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Mouhamed Ali Ag Ibrahim : Le ministre du blingbling

Dès son installation à la tête du ministère du Développement industriel, département qu’il pilote depuis sa création, Mouhamed Ali Ag Ibrahim a placé la barre très haut, notamment avec un discours qui a fait rêver tous les industriels du Mali, aujourd’hui navrés de constatés qu’ils ont été tout simplement bluffés. En effet, en lieu et place d’une véritable politique de développement industriel ponctuée par des mesures fortes, comme l’a toujours demandé l’Organisation patronale des industriels, on a droit à du folklore, du tape-à-l’œil, voire tout simplement du blingbling. 

En dressant le tableau des nombreuses potentialités du Mali pour en déduire qu’il suffit tout simplement de traduire en actes concrets la volonté exprimée par le chef de l’Etat pour booster le secteur industriel du Mali, le ministre du Développement industriel, Mouhamed Ali Ag Ibrahim, ne savait si bien dire car il n’a malheureusement pas pu poser lesdits actes. Au fil des jours, il s’est révélé comme un théoricien, voire un piètre rhétoricien qui se gausse de formules sophistes, comme pour opposer des mots aux maux.

En effet, à la faveur du remaniement ministériel intervenu en juillet 2016, il a été créé un Département spécifiquement dédié au Développement industriel. C’est la preuve que l’accélération du processus d’industrialisation figure clairement au rang des priorités du président de la République.

Mais pourquoi donc diable attendre un an après, pour se fendre d’un plan d’urgence du développement industriel, singeant ainsi le programme d’urgence sociale du président de la République, alors que l’urgence du Développement industriel est elle-même à la base de la naissance de ce ministère ?

C’est pourquoi, d’ailleurs, les missions dévolues à ce ministère sont : créer un environnement à la promotion des industries ; suivre ls unités industrielles et mettre en œuvre les actions ou stratégies de renforcement de leur compétitivité et de leur contribution au développement économique et social du pays ; élaborer et contrôler l’application des règles en matière d’implantation et d’exploitation des industries ; aménager des zones industrielles ; promouvoir et développer la propriété industrielle ; élaborer et contrôler l’application des normes de qualité dans la fabrication des produits industriels.

Nous voyons déjà tous les industriels sérieux en train de sourire en lisant ces différentes missions qui ont été tout simplement ratées par le ministre Mouhamed Ali Ag Ibrahim, lequel a surtout excellé dans le tape-à-l’œil, surtout pour rabâcher ses formules à l’emporte-pièce et citer des passages de discours du président de la République, à l’occasion de ses nombreuses visites d’unités industrielles, très souvent avec une participation financière de l’entreprise visitée, sur la base d’un état présenté par le chef de Cabinet. Raisons invoquées pour saigner l’entreprise, la prise en charge du volet communication de cette visite qui offre de la visibilité à l’entreprise par une couverture médiatique télévisuelle, radiophonique et de la presse écrite.

En quelque sorte, en faisant croire à une promotion de l’entreprise, c’est le ministre qui faisait sa propre promo en occupant tout le temps une bonne partie de l’espace médiatique nationale, pour en mettre plein la vue et l’ouïe au président de la République. Alors qu’il faisait du sur place et recueillait les mêmes doléances un peu partout. La presse était donc un bon prétexte pour faire cracher des sous aux entreprises visitées…et si on ne nous croit pas, le Bureau du vérificateur général et d’autres structures de contrôle peuvent s’intéresser à ce deal.

Finalement, les visites se raréfiaient et les entreprises ciblées se rétractaient parce que les industriels avaient commencé à se passer le mot d’ordre, récusant ainsi, poliment, des visites inutiles et coûteuses, alors que ce qui est attendu du ministère, ce sont des initiatives pour régler les différends problèmes qui sont d’ailleurs connus et dont l’acuité a amené à la création de ce ministère.

Pourtant, le Livre Blanc de l’Organisation patronale des industriels (Opi) constituait déjà un très bon chantier, puisque contenant le diagnostic des problèmes, disons des contraintes du secteur industriel, tout en proposant des esquisses de solutions. En effet, ce Livre Blanc sous-titré “Pour un développement économique solide, créateur de richesses et d’emplois” a été produit après de sérieuses études d’experts commanditées par l’Opi. Ce document contient 24 mesures pour relancer l’industrie malienne. Il part d’un ensemble de constats de la situation de l’industrie malienne, avant de décliner la vision stratégique qui a conduit à la formulation des 24 mesures préconisées, non sans lister les différentes filières porteuses pour l’industrie nationale.

Mais contre tout attente, le ministre Mouhamed Ali va ignorer ce travail méticuleux, ô combien précieux, pour se lancer dans ce qu’il a appelé “une journée d’échanges avec les patrons des entreprises industrielles, notamment sur les difficultés qu’ils rencontrent et les solutions les plus appropriées pour les résoudre”. L’objectif général était ainsi défini : “Impliquer les entreprises, pour une meilleure prise en compte de leurs préoccupations, dans la formulation des politiques et stratégies de développement industriel”.

Tenue le samedi 04 février 2017 dans la salle Moussa Balla Coulibaly du Conseil national du patronat du Mali (Cnpm) sous la présidence du Ministre Mouhamed Ali Ag Ibrahim, ce fut une véritable foire d’empoigne entre les industriels, la douane, les impôts et l’administration, avec un niveau de débat qui ne pouvait, naturellement, produire un contenu à la hauteur du document de l’Opi. A la fin de la journée, 25 propositions et recommandations ont été formulées dont seulement 6 à l’endroit des industriels. Les 19 autres, destinées à l’Etat, ne font que recouper les propositions de l’Opi, avec une formulation qui laisse à désirer. En plus, en guise de propositions de solutions, on relève des déclarations du genre : “Veiller au développement des énergies renouvelables”. Est-ce que l’on a besoin d’organiser une journée de concertation pour consigner pareilles propositions que pourraient même formuler un élève de 6è année de l’école fondamentale ?  Ce qui a manqué le plus à cette journée, ce sont des pistes de solutions, comme l’a fait l’Opi.

Mais voilà qu’en attendant des réponses aux préoccupations, le ministre sort de sa boîte à rêver un Salon international de l’industrie. Que peut bien régler ce salon alors que, entre autres obstacles au développement industriel, des questions persistent comme celles relatives aux infrastructures, aux zones industrielles, à l’environnement des affaires, aux contraintes liées à la continentalité du Mali et à la réglementation sous régionale et régionale défavorables aux pays de l’hinterland comme le Mali, en plus de la criarde question énergétique ?

On a beau amener les meilleurs industriels turcs au Mali, leurs engagements resteront sur du papier tant que ces questions essentielles ne trouveront pas de réponses parce qu’ils procèdent à des études sérieuses avant d’investir dans le pays. C’était donc au ministère du Développement industriel, spécialement créé à cet effet, de faire preuve d’innovation et de professionnalisme pour les résoudre, au lieu de tourner en rond dans des activités qui relèvent plutôt du folklore, voire du blingbling.

 La Rédaction

Aujourd’hui-Mali

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