Les conjoints issus de religions différentes doivent faire fi du qu’en dira-t-on pour la pérennité de leur union. Les préjugés religieux sont tenaces
L’honnêteté intellectuelle et la conviction religieuse sont le soubassement de l’union sacrée de deux conjoints de religion différente. à condition que la religion de chacun des conjoints ne condamne pas le mariage mixte. La confidence de Véronique Coulibaly 23 ans, étudiante en Comptabilité et Gestion d’Entreprise en Licence 3 dans une Université privée de la place nous édifie sur le sujet. Elle porte sur la liaison amoureuse et le mariage de son père catholique avec sa mère musulmane.
Notre interlocutrice est grande. Elle a la taille fine. La silhouette de mannequin attire les regards sur son passage. Au moment de notre entretien dans le hall de son université, elle est habillée d’un jean bleu et d’un débardeur blanc près du corps. La coiffure qu’elle porte sur la tête n’est pas à la portée de toutes les étudiantes.
La mèche brésilienne de taille 18 recouvre son cou. Le père et la mère de Véronique se sont connus à Bamako, dans les années 1996. Le père un ivoirien catholique et la mère musulmane se fréquentent. Cette liaison n’est pas conforme aux us et coutumes de la famille maternelle de Véronique. Pour les grands parents maternels, il n’est pas question que leur petite fille musulmane se marie avec un homme d’une autre religion.
Il devient impossible aux deux jeunes de s’aimer librement. La mère de Véronique transgresse tous les interdits religieux et sociaux. Elle rejoint son homme dans sa famille. Les amoureux se marient sans l’aval des parents. L’année suivante la maman de Véronique tombe enceinte. Elle décidera d’aller accoucher à Abidjan, la capitale ivoirienne. La délivrance aura lieu dans sa belle famille en présence » de son mari. Trois ans plus tard, les conjoints se séparent. Pour quelles raisons ?
L’histoire se répète-La réalité avait rattrapé le couple mixte. La belle mère catholique n’a jamais pardonné à la jeune épouse musulmane de détourner la tête de son fils. La mère revancharde avait choisi dans le secret une fille de confession chrétienne pour son fils.
La maman musulmane de Véronique rentrera au pays et la fillette ( Véronique ) restera avec son père. Quand elle aura 16 ans, Véronique s’approchera de sa mère. Elle viendra passer ses vacances dans la famille maternelle. Pas question pour la fille catholique de manifester sa foi chrétienne dans une famille musulmane. Au contraire, elle doit aller dans une école coranique apprendre les préceptes de l’islam. Elle priera comme les musulmans durant son séjour, sans son consentement. Cette imposition, à la surprise de Véronique, est venue de sa mère musulmane. Ce n’était plus la militante de la liberté religieuse qui avait épousé par amour son père. Cet épisode avait marqué l’étudiante.
Elle évoque sa douleur avec tristesse : « le problème c’est maman. Elle exige ma conversion à l’islam. » Elle voit mal son enfant pratiquer, une autre confession que la sienne, l’Islam. Elle a décidé de ne jamais se présenter dans une église pour célébrer mon mariage, si je reste chrétienne. Elle va loin ! Si je meurs avant elle, elle n’assistera pas à mes funérailles et vice-versa », Le couple mixte, Mamadou Diarra et Cecilia Kanté, n’a jamais connu de friction par rapport à leur foi chrétienne et musulmane. Ils se sont dit « Oui » pour le meilleur et pour le pire. L’amour n’a pas de frontière.
Un couple modèle-Ces deux conjoints sont mariés depuis 12 ans. La vie quotidienne se déroule dans une parfaite harmonie en compagnie de leurs trois enfants. L’homme est musulman, la femme est chrétienne. Ces jeunes ont su construire une vie de couple dans le bonheur, en transformant leur différence en atout. « Le seul malentendu a été enregistré au moment de la célébration du mariage. Mes beaux parents voulaient que leur fils se marie à la mosquée, et mes parents proposaient l’église.
Les échanges se sont déroulés dans le respect mutuel. Les deux familles sont parvenues à trouver un consensus. Le mariage a été célébré à la mosquée et ensuite à la mairie. Les mariés cinq ans après ont organisé une cérémonie à l’église ».
Ce couple suscite l’admiration de tout le monde. L’entente est parfaite au sein du foyer et les rapports sont amicaux avec les voisins. Chacun respecte la foi de l’autre. L’homme va à la mosquée les vendredis. La femme se rend à l’église les dimanches. L’épouse Cécilia est radieuse au moment où elle développe sa vision du couple mixte :« Je ne pense pas que le seigneur qui est lui-même amour puisse interdire le mariage entre ses enfants, étant donné que nous adorons un même Dieu. L’amour c’est ce qui compte le plus. Quand on est sûr de ce qu’on ressent, rien ni personne ne peut nous arrêter. En tout cas, nous la vivons bien cette différence car c’est elle qui fait la beauté de notre couple ». Elle a ajouté que les conjoints règlent leurs divergences dans le dialogue.
