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Orpaillage dans les lits des fleuves au Mali : Un attentat contre l’écosystème!

Si l’eau est vitale pour la vie, au Mali, les ressources en eau sont soumises à toutes sortes de toxicité.  En plus des activités des teinturières, de la réduction du couvert végétal due à l’agriculture itinérante, la fabrication et la cuisson des briques, l’orpaillage traditionnel constitue le principal danger qui empoisonne de plus en plus les cours d’eau. Cette activité est d’autant plus nocive pour les eaux au regard des produits chimiques utilisés que des procédés d’extraction d’or employés, notamment l’exploitation par dragues, communément appelé le dragage.

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Le Mali, pays continental, sans débouché à la mer, doit la survie de sa population aux deux fleuves qui le traversent, le Sénégal et le Niger. Pourtant, à l’image de nombreux pays en voie de développement, il accuse de multiples problèmes liés à la gestion de ses ressources en eau. Cela est dû à de nombreux facteurs d’ordre politique, social, économique et environnemental entravant la bonne gestion de celles-ci. Ce faisant, les conséquences sont dramatiques et affectent considérablement le processus de développement. Ainsi, l’inéluctable raréfaction de l’eau, sa constante dégradation en qualité et son inégale répartition sont autant de signes palpables qui indiquent sa mauvaise gestion et concourent de façon significative à la paupérisation des populations en termes de santé, d’urbanisation, d’économie et d’échanges.

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Les services de l’Agence du Bassin du Fleuve Niger (ABFN) continuent de développer des initiatives afin de permettre à notre pays de sauvegarder ce qu’il a de vital, l’eau. En parallèle, des initiatives d’acteurs bilatérales et multilatérales axées sur l’approvisionnement en eau, l’appui au programme d’irrigation, la pêche, l’énergie, le tourisme, etc. peinent à prendre la question à sa racine. Même la ratification  par le Mali des différents traités internationaux sur les questions relatives à l’eau et la protection de l’environnement n’a pas encore produit les résultats escomptés.

Ce qui reste indéniable est la nécessité de mettre en œuvre une stratégie de Gestion Intégrée des Ressources en Eau (GIRE) au Mali. La GIRE est un cadre stratégique très important dans le processus couplé de l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) et de la stratégie de développement durable telle que préconisée lors du Sommet Mondial sur le Développement Durable (SMDD) à Johannesburg en 2002.

Mais, trop souvent, la GIRE appliquée à l’échelle de grands bassins fluviaux se trouve confrontée au pragmatisme des réalités de terrain. Car il s’agit de rendre la GIRE opérationnelle à travers des programmes concrets. Le lien avec le terrain est donc indispensable. C’est dans ce sens que diverses initiatives de GIRE à un échelon local ont été développées notamment par l’ONG Wetlands International. Cette ONG est bien active dans le Niger Supérieur et le  Delta Intérieur du Niger . Ainsi dans le cadre de l’appui à la mise en œuvre de ses programmes majeurs, Wetlands International Mali a initié le Projet d’Appui à la Sécurisation des Moyens d’Existence et Biodiversité dans un climat changeant sur financement de l’Ambassade du Royaume des Pays-Bas au Mali, communément appelé BAM-GIRE. L’exécution d’un volet de ce projet vise l’habilitation de la société civile en vue de sa participation au processus du dialogue sur l’eau du niveau local au niveau transfrontalier. Dans cette optique Wetlands a procédé au renforcement des capacités de communication des hommes de média de sa zone d’intervention. Une occasion qui nous a permis de cerner l’impact négatif de l’orpaillage sur les cours d’eau du fleuve Niger, dans la zone de Selingué et de Yanfolila.

Quand le profit de l’orpaillage prend le dessus sur l’intérêt des collectivités

Comme un coup de pied dans la fourmilière, à Farabakana dans la commune de Tankandougou, à une dizaine de kilomètres de Sélingué, tôt le matin, le site est pris d’assaut par des orpailleurs. Pourtant à y voir de près, l’on ne s’empêche pas de se poser la question suivante : comment et pourquoi ce village perdu dans le feuillage a été transformé en une mine d’or par  ces hommes et femmes, pour la plupart des paysans ?

« La question ne se pose pas. L’or est un produit sacrée, seul Dieu détermine là où il met et à qui il donne » tranche Sabou Kamissoko. Elle est une dame âgée d’une trentaine d’années, mère de quatre enfants, dont trois laissés au village et l’autre sur son bras. Elle est tous les jours dans le bas-fond de Farabakana où elle excelle comme laveuse de pierres ressorties des puits forées par son mari. Elle ne se plaint pas. Avec l’espoir de devenir riche un jour, elle relègue au second plan les conditions pénibles de vie. Avec son enfant sur le dos, toute sa journée se passe dans ce grand trou à la dimension d’un petit cimetière urbain. Elle a pour devoir de soutenir son mari et, pour rôle,  de rincer la boue, des centaines de kilo de terre sortis des puits, pour ensuite tamiser les grottes qui sentent des pépites d’or. Les mêmes eaux utilisées pour ce besoin, servent à faire la vaisselle, les toilettes et même la cuisson.

