La coupe du monde de football 2018 bat son plein en Russie et tous les regards y sont actuellement rivés. Présente dans cette compétition planétaire avec 5 représentants, l’Afrique laisse à envier avec déjà 4 équipes éliminées dès la phase de poules. Pour analyser cette contre-performance des équipes africaines à cette coupe du monde et ainsi faire le bilan de leur participation, nous avons approché deux connaisseurs du ballon rond, mais pas forcément avec les mêmes qualifications. C’est donc intéressant de croiser les deux regards. En plus de la participation africaine, ils ont également évoqué l’utilisation de l’assistance vidéo pour l’arbitrage.
Paroles d’experts, peut-on dire en écoutant Mohamed Magassouba, sélectionneur des Aigles du Mali et directeur technique de la Fémafoot, et Boubacar Baba Diarra, ancien président de la Fémafoot. Deux vrais connaisseurs du ballon rond que nous avons approchés pour recueillir leur point de vue sur la participation des équipes africaines et l’assistance vidéo pour l’arbitrage.
Magassouba : “Il nous faut beaucoup travailler sur le plan technico-tactique”
Technicien de statut international, le coach Magasouba nous livre une analyse technique et statistique de la participation des équipes africaines qui, selon lui, doivent s’améliorer sur le plan technico-tactique. “Si nous faisons un bilan en termes de statistiques générales on peut comprendre que pour tous les matchs joués jusqu’aujourd’hui, l’Afrique a effectué 13 sorties et en ses 13 matchs (sans compter les 3e sorties du Sénégal et de la Tunisie). L’Afrique a encaissé 23 buts contre 14 buts marqués avec seulement 2 matchs gagnés. L’Afrique, en toute cette phase de poules, c’est 9 matchs perdus et deux matchs nuls. L’Afrique à de gros efforts à faire sur le plan offensif.
Une faille africaine dans cette compétition, c’est sur le plan de l’organisation défensive. Là aussi nous ne sommes pas au point par rapport aux autres nations de football moderne. Donc il va falloir revoir toute la stratégie sur le plan de l’organisation offensive et tactique : comment récupérer le ballon. Cela signifie que nous n’avons pas encore compris que le football c’est aussi récupérer le ballon, défendre et protéger son but. Donc tant que tactiquement nous ne mettons pas beaucoup de rigueur sur le plan de la récupération de la balle et la protection de nos buts, on ne peut pas être au même diapason que les autres nations de football. Il nous faut beaucoup travailler sur le plan technico-tactique. Au regard des statiques, nous sommes encore insuffisants. Le football d’aujourd’hui ou le football moderne se situe à deux points essentiels qui sont les transitions offensive et défensive. Ces deux phases de jeux déterminent aujourd’hui le résultat des équipes africaines”.
“L’assistance vidéo est une grosse erreur de la Fifa” dixit Magassouba
Comme bon nombre d’observateurs footballistiques à travers le monde, le directeur technique de la Femafoot n’applaudit pas cette technologie qu’il considère comme une grosse erreur de la part de la maison faitière du football mondial : “Je crois que l’assistance vidéo est mal utilisée. Il faut qu’on oriente l’utilisation de cette technologie. S’il faut que le pouvoir discrétionnaire de l’arbitre continue de solliciter le concours de l’assistance vidéo, cela fausse tout le calcul. Et en faisant appel à l’assistance vidéo, l’arbitre peut favoriser une équipe sur son adversaire. La Fifa a commis la plus grosse erreur parce qu’en plein XXIe siècle, lorsqu’on veut mettre en place une telle technologie, il faut faire appel à tous les techniciens du monde pour voir les contours et détours de son utilisation, le comment, quand et pourquoi utiliser. Je pense que tous ces questionnements-là n’ont pas été posés ou n’ont pas eu de réponses et nous voici dans l’utilisation de cette technologie qui nous envoie chaque jour dans un autre débat ”
Boubacar Baba Diarra, ancien président de la Fémafoot : ” Ce qui nous handicape le plus c’est l’expertise organisationnelle “
De son côté, l’ancien patron de la Femafoot s’appesantira sur l’aspect organisationnel des équipes africaines : “Nous constatons à travers cette coupe du monde que le football africain a aussi progressé parce qu’étudiant déjà, j’ai assisté à la participation des équipes africaines au Mondial comme le Cameroun et le Congo Zaïr,e qui ont pris des cartons dans le temps. Mais aujourd’hui, les équipes africaines font jeu égal avec les équipes européennes. Cependant, il nous faut encore un tout petit peu de temps pour procéder à des réglages organisationnels.
Sur le plan technique, les équipes africaines rivalisent avec les équipes européennes, mais à mon avis, ce qui nous handicape le plus c’est l’expertise organisationnelle. Car en Europe, vous pouvez trouver autour d’un sélectionneur national, une batterie de techniciens qui donnent, chacun, des conseils dans son domaine. Mais en Afrique, on n’a pas les moyens pour s’offrir autant de techniciens pour entourer un entraineur national. La différence entre les équipes africaines et les autres équipes c’est qu’elles sont mieux organisées, préparées et coachées que les équipes africaines.
” L’Assistance vidéo dénature le football ” dixit Boubacar Baba Diarra
En ce qui concerne l’utilisation de l’Assistance vidéo dans football, Boubacar Baba Diarra abonde dans le même sens que le technicien Magassouba. Selon lui, cette technologie ampute sa valeur réelle au football. “Je crois qu’avec cette technologie, on enlève au football son piment, son arôme, parce qu’une erreur d’arbitrage fait partie du football. Une erreur arbitrale est ce qui en rajoute à la saveur du football.
Alors, moi je dis que c’est une grave erreur. D’abord arrêter le match pour aller consulter l’assistance vidéo, c’est comme les temps morts d’un match de basket-ball. Cette technologie dénature le football. Il faut laisser le football dans son contexte. On peut moderniser le football, mais pas de la sorte” s’insurge-t-il.
Réalisé par Youssouf KONE
Source: Aujourd’hui-Mali