Cecilia soutient que la clef de leur mariage est la communication et le respect mutuel. Le mari amène ses deux premiers fils à la mosquée les vendredis, choses qui ne semble pas déranger son épouse. Elle espère que leur troisième enfant, qui est une petite fille aura la liberté de choisir sa religion.
L’harmonie qu’affiche ce couple mixte est appréciée par leur voisin Modibo Traoré. Il confirme que depuis plus de dix ans, personne n’est intervenu pour régler une incompréhension entre Cécilia et son mari. Leur famille maintient le respect et l’entente avec tout le voisinage, C’est un couple modèle.»
POINT DE VUE DE DEUX LEADERS RELIGIEUX : L’église de la foi ‘’Apostolique’’ de Sirakoro Nekintala est dirigée par le pasteur Sagara. A Josué. Selon lui, il n’y a pas question de mariage mixte dans la Sainte écriture.
« Les enfants d’Abraham doivent se marier entre eux dans la famille sur la base de la foi, que rien ne soit obstacle dans leurs vies pour l’adoration de Dieu, Genèse 15-1-7 ». Il a précisé que c’est le même Dieu qui a interdit le mariage avec d’autre maison aussi avec d’autres nations.
Exode 34 : garde toi de faire alliance avec les habitants du pays par le mariage dit le verset 15-16 rappel de l’interdiction avec d’autre peuple par l’éternelle. Pour ce pasteur, le mariage mixte est interdit par le Christ, mais introduit par l’homme dans l’intérêt de sa convoitise. « Ceux qui le font méconnaissent leur religion, moi je ne célébrerai jamais ce genre d’union dans mon église. Ce serait de l’idolâtrie, genèse 11 ; 10-14 », a-t-il déclaré. L’homme de foi a indiqué que la non considération de la loi de Seigneur Jésus emmène toujours les conséquences graves dans la vie de ses enfants et souvent même la mort. Sagara A.
Josué a révélé ceci : Ne vous y trompez pas, dit-il, les mauvaises compagnies corrompent les bonnes mœurs dit la bible, 1 Corinthiens 15-33, la doctrine biblique ne nous permet pas de nous marier ailleurs même étant veuf, 1 corinthiens 7 : 39. Cependant le pasteur admet que parmi les fidèles de son église, il y’a ceux qui sont mariés à des musulmans. Quant à leur sort, tempère-t-il, l’église ne les rejette pas mais prie pour qu’ils retrouvent le droit chemin. Selon le prêcheur, Ahmed Diallo, il est préférable qu’un musulman prenne une musulmane pour épouse. Mais il peut arriver qu’un musulman prenne une femme d’une autre religion (chrétienne ou juif), à condition qu’elle soit noble, et dans le but de l’amener à se convertir à l’islam. Le mari musulman supporte la charge familiale. Il a le pouvoir de décision. Il bénéficie d’une grande influence dans sa famille. Il a le pouvoir d’apporter le changement. Les femmes sont des soumises. Elles vivent dans la quête constante de plaire à leurs époux. Dans cet esprit beaucoup parmi celles dont la religion est différente de l’Islam finissent par adopter la religion de leur mari musulman. L’érudit Diallo développe que l’islam ne permet pas à la femme musulmane d’épouser un homme non musulman. « L’homme qui prend une chrétienne en mariage ne doit pas lui imposer sa religion mais peut la conduire à y adhérer, car on ne peut empêcher une personne de pratiquer sa croyance », a insisté le prêcheur. La meilleure manière de faire adhérer une personne à une autre religion, n’est pas la parole, mais le comportement. Le meilleur d’entre nous, est celui qui a le meilleur comportement.
Maïmouna SOW
Quelques chiffres sur le mariage mixte à Bamako
Le secrétaire général de la Paroisse de la Cathédrale du « Sacré Cœur » à Bamako, Casimir Mendy explique que l’église catholique accepte le mariage avec disparité de culte. Par exemple entre musulman et chrétien. Il a révélé qu’au cours des trois dernières années, 55 mariages mixtes (musulman-chrétien) ont été enregistrés entre le 01 janvier 2016 et le 17 octobre 2019.
Le prêtre Jacques Badji a ajouté que de 2010 à aujourd’hui, il a célébré une cinquantaine de mariages entre des hommes musulmans et des femmes chrétiennes. « Je me souviens d’un seul cas où l’homme est chrétien et la femme musulmane, depuis que je suis en fonction à Bamako », a certifié le prêtre Jacques Badji.
Dans la circonscription de la mairie de la Commune IV, le centre d’état civil « Hamadallaye 1 » a célébré plusieurs mariages mixtes. L’attachée d’administration, Mme Diakité Rokia Bagayoko, assure que les femmes musulmanes se marient aux hommes chrétiens, autant que les hommes chrétiens prennent des musulmanes. Malheureusement, la mairie ne tient pas de registre faisant ressortir les statistiques sur les mariages mixtes.
M. S.
Source: L’Essor- Mali