Pourtant afin d’extraire les traces de la matière jaune des tas de sable, on utilise des produits hautement chimiques dont le mercure. « Nous n’utilisons que des gouttes de mercure » se défend Moussa Doumbia, un orpailleur artisanal, membre du ‘’Tomboloma’’ du site de Farabakana, ajoutant que cela n’a jamais eu de conséquences fâcheuses sur la population, même s’il reconnaît avoir perdu des collègues de travail a la suite  de maladies. « On peut tomber malade partout. On dramatise la situation dans les sites d’orpaillage alors que nous payons des taxes à la mairie et contribuons au développement de la localité » a-t-il gaillardement affirmé.

Même son de cloche chez les exploitants des dragues au niveau du cours d’eau principal de Wassoulou Balé à Yanfolila. Ceux-ci, à leur tour,  se fondent, en absence de toute autorisation légale, sur les taxes et redevances versées aux autorités coutumières et locales. «  Chaque exploitant de drague avant son installation dans le lit du Wassoulo Balé, paye une redevance de 125 000 de F CFA aux autorités coutumières et t une sommme annuelle de 25 000 de F CFA à la municipalité, de 32 000 de F CFA aux agents de la protection de l’environnement » soutient Macky Togo, responsable des orpailleurs par dragues installés sur les rives  des cours d’eau de Goualala et Konibarala sur le Wassoulou Balé.

Tous ces exploitants sont unanimes sur le fait que l’orpaillage, même nuisible pour la survie des populations, constitue une source de revenus importante pour les autorités municipales et coutumières des zones concernées.

Un Etat faible devant les dangers d’une pratique illégale !

Si l’orpaillage artisanal nuit à la santé des habitants et à l’environnement des localités qui l’abritent, une attention particulière mérite d’être portée sur un mode spécifique d’orpaillage florissant dans les contrées de notre pays, à savoir l’orpaillage par dragage.

Les statistiques disponibles évaluent l’exportation d’or du Mali à 70 tonnes par an. Avec un rang de quatrième producteur de métal précieux d’Afrique. Spécifiquement, selon nos sources, la production d’or du secteur informel est, par nature, difficile à quantifier, les évaluations vont de 10 à 36 tonnes. Et on décompte sur l’ensemble du territoire national plus d’un million de mineurs artisanaux, répartis sur 350 sites aurifères. Le constat laisse apparaître au cours des années 2010, une prolifération des dragues  artisanaux. De quoi s’agit-il ?

Communément appelé le dragage, cette activité  relève de l’orpaillage mécanisé. Il s’agit de la récupération de l’or par des procédés améliorés avec l’utilisation des machines et équipements. Comme pour la petite mine, son exercice est subordonné à l’acquisition d’une autorisation par arrêté du ministre des Mines. Mais à la différence de la petite mine, l’acquisition de son autorisation ne nécessite pas la justification d’un gisement.

Cependant, aussi alarmant que cela puisse paraître, peu d’exploitants d’or par drague dispose d’une autorisation d’exploitation. La plupart de ces machines pollueuses des eaux appartiennent à des nantis, tapis dans les services publics et haute administration. C’est pourquoi, les employés de ces dragues n’ont peur d’aucune sanction ou mesure contraignante.

Par le fait que la machine est fabriquée sur place par des soudeurs métalliques ( dont un grand atelier au niveau de Hamdallaye IMACY) à partir des matériels disponibles ( futs plastiques, un moteur Mercedes 190, un tuyau et une bouteille de gaz) son acquisition est facile, d’où son installation anarchique sur les eaux, au vu et au su de tout le monde.

La seule véritable mesure du Gouvernement a porté sur l’interdiction des activités de l’orpaillage en période hivernale. S’ensuivra-t-il le recensement des acteurs ?. Pour quelles retombées ?

Or, il est connu et confirmé que l’orpaillage par dragage à des impacts environnementaux  graves et des conséquences drastiques sur les ressources en eau. Pour les cours d’eau, la liste non exhaustive des spécialistes laisse apparaître : la détérioration de  la qualité physico-chimique, bactériologique, sédimentologique de l’eau, l’arrêt des écoulements des cours amont-aval. Que peut-on craindre de plus ?

Moustapha Diawara   

 

Par Le Sursaut

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