Le Niger risque d’enregistrer une hausse de 9% du taux de pauvreté d’ici 2050 à cause des effets du changement climatique dont l’impact est le plus fort dans ce dernier pays sahélien parmi les 4 autres de la sous-région, avertit un rapport de la Banque Mondiale.
Au cours d’une table ronde à distance ce lundi 19 septembre sur ce rapport dit national sur le climat et le développement (CCDR), récemment publié par le Groupe de la Banque mondiale pour les pays du G5 Sahel, M. Ousmane Diagana, vice-président de l’institution pour l’Afrique de l’Ouest et centrale et les auteurs du document ont détaillé les impacts économiques, sécuritaires, environnementaux du phénomène de changement climatique ainsi que les initiatives de l’institution financière internationale en la matière.
Il y ressort qu’au plan économique jusqu’à 13,5 millions de personnes supplémentaires pourraient basculer dans la pauvreté à travers la sous-région d’ici 2050, du fait des chocs liés au changement climatique, si des mesures urgentes en matière d’adaptation ne sont pas mises en place, avertissent les auteurs du rapport.
Trois des pays du G5 – le Niger, le Mali et le Tchad – figurent parmi les sept pays les plus vulnérables au changement climatique dans le monde et leur capacité d’adaptation est fortement limitée par la pauvreté et la fragilité, ont-ils fait observer, notant que le Sahel est particulièrement vulnérable à la dégradation des terres et la désertification. La région est en effet confrontée à une sévère augmentation des sécheresses, des inondations, et autres impacts causés par le changement climatique.
M. Ousmane Diagana, vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et centrale a insisté sur l’urgence et les actions de résilience, l’urgence et actions de croissance forte, durable et inclusive, l’urgence et actions pour la stabilisation et le développement durable, soulignant que la résilience et l’adaptation au changement climatique sont au cœur des actions de la BM.
Il a annoncé que dans son plan d’action en matière de changement climatique 2021-2025, l’institution internationale consacre 56% des 19,6 milliards de dollars à l’Afrique de l’ouest.
Au titre des initiatives en cours au Niger, le responsable financier a cité le programme kandadji, les projets sur le pastoralisme au sahel, la grande muraille verte pour une enveloppe de 5,1 milliards de dollars dont 2 milliards pour des projets concrets.
« Le changement climatique affecte sévèrement les populations et vient remettre en cause les gains de développement durement acquis. L’analyse indique que le changement climatique renforce les cycles de pauvreté, de fragilité, et de vulnérabilité dans le Sahel, » avertit Ousmane Diagana, vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et centrale. « Avec une population qui devrait doubler au cours des 20 prochaines années pour atteindre 160 millions de personnes, les pays du Sahel doivent accélérer leur croissance et prioriser l’adaptation climatique s’ils veulent concrétiser le dividende démographique et mettre la région sur la voie d’une croissance durable et inclusive. »
Les émissions combinées des pays du G5 Sahel ne dépassent pas 1 % des émissions globales de gaz à effet de serre et ces cinq pays se sont engagés à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Par ailleurs, lors de la COP 26 à Glasgow, le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Tchad ont pris l’engagement de stopper et inverser la déforestation et la dégradation des terres d’ici 2030, peut-on lire dans un communiqué de presse de l’institution de Bretton woods.
Les Contributions déterminées au niveau national (CDN) dans le cadre de l’Accord de Paris ainsi que les estimations du CCDR indiquent que les besoins de financement des pays du G5 Sahel en matière d’actions climatiques se chiffrent à plus de $30 milliards de dollars. Le rapport montre que les dégâts causés par le changement climatique peuvent être significativement réduits.
« Il existe de réelles opportunités pour développer un Sahel plus résilient, » selon Clara de Sousa, Directrice des opérations de la Banque mondiale pour le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Tchad, citée dans le texte.
« Ce rapport fournit une feuille de route pour aider les pays à accélérer les réformes et les investissements afin de diversifier leurs économies et les rendre plus résilientes et plus inclusives. Il propose des démarches pour les reverdir en restaurant les terres dégradées et stimulant les opportunités économiques pour les communautés, par le biais de programmes tel que l’initiative de la Grande muraille verte. », Affirme-t-elle.
Des millions de personnes à travers la région sont exposées au risque ou déjà en situation d’insécurité alimentaire, du fait d’une production agricole décevante liée aux chocs climatiques, à la montée de l’insécurité, et à des prix alimentaires élevés. La crise de la sécurité alimentaire au Sahel devrait encore s’aggraver en 2022.
Pour atténuer l’impact de cette crise et aider le secteur agricole à développer sa résilience climatique à moyen terme, il convient d’étendre les programmes de protection sociale et les initiatives en faveur des paysages agricoles pour adopter de meilleures pratiques de gestion des ressources et accroître l’usage des technologies adaptives. Les cinq pays développent actuellement des systèmes de protection sociale adaptative permettant d’offrir régulièrement des transferts monétaires et des services aux ménages les plus pauvres et les plus vulnérables, afin de leur permettre de s’adapter et de faire face aux chocs climatiques à venir.
Le rapport propose d’autres recommandations de politiques pour étendre les acquis en matière de développement et d’adaptation dans cinq domaines ou secteurs spécifiques : les institutions, le financement climatique et l’atténuation des risques, l’énergie, la gestion des paysages et les villes.
Au cours des trois dernières années, le Groupe de la Banque mondiale a fourni un niveau de financement record aux pays du G5 Sahel dans le cadre de sa stratégie d’aide aux pays affectés par la fragilité, les conflits et la violence, informe l’institution. Les financements de l’Association internationale de développement (IDA) s’élèvent à 8,9 milliards de dollars sur la période. Cependant les besoins engendrés par la crise climatique et la reprise économique post-COVID-19, l’insécurité croissante et la crise alimentaire, ainsi que les effets de la guerre en Ukraine sur les prix mondiaux des produits alimentaires, des engrais et de l’énergie exigent un soutien accru de la part de la communauté internationale.
Les rapports nationaux sur le climat et le développement (CCDR) du Groupe de la Banque mondiale sont considérés comme de nouveaux outils qui établissent un diagnostic de fonds intégrant à la fois les considérations liées au changement climatique et au développement. Ils permettront aux pays de prioriser les actions ayant le plus grand impact pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) et accélérer l’adaptation, tout en réalisant les objectifs de développement plus vastes. Les rapports CCDR s’appuient sur des travaux de recherche et des données rigoureuses et identifient les principales pistes pour réduire les émissions de GES et la vulnérabilité climatique. Pour y parvenir, ils incluent notamment les coûts et les défis, ainsi que les bénéfices et les opportunités impliquées par ces actions. Les rapports suggèrent des actions concrètes et prioritaires pour encourager la transition vers des économies sobres en carbone et résilientes.
Agence Nigerienne de Presse