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Moctar Ouane face au CNT : le peuple se prononce.

Cinq mois après sa nomination au poste du Premier ministre, Moctar Ouane a pris date avec le Conseil National de la Transition (CNT) le vendredi 19 février 2021 pour le grand oral de son Programme d’Action du Gouvernement (PAG) au Centre International de Conférences de Bamako. Ce plan qui constitue la feuille de route pour la réussite de la transition et qui attend le feu vert du CNT sème à la fois le doute quant à l’ambition des actions mais aussi l’espoir pour le renouveau de l’action publique.

Selon Moctar Ouane, le 19 février marquera d’une pierre blanche les annales de la présente Transition au Mali. Au-delà du rituel, indique-t-il, l’exercice constitue un temps fort dans une période charnière de l’Histoire du pays :« En effet, la présente séance consacre, d’une part, l’achèvement de l’architecture institutionnelle de la Transition avec la mise en place et le fonctionnement du Conseil national de la Transition et, d’autre part, elle inaugure le dialogue entre l’Exécutif et le Législatif, deux pouvoirs phares de notre vie démocratique. Oui, aujourd’hui, le Gouvernement vient au Conseil national de la Transition pour s’adresser, à travers lui, à notre peuple et lui dire dans quelle direction il compte le conduire au cours des prochains mois », a déclaré Moctar Ouane.

Il révélera que ce Plan comporte 6 axes déclinés en 23 objectifs, adossés à 275 actions à évaluer à travers 291 indicateurs. Selon M. Ouane, cet ensemble cohérent d’actions vise à atteindre, dans un horizon précis, des objectifs définis, avec des moyens identifiés dans le respect du temps imparti et des équilibres macroéconomiques et financiers. « La mise en œuvre du Plan d’action du Gouvernement contribuera aux réformes politiques et institutionnelles nécessaires à la consolidation de la démocratie, c’est-à-dire à renforcer la stabilité des institutions démocratiques et républicaines et à améliorer la gouvernance », a-t-il souligné avant d’assurer que le Gouvernement reste déterminé à mener à bien ce plan dans les délais convenus.

Pour le politologue Bréhima M. Koné, ce programme a tout pour réussir la transition et redresser le pays : « sans jeter des fleurs au Premier ministre, parce que je suis plutôt intéressé par les indicateurs, en termes d’évaluation des actions publiques. Il faut quand-même noter qu’il a une très grande maîtrise des enjeux du pays, et ambitionne de réduire ou de minimiser les souffrances du peuple Malien avec ce programme bien élaboré. Un programme ambitieux pour le renouveau de l’action publique. Maintenant, la transition pourrait-elle relever tous ces défis ? Le Premier ministre aurait-il le pouvoir et les leviers du pouvoir pour réussir la mise en œuvre de la feuille de route de la transition ? Serait-il buté à des blocages, avec la classe politique, si un cadre de concertation n’est pas créé éventuellement pour décrisper le front socio-politique ? ».

Quant à Abdramane Diarra, Président de la jeunesse de l’URD, il estime que ce programme est en décalage avec les conclusions des concertations nationales qui ont abouti à la charte et à la feuille de route définie en septembre 2020 : « Nous avons discuté pendant trois jours au CICB en septembre 2020 dans le cadre des concertations nationales pour donner une orientation à la transition. Les livrables de ces échanges ont été la Charte et la feuille de route de la transition. Nous avons tenu à ajouter que le gouvernement de la transition, avant toute autre action, établira un plan d’actions de cette feuille de route pour donner un moyen de suivi et d’évaluation de la transition. Mais eu égard à l’exercice auquel s’est prêté le Premier Ministre devant le CNT, je suis au regret de constater que nous avons assisté une autre présentation de cette feuille de route alors que la majorité des membres du CNT ont pris part à ladite concertation nationale. Pour rappel, un plan d’actions est totalement différent d’une feuille de route, un plan d’actions doit fournir des éléments tels que les délais, les coûts, les indicateurs de performance mesurables et quantifiables ».

Pour Koureichy Cissé, journaliste, Moctar Ouane précipite ainsi sa démission : « L’éléphant annoncé est arrivé avec un pied cassé. Aussi pauvre qu’irréalisable le plan d’action que le Premier ministre a présenté ce jour (ndlr 19 février 2021) est plutôt une démission. Un au revoir. Tout d’abord, ce plan d’action ressemble à une dissertation littéraire sur la solution et proposition de sortie de crise rédigée par un club de jeunes universitaires en quête de licence et non un plan d’action d’une autorité politique et gouvernementale. Rien d’autoritaire ! Pas de chiffre ! Pas de date ! Pas de délais ! Pas d’échéance ! Absence totale d’un chronogramme digne de ce nom. Pis, une démission pure et simple. Car il se fait griser devant la France et la communauté internationale en parlant de la relecture de l’Accord d’Alger (soutien infaillible) et ici à l’intérieur en ayant mentionné la dissolution des milices. Vous verrez très bientôt sa tête sera mise en revendication après le refus du CNT. Sans aucun soutien, avec un mentor déjà affaibli, il serait obligé de partir ».

Rappelons que, le Plan d’action du gouvernement de la transition comporte certaines actions stratégiques dont la réduction du train de vie de l’État, pour la rationalisation des ressources publiques; les réformes institutionnelles et administratives; les réformes politiques et électorales; le dialogue social inclusif; l’accélération du processus de régionalisation, avec le transfert concomitant des ressources humaines et financières aux Collectivités territoriales; l’initiation des concertations régionales et nationales pour l’adoption de l’avant-projet de révision constitutionnelle; l’organisation du référendum constitutionnel; le refonte du système éducatif, avec une forte implication des acteurs clés et responsables; l’organisation de conférences sociales, pour apaiser le front social; la réconciliation nationale, pour la résolution de nombreux conflits, religieux, armés, sociaux, etc. ; la redynamisation des investissements dans les infrastructures physiques et routières; les actions innovations dans le domaine de la santé : construction de CS Réf de CSCOM à l’intérieur du pays; le retour des déplacés et des réfugiés dans leurs zones respectives, avec un plan de réinsertion socio-économique: Formation et installation dans le domaine de l’artisanat ; construction de centres de formation professionnelle dans plusieurs zones à l’intérieur du pays; l’élaboration du calendrier électoral; l’organisation des élections générales, en mettant l’accent sur le consensus autour du processus électoral; la sécurité et défense, etc. ; diligenter la relecture, l’appropriation et la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger ; accélérer le processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion des combattants dans le Nord et le Centre du pays ; procéder à la dissolution effective de toutes les milices d’auto-défense ; redéployer les forces de défense et de sécurité sur l’ensemble du territoire national.

Seydou K. KONE

Source: Bamako News

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