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Mopti : IBK donne des leçons de patriotisme à l’armée

Elle s’inscrit dans le sillage de la préservation de l’unité nationale et de l’intégrité territoriale du Mali que les pourparlers inclusifs entre l’Etat et tous les groupes sociologiques doivent réaffirmer et entériner, mais aussi en droite ligne de la feuille de route de la commission Vérité, Justice et Réconciliation (CVJR).

 

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Ces recommandations s’inspirent de confidences, de causeries et de plaidoyers recueillis au cours d’un séjour de quatre jours effectué dans la région de Mopti du 17 au 20 Mars 2014, dans le cadre de la visite du Président IBK dans cette région en pleine convalescence. D’intéressantes observations faites à l’occasion des nombreux déplacements effectués par la délégation présidentielle, m’ont permis de procéder à beaucoup de recoupements qui militent tous pour l’impérieuse nécessité, de la part de l’Etat, de créer, dans les plus brefs délais, le cadre adéquat pour l’instauration du concept d’Armée-Nation dans les zones sinistrées. L’instauration de celle-ci est progressive, perfectible et continue. Elle ne doit, par conséquent, attendre ni les pourparlers inclusifs de paix, ni les travaux de la CVJR, à la réussite desquels elle pourra même largement contribuer, à tous les niveaux des processus en cours.

La cicatrisation lente et douloureuse des plaies

La grave crise sécuritaire qui a sévi au nord du Mali en 2012, dont les 2/3 du territoire avaient fini d’être occupés par une alliance satanique entre des narcotrafiquants et des extrêmistes qui se réclamaient de la foi islamique, s’est malheureusement traduite en une crise sociale qui a  réussi à installer la confusion dans l’esprit et le cœur de nombreux compatriotes, victimes de  toutes sortes d’exactions les plus inhumaines les unes que les autres. L’intervention militaire SERVAL qui a eu pour heureux résultat de bouter les occupants tortionnaires hors du Mali et   d’affranchir les populations maliennes du joug infernal qu’elles subissaient, a eu pour effet  symbolique de présenter la France comme sauveur des populations contre la furie meurtrière  de leurs « frères en Islam » pseudo-jihadistes. Au-delà des considérations géopolitiques et  géostratégiques certaines sur lesquelles les intellectuels et autres observateurs avertis peuvent  légitimement épiloguer éternellement, il convient de corriger très vite la perception négative et légitime que les populations maliennes pauvres et peu instruites continuent à avoir de  leur armée. Pour elles, ce sont des militaires français qui sont venus à leur secours pour les tirer  des griffes criminelles de pseudo-jihadistes illuminés qui se sont alliés à d’autres maliens bon teint. Les autorités religieuses et coutumières peinent encore à convaincre, par de simples  prêches et causeries mondaines, des populations traumatisées sorties droit de l’« enfer », en voulant leur faire comprendre que, d’une part, les français les ont secourues, non pas par bonté et par générosité, mais par un souci égoïste de défendre des intérêts cachés et que,  d’autre part, leurs ex-bourreaux ne sont pas mauvais, mais se sont simplement trompés ou que l’armée malienne est capable d’assurer désormais leur sécurité. Ce genre de discours n’est pas pertinent aujourd’hui et ne peut passer auprès des  populations dont les blessures psychologiques et morales sont encore fraîches et douloureuses. Le fait de tenir ce genre de discours risque même, à terme, d’entamer la crédibilité de leurs auteurs.

Parce que personne ni rien ne peut effacer de la tête des populations maliennes des zones visitées, en majorité musulmanes, que ce sont des musulmans comme elles qui les ont agressées, humiliées, torturées, violées et même tuées avant de les dépouiller de leurs biens et chasser de leurs domiciles et de leurs terres. Que ce sont des français et autres européens qui  ont chassé ces tortionnaires, réinstallé les malheureuses populations chez-elles tout en sécurisant leurs personnes et leurs biens jusqu’aujourd’hui.

Un frémissement salutaire de la fibre patriotique qu’il faut entretenir

C’est le lieu d’apprécier toute la symbolique du séjour du Président IBK dans ces zones qui portent encore les stigmates de l’occupation, visibles partout par le fait de l’afflux massif de déplacés fuyant les zones jadis occupées, mais aussi les stigmates de la guerre qui rappellent encore les premières heures de l’intervention SERVAL. Les populations des zones visitées ont senti, quatre jours durant, la présence du POUVOIR dans leurs murs. Sans être sûres que ce pouvoir -là est en réalité le leur, elles sont quand-même convaincues que celui-ci est entre de  bonnes mains. Elles se sont senties importantes, parce que le Président leur donne de  l’importance en venant dormir chez-elles, avec elles. Rien que l’impact psychologique d’une telle symbolique vaut que ce genre de visites soient renouvelées régulièrement et élargies partout à travers le Mali profond, de Bamako à Kayes, de Siguiri à Kidal.

