» au Mali. Depuis, plus de nouvelles des deux otages.
Par Sékou CAMARA
Info-matin