La phase finale de la Coupe d’Afrique des nations 2019 va se dérouler du 21 juin au 19 juillet en Égypte. Cette CAN 2019 devait initialement se disputer au Cameroun, en janvier-février, et avec seize équipes. Mais, en l’espace de cinq ans, l’organisation de ce tournoi a connu bien des vicissitudes et des bouleversements. « Tout est prêt », a cependant assuré le patron de la Confédération africaine de football, le Malgache Ahmad, à la veille du coup d’envoi.
De notre envoyé spécial au Caire,
« Je me sens heureux parce que la famille du foot africain se retrouve ici aujourd’hui pour cette première Coupe d’Afrique des nations à 24. » Dans une salle bondée, le président de la Confédération africaine de football (CAF) affiche sa décontraction à 24 heures du coup d’envoi de la CAN 2019. « Nous avons relevé ce challenge de changer [de format et de période, Ndlr] dès 2019, tous ensemble, lance Ahmad, en introduction d’une conférence de presse, ce 20 juin au Caire. Le chemin a été long et parsemé d’embuches voulues ou pas voulues ».
Le Malgache assure : « Je pense que tout est prêt pour l’organisation de cette Coupe d’Afrique des nations à 24 équipes. » Cette 32e édition a pourtant connu bien des vicissitudes. Rembobinons.
Un hommage à Issa Hayatou
Le 20 septembre 2014, le gouvernement du foot africain, le Comité exécutif (ComEx) de la CAF, réserve quelques grosses surprises aux amateurs de ballon rond. Ce jour-là, le ComEx décide en effet d’attribuer l’organisation respective des Coupes d’Afrique des nations 2019, 2021 et 2023 au Cameroun, à la Côte d’Ivoire et à la Guinée.
Le pays de Paul Biya, superpuissance sur les pelouses, ne brille en revanche pas par sa capacité à accueillir les grands événements sportifs. Pour preuve, la dernière CAN camerounaise remonte à 1972.
Mais le Cameroun compte un sérieux atout : le président de la CAF. Le Camerounais Issa Hayatou rêve d’achever son ultime mandat par un tournoi sur ses terres. Quelques années plus tard, certains de ses proches admettront d’ailleurs que confier la CAN 2019 aux autorités camerounaises était aussi un peu un hommage rendu à l’omnipotent patron du foot continental. Un peu comme l’Euro 2016 attribué à la France par la confédération européenne (UEFA), en cadeau à Michel Platini, alors président de l’UEFA.
La victoire d’Ahmad a tout changé
Seulement voilà, un vent de révolte commence à souffler à la CAF. Issa Hayatou est au pouvoir depuis 1988 et certains en ont assez. Sous le regard bienveillant de la Fédération internationale de football (FIFA), Ahmad vient détrôner le vieux « Lion » de Garoua, lors de l’élection présidentielle de mars 2017 à Addis-Abeba.
Le nouveau chef a l’ambition de tout changer. Et il n’a aucun tabou. Y compris au sujet de la Coupe d’Afrique des nations, la poule aux œufs d’or de la CAF. En juillet 2017, au Maroc, à l’issue d’un symposium, l’instance faîtière du foot africain estime que la CAN doit désormais se disputer en juin-juillet plutôt qu’en janvier-février, et avec davantage d’équipes (24 au lieu de 16).
Mis devant le fait accompli, les dirigeants camerounais décident toutefois de relever le défi. Le climat n’est pourtant pas au beau fixe avec la CAF. À plusieurs reprises, Ahmad exprime ses doutes quant à la capacité du Cameroun à organiser la CAN 2019, y compris avec seulement 16 participants.
Des Égyptiens opportunistes…
Le 30 novembre 2018, après plusieurs mois de discussions, de spéculations, de tensions et de visites d’inspection, la sentence tombe : la phase finale n’aura pas lieu chez les « Lions Indomptables ». Très vite, la CAF propose au Cameroun, champion d’Afrique en titre, de se consoler avec la tenue de la CAN 2021.
Reste la grande question : où va avoir lieu l’édition 2019 ? Le Maroc, candidat-malheureux à l’organisation de la Coupe du monde 2026 et très influent au sein de la CAF, semble être un recours idéal. Mais le pouvoir marocain n’a pas les mêmes ambitions que sa Fédération de football : il souhaite offrir les meilleurs « jeux olympiques de l’Afrique » de l’histoire. Des Jeux Africains 2019 (19-31 août) prévus seulement quelques semaines après la CAN.
Le Maroc n’étant pas postulant, l’Égypte s’engouffre dans la brèche. Les Égyptiens n’ont alors aucun mal à être choisis par la CAF comme remplaçants, face à leur seul adversaire : une Afrique du Sud ayant déposé un dossier faiblard.
… et ambitieux
Nous sommes le 8 janvier 2019 et il reste à peine moins de six mois à l’Égypte pour réussir son pari. Les autorités locales ne lésinent pas sur les moyens. Elles promettent de mettre en place un système de badges (FAN ID) pour les supporters, sur le même modèle que celui utilisé lors de la Coupe du monde 2018 en Russie. Elles comptent déployer 7 000 volontaires et des forces de l’ordre par dizaine de milliers.
À la CAF, le comité d’organisation (COCAN) propose une dizaine de grands stades et 24 terrains d’entraînement (un par équipe participante). La Confédération africaine de football retient quatre villes (Le Caire, Alexandrie, Ismaïlia et Suez) et six enceintes pour les matches.
L’heure de vérité
Malgré leurs nombreuses infrastructures – transports, routes, hôtels, stades – les Égyptiens courent néanmoins après le temps. Des entreprises britanniques sont chargées de refaire les pelouses pour que le spectacle soit à la hauteur. Le COCAN et la CAF travaillent nuit et jour pour justifier trois décisions cruciales : révolutionner la CAN, le faire dès l’édition 2019, et ce, dans un pays choisi à la dernière minute ou presque…
Et lorsqu’on demande à Ahmad si son équipe joue sa crédibilité, l’intéressé sourit : « Les ingrédients sont là pour la réussite de cette CAN 2019. Mais ça n’entame en rien les velléités de certaines personnes de toujours vouloir nous détruire. Ils vont toujours le faire. Et ce n’est pas la réussite de cette CAN qui va les arrêter. »
RFI