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Niamakoro 30 mètres : L’agrandissement d’une mosquée fait des sans-abris

Depuis un certain temps, le torchon brûle entre les habitants de Niamakoro 30-Mètres, les membres du Comité de gestion de la mosquée. En effet, pour l’agrandissement de leur mosquée, les membres du comité de gestion n’ont pas hésité à saisir et à démolir des maisons contiguës à la mosquée pour ajouter cet espace à la mosquée. Ce qui mit le feu aux poudres entre les jeunes et les membres du comité de gestion de la mosquée. Dans cette correspondance, un observateur relate les faits.

Cette histoire rocambolesque a commencé vers l’année 2001. En effet, à cette date, le comité de gestion de la mosquée de Niamakoro 30-Mètres près des feux tricolores, en complicité avec le bureau communal de la mairie de la Commune VI du district de Bamako, a demandé la démolition des maisons contigües à ladite mosquée afin de l’agrandir. Le comité de gestion de la mosquée est composé de Bakary Traoré (président), Lassine Coulibaly, Ousmane Kouyaté, Ousmane Coulibaly (imam), Haïdara (1er adjoint à l’imam) et Togola (muezzin).

Ce comité de gestion, avec l’aide du maire d’alors, a saisi le Tribunal civil de la Commune VI du district de Bamako, d’une action d’expulsion et de démolition des concessions d’Amadou Maïga et de Jean-Elie Diarra. Ces derniers ont perdu le 1er jugement et devant la Cour d’appel de Bamako. Ce qui n’a pas été sans conséquence. Jean-Elie Diarra n’a pas pu supporter cette décision de justice. Il mourut laissant derrière lui son épouse qui a continué à habiter la maison.

Devant cette injustice, des voisins et des jeunes du quartier ont apporté leur soutien aux deux familles en s’opposant catégoriquement à toute expulsion et démolition des deux concessions au profit de la mosquée. Car, pour eux, cette décision de démolition de l’habitation est contraire à l’islam qui parle de tolérance, de pardon, d’union, de solidarité et de paix.

Mais la 2e chambre civile de la Section judiciaire de la Cour suprême, dans son pourvoi n°08-378 du 20 novembre 2015 et son arrêt n°266 du 9 octobre 2017, a ordonné le 16 novembre 2017, l’expulsion et la démolition des deux concessions. De leurs côtés, le comité de gestion et la mairie parlaient d’une notification de réhabilitation et de recasement des deux familles à Yirimadio. Mais cette information a été démentie par le cabinet d’études de Me Madiboye Bah, huissier de Justice, près de la Cour d’appel de Bamako.

Dans sa sommation interpellatrice en date du 26 avril 2016, il assure que cette même notification de la même mairie se trouve déjà occupée par une certaine dame répondant au nom de Kadia Salamata. C’est ainsi que le pire arriva le 18 décembre 2018 entre 6 h et 8 h du matin. A la surprise générale des populations, 3 pick-up et un camion rempli de gardes sont venus encercler la mosquée et les maisons à démolir.

Selon le capitaine qui dirigeait l’opération, les gardes étaient venus pour sécuriser les deux représentants du cabinet d’huissier et le chauffeur de la machine afin qu’ils puissent faire correctement leur travail. C’est ainsi que les maisons d’Amadou Maïga et de feu Jean-Elie Diarra furent démolies en plus d’une partie des maisons appartenant à Nana Fomba, Ténin Kéita et Broulaye Diarra. Après la démolition de leurs maisons, ces familles qui résidaient à Niamakoro depuis une quarantaine d’années, sont devenus des sans-abris. Au nom de l’agrandissement de la mosquée.

Devant ce désastre et cette injustice, les jeunes du quartier se sont révoltés et ont décidé de démolir la mosquée et les maisons des membres du comité de gestion. Heureusement, des personnes de bonne volonté ont ramené les jeunes à de meilleurs sentiments en leur demandant de surseoir à leur décision et de chercher une solution pacifique et humaine comme le demande l’islam.

C’est ainsi qu’une commission de dialogue et de négociation dénommée “Tiénfo Ani kanbèn” (dire la vérité pour l’unité) a été mise en place. Présidée par Mahamadou Traoré avec comme président d’honneur le vieux Moussablé, cette commission a rencontré l’imam de la mosquée qui dira qu’il n’est au courant de rien ni dans cette affaire ni dans tout ce qui se passe à la mosquée. A ses dires, son seul rôle dans la mosquée est de faire prier les gens.

Approché, le président du comité de gestion dira qu’il ne décide pas seul dans le comité. Durant la rencontre entre la commission et le président de la communication domaniale de la mairie, Hassèye Dicko, ce dernier indiquera que parmi les victimes personne n’a été recasée et que la mairie n’a aucune place de recasement. Il précisera que la décision ne devrait pas y être car c’était un plan de projet et non d’application.

Ensuite, une grande rencontre a eu lieu au domicile du chef de quartier entre la commission “Tiénfo Ani kanbèn”, la mairie, le chef des griots et les conseillers du chef de quartier. L’objectif de cette réunion était de trouver une solution idoine à la crise. Les responsables du comité de gestion de la mosquée n’ont pas participé à cette réunion.

Dans le cadre du recasement des victimes, la commission “Tiénfo Ani kanbèn” a entamé des démarches auprès du président du Haut conseil islamique, Mahmoud Dicko, Macky Bah, l’AMDH et la Cour suprême. Entre-temps, le vendredi 11 janvier 2019, un inconnu a mis le feu dans une partie de la mosquée. Et un argument était tout trouvé pour accuser les jeunes d’être à la base de ce feu. Et sans discernement, le commissaire du 10e arrondissement procéda à l’arrestation de 11 personnes qui passèrent le week-end au violon.

Le lundi, les 11 personnes ont été conduites devant le procureur puis déférées à la Maison centrale d’arrêt de Bamako. Mais le président d’honneur de la commission, Moussablé, a été libéré suite à l’intervention d’un de ses fils qui est colonel de l’armée. Le jeune Adama Nostrani aussi sera libéré. Les 9 autres sont toujours en détention, 8 à la prison centrale et l’unique vieille femme est au centre de Bolé.

Le même vendredi dans l’après-midi, les imams de Niamakoro se sont réunis pour condamner le feu allumé à la mosquée. Ils ont demandé une rencontre pour gérer la situation au nom de l’islam. Si les autorités du pays ne s’impliquent pas dans la résolution de cette crise, la situation risque de dégénérer à cause des multiples chasses à l’homme et des arrestations. Au moment où le Président de la République, le ministre des Affaires religieuses et du Culte et le Haut Conseil Islamique œuvre pour que l’Islam soit un facteur de cohésion et de paix,  des groupes d’individus se cachent derrière l’Islam pour saboter la religion musulmane.                                                                  

Fakoly Berthé, Niamakoro

Source: Aujourd’hui-Mali

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