En plus des dispositions d’ordre matériel, les autorités judiciaires ont décidé de la suspension des audiences publiques
au niveau des différentes juridictions
Le monde entier est, depuis plusieurs mois, secoué par la pandémie du coronavirus. Face à la propagation fulgurante de cette maladie, les autorités de plusieurs pays ont décidé de désengorger le milieu carcéral en accordant la liberté totale à un certain nombre de condamnés. C’est le cas de notre pays où plus de 1.400 prisonniers ont été graciés par le chef de l’État, Ibrahim Boubacar Keïta. Une bonne décision qui ne doit pas cacher une autre triste réalité. En effet, beaucoup de nos concitoyens croupissent en prison sans être jugés alors que la grâce présidentielle ne concerne que ceux qui ont été définitivement jugés et condamnés. Nous avons rencontré le directeur national de l’Administration de la Justice, Andogoly Guindo, pour en savoir davantage sur la situation des détenus en cette période de coronavirus.
D’entrée de jeu, notre interlocuteur a fait savoir que le monde vit aujourd’hui à l’ère du coronavirus qui est un virus particulièrement intelligent et d’une contagiosité jamais égalée. Pour lui, cette maladie, qui a fait frémir l’humanité tout entière en si peu de temps, est devenue une pandémie face à laquelle les États ont pris des mesures exceptionnelles pour prévenir la propagation, tout au moins, limiter celle-ci. Et notre pays n’est pas resté en marge.
«Avant même l’apparition du premier cas de maladie à coronavirus dans notre pays, des mesures ont été prises par les plus hautes autorités», a relevé Andogoly Guindo. À ce propos, il dira qu’à l’issue de la session extraordinaire du Conseil de défense nationale, tenue le 17 mars dernier, des mesures ont été prises, notamment celles appelant les populations à observer des mesures d’hygiène appropriées pour se prémunir de cette pandémie meurtrière. Aussi, des règles barrières et des mesures de confinement consistant à éviter les regroupements de plus de 50 personnes ont été édictées.
«En application de cette mesure, le ministre de la Justice, Garde des Sceaux a convié en réunion tous les acteurs de la justice notamment les magistrats, les avocats, les greffiers, le personnel de l’administration pénitentiaire…bref tous ceux qui, par leurs actions, concourent à la distribution de la justice dans notre pays. Cette réunion avait pour but notamment de recueillir des suggestions sur la meilleure conduite à tenir pour l’application des mesures adoptées par la session du Conseil de défense nationale», a rappelé le directeur national de l’Administration de la Justice.
À l’issue de cette réunion, un certain nombre de mesures ont été prises par le ministre de la Justice. Il s’agit notamment de la suspension des audiences publiques au niveau des tribunaux, des justices de paix et des Cours d’appel. La suspension des audiences a été édictée pour une période de trois semaines à compter du 19 mars dernier. «À l’expiration de cette période de trois semaines, si les conditions se prêtent à la tenue des audiences, elles pourront être organisées», a-t-il ajouté.
Justifiant cette mesure de suspension, il dira que des audiences publiques sont des cadres de rassemblement, dans lesquels plusieurs personnes peuvent se retrouver à la fois. «De tels regroupements peuvent être des facteurs de contamination au virus. Voilà pourquoi, le ministre de la Justice a instruit les tribunaux, les cours et justices de paix de suspendre les audiences publiques. Mais, il a demandé toutefois que tout en observant ces règles de prudence et de confinement, qu’ils puissent quand même traiter les cas d’urgence», a indiqué notre interlocuteur.
De même, a poursuivi Andogoly Guindo, des dispositions d’ordre matériel ont été également prises pour éviter la contagion au virus Covid-19. Il s’agit, a-t-il détaillé, de la mise à disposition des kits de lavage des mains et de gel hydro alcoolique au niveau de l’ensemble des appareils judiciaires.
Que faire si la mesure de suspension des audiences qui intervient dans un cadre exceptionnel se prolongeait ? En réponse, le directeur national de l’Administration de la justice a informé que sa structure est en train de réfléchir sur les mesures qui s’imposeront quant aux cas des individus en détention préventive.
Comment faire face à cette situation ? Comment alléger les cas de détention préventive ? S’est interrogé Andogoly Guindo. Avant d’enchaîner : «Nous allons réfléchir sur les moyens les plus appropriés pour que les détenus préventifs ne se trouvent pas de façon exagérée en état de détention provisoire».
Par ailleurs, il a affirmé que le service de délivrance de certificat de nationalité et de casier judiciaire va continuer, tout en assurant que les mesures d’interdiction seront scrupuleusement respectées. «Il s’agit d’éviter surtout que plusieurs personnes viennent se retrouver à la fois, au même endroit, dans la cour du palais de justice», a précisé le directeur national de l’Administration de la justice.
Bembablin DOUMBIA
Source : L’ESSOR