 

Le rempart sociologique pour l’instauration urgente de l’Armée-Nation

 

Le Président IBK est certes le chef suprême des armées, mais pour redorer le blason de l’administration malienne, surtout les militaires, auprès de ces populations profondément atteintes, il urge de renforcer considérablement l’autorité des  guides religieux et des pouvoirs coutumiers, afin qu’ils réussissent la phase de reconstruction psychologique, sociale, mais surtout économique. Ils représentent des relais solides et naturels de l’Etat, dans leur rôle précieux de régulateurs sociaux. En attendant de leur trouver une place adéquate dans  l’architecture institutionnelle du Mali, la République gagnerait à s’appuyer sur ces sagesses puissantes et silencieuses, dont l’autorité est incontestable et incontestée dans ce pays, pour accélérer la construction de l’Etat-Nation, avec la participation effective et massive des militaires, policiers et gendarmes maliens, dans les activités de restauration des habitats et autres édifices privés (boutiques, mosquées, églises, maisons communautaires, salles de loisirs, etc…), dans l’assistance humanitaire (distribution de vivres, de kits d’hygiène, de produits médicaux, etc…), dans leurs activités professionnelles (agriculture, pêche, élevage, etc…). Cette démarche aura pour avantage immédiat d’atténuer considérablement les souffrances physiques des populations autochtones tout en améliorant leur environnement naturel et d’instaurer une relation de confiance entre elles et leurs Forces de Défense et de Sécurité.

Mais, si jamais nous laissons entre les seules mains des partenaires au développement et des militaires étrangers cette importante et dernière phase de rattrapage, l’Etat aura alors failli à sa  principale mission de raffermissement de l’unité nationale, en jetant des millions de maliens  affaiblis dans les bras de l’« occident sauveur ». Une dangereuse perspective à éviter à tout prix, sans chauvinisme aucun, mais pour des soucis de sauvegarde de la souveraineté du Mali.

 

La Défense et la Sécurité militaires par le cœur, l’esprit et les mains

 

L’approche doit désormais complètement changer dans la gestion de la situation d’après crise de la part des pouvoirs publics. Il faut désormais que les Forces de Défense et de Sécurité soient au cœur du dispositif de réconciliation nationale, par leur implication massive dans toutes les activités civiles de « réapprentissage de la vie collective au quotidien » qu’entreprennent les populations pour se réapproprier leur environnement physique et pour renforcer leur équilibre moral. Il ne s’agit plus de distribuer seulement des vivres à ces  populations, mais de financer des parcelles de production alimentaire que les militaires aideront à mettre en œuvre; ni de se limiter à distribuer des médicaments, mais plutôt de s’appuyer sur les soldats pour aider à construire des hôpitaux et des pharmacies et les faire fonctionner; pas plus de distribuer des tentes et des couvertures, mais de construire des milliers de logements sociaux décents avec la participation du génie militaire. Il ne s’agit surtout plus de distribuer des cahiers, des crayons et des livres, mais de bâtir des écoles et des universités pour prendre en charge de manière qualitative la totalité de l’éducation des enfants des millions de populations victimes de cette crise sécuritaire. Tout cela pour dire que la  question des populations victimes, dépasse désormais de loin le cadre ordinaire d’actions ponctuelles de solidarité noble entre citoyens et de soutien aux déshérités; c’est devenu un problème structurel qu’il convient de prendre à bras le corps, définitivement et dans sa globalité. Il s’agira de créer les conditions d’un engagement financier massif et direct au profit des populations, plus effectif du point de vue de l’importance de l’investissement dans les infrastructures d’habitat, d’éducation, de santé et d’activités culturelles, avec un point d’honneur mis sur la participation obligatoire des Forces de Défense et de Sécurité qui seront au service des populations qui ont dû beaucoup souffrir de leur carence coupable durant l’occupation et dont la confiance mérite d’être conquise progressivement. La Défense et la Sécurité ne sont ni antinomiques ni incompatibles avec la stratégie exposée; au contraire, celle-ci les crédibilise en leur octroyant un fondement démocratique et populaire plus ample. Cette symbiose entre l’armée et les citoyens vulnérables est le principal gage d’une sécurité durable et efficace qui doit présider à la construction du socle de souveraineté sur lequel le Mali Nouveau doit se construire avec tous ses enfants.

 

Aliou Badara Diarra

Source: L’Enquêteur

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